Eglises d'Asie

A l’issue du premier synode diocésain et à l’occasion de la retraite annuelle du clergé, l’évêque de Rangoun s’est livré, devant ses prêtres, à une mise au point sans concession

Publié le 18/03/2010




Huit jours après la fin du synode diocésain (1), Mgr Charles Bo présidait la messe de clôture de la retraite annuelle des prêtres de l’archidiocèse de Rangoun. Le 8 octobre dernier, dans son homélie, après un appel à l’unité malgré les différences d’âge, de culture, de race et d’éducation, l’archevêque de Rangoun a expliqué que “tout ce qui se vit dans un diocèse est le reflet de ce que vivent ses prêtres”. Prier ensemble, célébrer l’Eucharistie ensemble ainsi que la prière du soir sont importants. “Prier nous unira a-t-il dit à ses prêtres. Il les a félicités pour leur obéissance et leur disponibilité à propos des nominations à de nouveaux postes. Mais il les a aussi mis en garde : “Nous devons nous souvenir que nous avons chacun nos faiblesses et que dans notre personnalité subsistent malgré tout des aspects négatifs.” Il a cité le racisme, l’alcoolisme et une vie spirituelle trop superficielle.

Les Birmans sont l’ethnie la plus nombreuse en Birmanie mais les Chinois, les Karens, les Mons, les Rakhines, les Tamouls et d’autres ethnies encore forment des minorités importantes. A propos de l’ignorance d’une communauté par l’autre, voire de la haine raciale, Mgr Charles Bo a été très ferme : «Elle ne doit pas exister parmi nous. Si les prêtres font preuve de discrimination, les chrétiens suivront leur exemple.” Il a ajouté que les catholiques devaient prendre très au sérieux le fait que l’année 2005 a été déclarée par la Conférence épiscopale de Birmanie “Année de l’Eucharistie, année de l’unité”.

Mgr Charles Bo a continué en demandant à son clergé de réfléchir en profondeur aux points faibles. Il leur a dit avoir mené sa propre enquête auprès des fidèles et 95 % de ces derniers ont répondu que l’alcoolisme et le jeu étaient un problème parmi les prêtres. “Il nous faut faire quelque chose. Nous avons trop d’ivrognes a-t-il insisté. Quoi qu’il en soit, a-t-il assuré, notre réponse doit être positive, en nous soutenant les uns les autres et en nous entraidant “sans jugement ni condamnation”.

L’archevêque salésien a continué en disant que “l’asphyxie spirituelle existe” au sein du clergé. Des désordres spirituels se cachent derrière la routine de la messe quotidienne, de la lecture du bréviaire et de l’administration des sacrements, a-t-il détaillé. Parmi ces symptômes, il a cité le manque d’enthousiasme, de paix, de gratitude, de créativité et d’humour, reconnaissant cependant que tout cela n’apparaissait pas toujours au grand jour. “Si un prêtre dit : ‘La messe me pèse, mon bréviaire et mon oraison me laissent froid’, c’est qu’il a un problème. Réveillons-nous !”. Des symptômes comme le fait d’être incapable de rire ou de sourire indiquent le manque d’une vie spirituelle vraie. “Quand quelqu’un rit, c’est le signe d’une surprise ou d’une joie. Pour rire ou sourire, il faut une certaine dose d’humilité et d’ouverture. Quand l’humour et la spontanéité font partie de notre vie, peines et souffrances guérissent vite. La souffrance devient rédemptrice.” Dans l’incapacité à prendre la vie du bon côté, a-t-il ajouté, beaucoup sont amers et tiennent les autres pour responsables. “Les chrétiens sont un peuple eucharistique qui sait, sans fin, rendre grâce. Un vrai spirituel est quelqu’un qui déborde de reconnaissance a-t-il dit encore, ajoutant qu’il parlait à ses prêtres “comme un frère à ses frères”.

Quelques prêtres ont commenté cette homélie mais sans vouloir se faire connaître nommément. “Comme prêtres, nous n’existons pas sans l’évêque. S’il réprimande, il le fait comme un père avec ses enfants. Nous avons à l’écouter comme des fils ou comme des frères a dit l’un, tandis que l’autre a déclaré avoir constaté, comme toujours, qu’après les félicitations les reproches étaient tombés, sévères. Un troisième, enfin, a fait observer : “On attend de lui qu’il soit un bon évêque, exigeant le respect et l’obéissance. Après tout, nous n’existons que par l’évêque et, quel qu’il puisse être, nous avons promis d’obéir.”