Eglises d'Asie

Dans le sud du pays, malgré la peur des attentats, les catholiques se sont retrouvés nombreux pour leur fête patronale

Publié le 18/03/2010




Les troubles et les violences qui agitent depuis plusieurs mois les provinces du sud thaïlandais, région à majorité musulmane, n’empêchent pas la petite communauté catholique locale de mener ses activités mais l’obligent toutefois à prendre certaines précautions. Le lieu de la fête patronale a ainsi, par mesure de précaution, été déplacé mais les catholiques n’ont pas boudé pour autant l’occasion de se retrouver “en famille”. Quelque deux cents catholiques des trois provinces méridionales de Narathiwat, Pattani et Yala se sont ainsi réunis à Sungai Kolok, le 28 août dernier, pour fêter Ste Monique et St Augustin.

Les violences, perpétrées par des activistes locaux et auxquelles les forces de l’ordre répondent souvent par la force armée, ont commencé dans la région le 4 janvier 2004 et sont devenues quasi quotidiennes ; elles ont fait trois cents morts et plusieurs centaines de blessés (1).

Prasith Ornkeo, un responsable laïc qui a accompagné trente paroissiens à Sungai Kolok pour la fête du 28 août, explique : “Il n’y a pas beaucoup de danger pour nous et notre paroisse parce que les attentats se font le plus souvent dans les zones urbaines.” Malgré tout, le P. Roosens et le P. Sakol Penchai, les deux seuls prêtres catholiques de cette région, ont reconnu l’un et l’autre que la crainte du danger avait dissuadé beaucoup de catholiques de Bangkok, de Sam Phran et des provinces du centre de descendre dans le sud pour la fête patronale.

Cette fête patronale est une occasion pour les catholiques locaux de renouveler leur vie de foi en communauté, explique le P. Sakol. “C’est leur fête de famille”, dit-il. C’est l’occasion aussi, chaque année, après la célébration eucharistique, de retrouver ceux des autres paroisses, d’échanger des nouvelles, de bavarder les uns avec les autres et de s’encourager.

Au sujet des violences et attentats, le P. Sakol dit que les gens « sont habitués” puisque “ça arrive tous les jours”. Sathaporn Pinyo, un coiffeur, paroissien de Sungai Kolo depuis vingt ans, assure quant à lui que les troubles n’affectent pas les catholiques : “Il n’y a pas de problème ici et des gens de différentes religions vivent ensemble en paix. Si les violences arrivent, elles arrivent. Il n’y a pas de quoi avoir peur.” Le P. Roosens dit à peu près la même chose : “Même si la violence ne m’effraie pas, je ne suis pas indifférent. Je me déplace toujours revêtu de ma soutane. C’est le Seigneur que je sers à travers mon travail, alors je ne m’inquiète pas.”

Au cours de la célébration eucharistique, le P. Philip Somchai Kitnichi, consulteur du diocèse de Surat Thani qui recouvre les quinze provinces du sud thaïlandais, a dit à son auditoire que le petit nombre des fidèles ne signifiait pas qu’on n’avait plus à vivre en témoin de l’Evangile : “Proclamer la Bonne Nouvelle ne consiste pas à faire beaucoup de bruit. Cela signifie vivre en donnant le bon exemple de la charité, du pardon et de l’unité.”

Jusqu’en 1986, il n’y avait pas de chapelle à Sungai Kolok où, depuis 1968, des prêtres salésiens venaient régulièrement visiter les catholiques. En 1990, le P. Rosens a acheté un terrain et y a bâti la chapelle Ste Monique en 1995. Depuis, il y célèbre la messe une fois par mois devant une cinquantaine de fidèles. Lui et le P. Sakol servent environ 500 catholiques répartis dans les trois provinces. Outre la paroisse de Sungai Kolok, il y a une paroisse à Yala, une autre à Pattani et deux encore à Narathiwat.