Eglises d'Asie

Elu sans surprise à la tête de l’UMNO, le Premier ministre promet un gouvernement islamique modéré

Publié le 18/03/2010




Du 23 au 27 septembre dernier, l’UMNO (United Malays National Organisation) a tenu son congrès annuel. Parti dominant de la scène politique malaisienne, il a donné au pays tous les Premiers ministres qui ont dirigé la Fédération depuis 1957, date de l’indépendance. Lors de ce congrès, l’UMNO a porté à sa tête – et sans surprise – le Premier ministre Abdullah Ahmad Badawi. Au pouvoir depuis onze mois (1), le Premier ministre a prononcé un discours de politique générale, promettant un gouvernement islamique modéré. Pour la première fois, il a défini ce qu’il appelle le principe de l'”islam hadhari” – ou ‘islam civil’, déclarant que c’était “une approche mettant l’accent sur un développement compatible avec les principes de l’islam et centré sur l’amélioration de la qualité de la vie”.

Devant 2 500 délégués, le Premier ministre s’est présenté fort d’une transition opérée en douceur après le retrait, en octobre 2003, de Mohamad Mahathir, l’homme fort de la Fédération de Malaisie durant vingt-deux ans. Le succès éclatant aux élections législatives de mars dernier de la coalition gouvernementale (2), la bonne santé de l’économie et jusqu’à la surprise créée au début du mois de septembre par la remise en liberté de l’ex-Premier ministre adjoint Anwar Ibrahim ont été autant d’éléments qui ont permis à Abdullah Badawi d’asseoir sa crédibilité. Fort de cette position, le Premier ministre a esquissé son programme politique pour les années à venir.

Aux délégués de l’UMNO et plus largement à l’ensemble des Malaisiens, il a déclaré que son parti, au sein de la coalition majoritaire, le Barisan Nasional, ne se servira jamais de l’islam à des fins politiques pour réduire le poids électoral du Parti Islam SeMalaysia (PAS), premier parti de l’opposition et parti d’obédience islamique (3). Se référant à la victoire électorale de mars dernier, il a déclaré que “les résultats sortis des urnes nous confortent dans l’opinion que, face au PAS, il n’est pas nécessaire d’altérer notre philosophie ajoutant que l’UMNO et l’administration “n’avaient pas besoin de changer [leurs] méthodes. Nous n’avons pas besoin de nous inquiéter. Nous ne devons pas tomber dans le piège et utiliser la religion à des fins politiques. L’éclat de la vérité ne peut pas être occulté par le brouillard du mensonge.”

Concernant Anwar Ibrahim, actuellement en Allemagne pour des soins médicaux, le Premier ministre a été très bref. Pendant qu’il évoquait son cas, des images défilaient en arrière-plan sur un écran et montraient les forces de l’ordre dans les rues de la capitale il y a six ans lorsque Anwar Ibrahim était à la tête d’imposantes manifestations anti-Mahathir. Abdullah Badawi a promis “d’utiliser toute la force de la loi contre quiconque ou quel que groupe que ce soit” recourant “à la violence ou aux émeutes”. Libre mais interdit de se présenter devant les électeurs avant 2008, Anwar Ibrahim paraît – pour l’heure – dans l’incapacité de réaliser un come-back au sein de l’UMNO.

Au sujet de la place de l’islam dans une société plurireligieuse et multiethnique, au sein d’un pays profondément transformé par vingt années d’une croissance économique soutenue, le Premier ministre a affirmé que le développement économique était, pour la communauté malaise, compatible avec les prescriptions de l’islam. L’“islam hadhari” vise, a expliqué Abdullah Badawi, à améliorer la qualité de vie des Malais en leur permettant d’acquérir compétences et connaissances pour que l’économie conserve son dynamisme. Les valeurs ainsi promues ne vont pas contre l’islam, a-t-il affirmé, soulignant au passage que l’apprentissage de l’arabe pour les écoliers allait devenir obligatoire. Il a annoncé que les principes islamiques sous-tendant sa vision d’une société moderne seront expliqués et diffusés dans de courtes brochures. L’objectif, a-t-il encore souligné, est que, si les Malais veulent jouir d’un niveau de vie semblable à celui des non-Malais, ils doivent comprendre que leur religion les amène à “renforcer chacun des aspects de leur vie”. Ils doivent acquérir les attitudes et les compétences qui leur permettront d’être des acteurs à part entière d’un monde globalisé au sein d’une culture musulmane qui “concilie les besoins de ce monde et ceux de l’autre”. En une référence claire à la politique de discrimination positive mise en place de longue date au profit des Malais (4), le Premier ministre a déclaré que ces derniers ne pouvaient compter uniquement sur l’aide du gouvernement, sauf à ce que “des béquilles se transforment en chaises roulantes”.

Par ailleurs, a souligné le Premier ministre, le principe d’un développement équilibré entre matières profanes et matières spirituelles ne doit pas inquiéter les non-Malais. “Il n’est pas dans la culture de l’UMNO d’instrumentaliser la religion a-t-il insisté, soulignant que les non-Malais avaient tout à gagner en terme de stabilité à ce que les Malais accèdent à un statut économique et social équivalent à celui des autres communautés du pays.