Eglises d'Asie

Le 2 novembre, Jour des morts, des catholiques du Fujian honorent la mémoire d’un missionnaire jésuite du XVIIe siècle, surnommé de son vivant le « Confucius d’Occident »

Publié le 18/03/2010




La tombe du premier jésuite missionnaire du Fujian est pour les catholiques de cette province une étape importante lorsqu’ils viennent visiter les tombes de leurs morts à la Toussaint et le lendemain 2 novembre, Jour des morts (1). La tombe du prêtre jésuite Giulio Aleni (1582-1649) se trouve parmi les premières, à l’entrée principale de la partie catholique du cimetière de la Colline du Lotus, dans la banlieue de Fuzhou, capitale du Fujian. Nombreux sont les catholiques qui, le Jour des morts, viennent dépoussiérer leurs tombes et rendre visite au P. Aleni, explique sour Zheng Wenying, du diocèse de Fuzhou. Elle souligne que des étrangers viennent également sur cette tombe dont, parmi eux, des spécialistes non chrétiens qui conduisent des recherches sur ce prêtre italien.

Les restes du P. Aleni n’ont pas toujours été inhumés à cet endroit. Auparavant, ils reposaient dans un ancien cimetière, abandonné depuis, au milieu d’autres tombes chrétiennes, souvent saccagées par des voleurs. Des promoteurs immobiliers qui convoitaient la parcelle à l’abandon ont offert en échange à l’Eglise catholique une section du nouveau cimetière privé de la Colline du Lotus, précise Mgr Joseph Zheng Changcheng, 92 ans, évêque « officiel » du diocèse de Fuzhou (2). Les restes des catholiques qui avaient été inhumés près du P. Aleni ont été eux aussi transférés dans la section catholique de ce nouveau cimetière où s’élèvent maintenant un ossuaire et une chapelle.

La tombe du P. Aleni est ainsi devenue un lieu de pèlerinage, que ce soit le 2 novembre ou le 5 avril, pour la fête de Qingming et pour la fête de Chongyang, qui tombe en septembre ou octobre selon le calendrier lunaire. D’après sour Zheng, le diocèse ne possède aucun portrait du missionnaire sauf celui reçu par fax de l’étranger au moment de l’édification de la nouvelle sépulture. Mgr Zheng se souvient qu’en 1999, au moment du transfert des restes, ils avaient trouvé le squelette du P. Aleni, une croix de bronze posée sur sa poitrine. Ces restes ont été incinérés et les cendres placées dans le nouveau caveau. « Il représente beaucoup pour l’Eglise du Fujian parce que c’est lui qui a transmis la foi catholique à nos ancêtres et marqué le début du catholicisme ici précise l’évêque.

Le P. Aleni, connu sous son nom chinois d’Ai Yulue, a débarqué en 1610 à Macao, porte d’entrée pour la Chine de tous les missionnaires de l’époque. Cette même année mourait à Pékin le P. Matteo Ricci, devenu astronome reconnu à la Cour de l’empereur. Trois ans après son arrivée à Macao, le P. Aleni entrait en Chine où il adopta costume et coutumes chinoises. Après trente années de vie missionnaire – dont vingt-cinq passées dans le Fujian -, il mourut en 1649. Sur sa tombe, on peut lire qu’il a bâti vingt-deux églises et converti plus de 10 000 personnes. Il est aussi l’auteur de vingt-quatre livres écrits en chinois, en particulier sur la vie du Christ, les prières du rosaire et l’Eucharistie. Le P. Aleni citait souvent les enseignements de Confucius (3), estimant que les principes philosophiques et moraux de ce grand sage incitaient au monothéisme. Il utilisait les classiques chinois quand il s’entretenait avec les lettrés, ce qui lui valut l’épithète de « Confucius d’Occident ».