Eglises d'Asie – Malaisie
Une décision de justice relative à l’interdiction du port du turban musulman à l’école provoque des remous
Publié le 18/03/2010
L’affaire remonte à 1997, lorsque trois garçons, alors âgés de 10, 11 et 13 ans, avaient été expulsés d’une école publique de l’Etat de Negeri Sembilan, situé dans la partie méridionale de la péninsule malaise. Le proviseur de l’école avait estimé que les jeunes musulmans ne devaient pas porter, dans l’enceinte de l’école, le “serban turban généralement associé à l’islam fondamentaliste, mais devaient se contenter du “songkok la coiffe traditionnelle des Malais. Un premier jugement avait ordonné la réintégration des élèves, puis un second jugement en appel, en août 1999, avait confirmé cette décision. Par le jugement du 22 novembre, le proviseur de l’école en question se voit reconnu le droit de ne pas accueillir un élève dont la tenue lui semble contrevenir au règlement intérieur de son établissement ou aux directives fixées par le ministère de l’Education.
Les réactions du PAS ont été immédiates, un de ses responsables estimant que la décision de justice était “un retour en arrière par rapport à une décision qui permettait la liberté d’expression des enfants”. Hatta Ramli, membre du comité exécutif du PAS, a ajouté : “Si on commence à interdire ce genre de liberté d’expression, nous n’aurons plus beaucoup de différence avec la France où ils ont interdit le foulard dans les écoles.” Mahfuz Omar, du comité exécutif du PAS, s’est interrogé sur la volonté du gouvernement d’empêcher le développement de l’islam. Les responsables des écoles, a-t-il déclaré, devraient se consacrer à améliorer le niveau académique de leurs élèves plutôt qu’à “réduire la liberté religieuse”. “Où est le mal à porter le serban ? Les sikhs portent bien un turban, eux s’est-il interrogé. En Malaisie, les filles musulmanes sont autorisées à porter le foulard à l’école et les garçons sikhs le turban (1). A France-Presse, un avocat a expliqué que cette différence de traitement tenait au fait que le serban est “associé aux imams et aux sages” et qu’il n’est porté par de jeunes garçons qu’au sein des milieux musulmans rigoristes.
Pour l’heure, les conséquences du jugement du 22 novembre sont encore incertaines. L’avocat des trois garçons a indiqué vouloir porter le cas, en dernière instance, devant la Cour fédérale. Le ministère de l’Education n’a pas donné de nouvelles consignes vestimentaires. Le 24 novembre, un de ses responsables a seulement rappelé que “le tudung [le foulard] est autorisé pour les filles, le songkok peut être porté par les garçons et les garçons pendjabis peuvent porter le turban sikh. A part cela, l’uniforme normal des écoles doit être observé”. Le père des trois garçons a fait savoir qu’au cas où ses enfants se verraient refuser le droit de porter le serban, il les retirerait de l’école publique pour les inscrire dans “une école religieuse islamique”.
Selon les analystes locaux, l’issue finale de cette affaire indiquera qui, du PAS ou du gouvernement, peut s’enorgueillir de défendre le mieux l’islam. Dans les années 1980, la Cour suprême, qui était à l’époque la juridiction de dernière instance, avait stipulé que les fonctionnaires musulmanes n’étaient pas autorisées à porter le “purdah le voile, au travail. Depuis cette époque, les partisans d’un islam plus rigoriste, voire fondamentaliste, ont accru leur audience dans la société et le gouvernement est pris entre la nécessité de ne pas effaroucher les non-musulmans et celle de prêter l’oreille à ceux des musulmans qui réclament une adhésion plus étroite aux principes islamiques. Ces dernières années, nombre de parents non musulmans ont retiré leurs enfants des écoles publiques, estimant que l’influence des milieux fondamentalistes musulmans y était de plus en plus importante.