Eglises d'Asie

Rencontrant des hommes politiques et des moines bouddhistes, les responsables de l’Eglise catholique redisent que les catholiques n’ont rien à voir avec les “conversions non éthiques”

Publié le 18/03/2010




A l’occasion de rencontres le 30 avril dernier avec des hommes politiques et le 7 mai avec d’importants moines bouddhistes, les responsables de l’Eglise catholique ont redit avec force que les catholiques sri-lankais, qui représentent 90 % des chrétiens dans le pays, n’ont rien à voir avec les “conversions non éthiques i.e. obtenues par la contrainte ou par des dons en argent, de bouddhistes au christianisme. La relation de telles conversions a préoccupé le monde bouddhiste ces derniers temps et quatre paroisses catholiques ont été attaquées (1). Rappelant que l’Eglise catholique a clairement condamné de tels procédés, auxquels ont eu recours des groupes protestants, les évêques ont à nouveau affirmé qu’ils souhaitaient maintenir de bonnes relations avec les bouddhistes. De plus, ont-ils ajouté, les catholiques étant présents à la fois en milieu cinghalais et en milieu tamoul, l’Eglise a un rôle à jouer dans le règlement de la question tamoule.

Le 30 avril, le président de la Chambre des députés, W. J. M. Lokubandara, a rendu visite à Mgr Oswald Gomis, archevêque de Colombo et président de la Conférence épiscopale. Récemment élu à la présidence de la Chambre, Lokubandara est membre de l’opposition (2). Il a fait part à Mgr Gomis de son souci concernant les dissensions religieuses que certains essayent de provoquer entre les chrétiens et les bouddhistes, mentionnant notamment les activités de groupements fondamentalistes d’origine chrétienne. En réponse, Mgr Gomis a dit que ces groupes fondamentalistes étaient aussi pour l’Eglise une cause de souci mais qu’il fallait dire et redire que, contrairement à une opinion couramment répandue, l’Eglise catholique n’était pas mêlée aux “conversions non éthiques” opérées par ces groupements.

Dans la même journée, quatre des ministres du gouvernement nouvellement formé ont eux aussi rendu visite à Mgr Gomis. Ils ont la particularité d’appartenir tous quatre au JVP, le Front de libération du peuple, parti à l’origine d’inspiration marxiste et aujourd’hui défenseur ardent de l’identité de la communauté cinghalaise. Désormais membre de la coalition au pouvoir, le JVP s’est montré très actif durant la campagne électorale de ces derniers mois dans la dénonciation des “conversions non éthiques”. A la résidence de l’archevêque de Colombo, Vijitha Herath, ministre des Affaires culturelles et des Héritages nationaux, a dit que son parti était pour rien dans les attaques de lieux de culte chrétiens de ces derniers temps et a ajouté que le JVP était à son tour accusé d’avoir manigancé des attaques de temples bouddhistes.

Aux ministres du JVP, Mgr Gomis a redit ce qu’il avait dit au président de la Chambre des députés, tout en précisant que “la mission des chrétiens” consistait aussi à aider les personnes qui sont dans le besoin, sans que cela puisse être assimilé à une tentative de gagner des convertis par des avantages matériels. Evoquant l’aide que l’Eglise catholique avait apporté aux cadres du JVP emprisonnés après la rébellion de 1971 – rébellion durement réprimée -, Mgr Gomis a rappelé : “Nous vous avons aidé lorsque vous étiez en prison et sans aucun secours. Nous avons même financé votre assistance juridique afin que vous puissiez vous défendre devant les tribunaux. Mais avons-nous pour autant demandé à l’un ou l’autre d’entre vous de devenir catholique du fait de cette aide donnée ?”

Avant leur départ, chacun des ministres s’est vu offrir deux ouvrages : Lakdiva Kithunu Puraanaya de Rita Welgampola (3) et Lakmathawa ha Katholika Sasuna de Mgr Oswald Gomis. Le premier décrit les communautés chrétiennes présentes au Sri Lanka avant l’arrivée dans l’île des Portugais et le second a trait à la contribution des chrétiens à la construction et à la vie de la nation sri-lankaise.

Le 7 mai, c’était au tour de Mgr Gomis de se déplacer. Au terme de leur assemblée plénière, les évêques catholiques ont envoyé une délégation à Kandy pour rencontrer quelques uns des principaux moines bouddhistes du pays. Dirigée par Mgr Gomis, la délégation a rencontré le vénérable Rambukkwelle Sri Vipassi Maha Nayaka Thero et le vénérable Udugama Buddharakkhita Thero, dans leur résidence de Kandy. Au nom des catholiques, elle a présenté les voux de l’Eglise pour la fête bouddhique de Vesak. Les évêques ont exprimé leur volonté d’instaurer et de maintenir de bonnes re-lations avec le monde bouddhiste ; ils ont dit leur désir que les dirigeants religieux s’unissent et soient en harmonie pour construire le bien du pays, dans le cadre d’une unité nationale garantissant la liberté et les droits de tous les citoyens. Au sujet des “conversions non éthiques les évêques ont rappelé leur position et leur volonté de défendre le droit de tout homme à professer sa religion ou à changer de religion. En réponse, les moines ont déclaré apprécier la visite et l’invitation au dialogue faite par l’Eglise catholique. Ils ont aussi exprimé le souhait de renforcer le Congrès des religions, organisme qui rassemble les responsables religieux bouddhistes, catholiques, hindous et musulmans du pays (4).