Eglises d'Asie

LE POINT SUR LA SITUATION POLITIQUE ET SOCIALE du 1er janvier au 28 février 2005

Publié le 18/03/2010




POLITIQUE

Les deux derniers mois sont marqués par la volonté de museler l’opposition et par une dérive vers la dictature.

En début janvier, Sam Rainsy écrit deux lettres au Premier ministre pour le féliciter de sa politique de réformes. Celui-ci n’y voit qu’une tactique politique visant à briser son alliance avec le FUNCINPEC et à positionner le PSR comme partenaire de rechange, l’opposition se serait partagé les rôles : Sam Rainsy adresserait des félicitations, Khem Sokha, directeur du Centre de défense des droits de l’homme, garderait le rôle d’accusateur. En réponse à Hun Sen, Sam Rainsy révèle que sa première lettre demandait la libération de ses militants incarcérés, la seconde estimait que le gouvernement allait dans la bonne direction en voulant lutter contre la corruption. En aucun cas il ne voulait que son parti ne devienne un satellite du PPC.

Le 8 janvier, Hun Sen annonce qu’il sera candidat au poste de Premier ministre en 2008. Le 11 janvier, Heng Samrin, président honoraire du PPC, affirme que c’est au congrès du parti de nommer un candidat. Le 25 janvier, Hun Sen récidive en annonçant qu’il ne sera pas trop vieux en 2012 pour être Premier ministre. S’il mourait le gouvernement serait dissous, ce serait alors le chaos. Heng Samrin lui répond dès le lendemain que la constitution prévoit le remplacement du Premier ministre par le premier Vice-Premier ministre. On peut analyser dans ces décisions contradictoires les tensions internes au parti.

Au pouvoir depuis 1982, Hun Sen est le plus ancien des Premiers ministres du Sud-Est asiatique en poste.

En l’absence de loi définissant les conditions d’élections des sénateurs, à la demande du Sénat, le 28 janvier, le roi Sihamoni prolonge pour la seconde année le mandat de la haute assemblée pour un an. On reproche souvent au Sénat son peu de travail, et de n’être qu’un placard doré pour retraités de la politique.

Les 28-29 janvier, le PPC tient son congrès semestriel avec plus de 600 délégués, dont 137 des 156 membres du Comité central. Huit nouveaux membres sont admis au comité permanent qui en compte désormais 28, dont deux femmes. Le PPC refuse l’amendement constitutionnel proposé par le PSR, permettant au parti ayant obtenu la majorité parlementaire de 50 % de gouverner seul. Le PPC veut ainsi préserver “la stabilité du pays c’est-à-dire son alliance avec le FUNCINPEC. Hun Sen déclarera le 8 février que cette proposition d’amendement est un piège de Sam Rainsy qui veut diviser le gouvernement, en proposant au PPC de gouverner seul.

Levée de l’immunité parlementaire de trois députés de l’opposition

Le 31 janvier, Sam Rainsy est confiant : la levée de l’immunité parlementaire de lui-même et de deux autres membres du PSR, n’est pas à l’ordre du jour de la session parlementaire qui commence le 2 février. Il y voit la conséquence des “pressions internationales”. “Celui qui oserait nous enlever notre immunité verrait sa carrière politique se terminer immédiatement dit-il.

Ranariddh a déposé une plainte en diffamation contre Sam Rainsy qui l’accuse d’avoir reçu 30 millions de dollars pour former un gouvernement avec Hun Sen. (De fait, le président de l’Assemblée a obtenu la restitution d’un petit avion Falcon-20E, saisi en 1997, et un hélicoptère. Certaines sources, généralement bien informées, disent que le magnat de la drogue au Cambodge lui aurait proposé 60 millions de dollars. Fait difficile à prouver, étant donné les précautions prises en cas de telles tractations.). Sam Rainsy porte également plainte contre Ranariddh pour corruption dans la construction du bâtiment de la nouvelle Assemblée nationale. Le PPC aurait également remis des propriétés de l’Etat au FUNCINPEC. Sam Rainsy porte plainte contre Hun Sen pour avoir planifié l’assassinat de sept personnalités cambodgiennes, après l’assassinat de Chéa Vichéa, le 22 janvier 2004. Il porte encore plainte contre Ranariddh qui dit l’avoir vu dans sa voiture, près de l’ambassade de Thaïlande, lors du sac de l’ambassade, le 29 janvier 2003.

Chéa Poch est accusé également de diffamation.

Chéam Channy est accusé d’avoir créé “une armée de l’ombre en fait un comité chargé de faire remonter à la direction du PSR les abus perpétrés à l’intérieur de l’armée, comme lors de la démobilisation. On lui en veut également de s’être opposé à une extorsion par l’armée de lots de pêche à Kompong Chhnang.

Le 3 février, une demi-heure après le début de la session parlementaire, Ranariddh, président de l’Assemblée nationale, convoque les neuf membres du comité permanent de la dite Assemblée pour y ajouter la question à l’ordre du jour : la levée de l’immunité parlementaire des trois députés. C’est un moyen de pouvoir les arrêter immédiatement sans leur laisser la possibilité de s’enfuir. Par 97 voix sur 104, l’immunité de Sam Rainsy et de Chéam Channy est levée, celle de Chéa Poch par 98 sur 103. Chéam Channy est arrêté sur le champ et conduit à la prison militaire. Sam Rainsy et Chéa Poch se réfugient à l’ambassade des Etats-Unis, d’où ils sont escortés vers l’aéroport de Pochentong, puis partent, l’un vers la France, l’autre vers les Etats-Unis.

Les ONG cambodgiennes de défense des droits de l’homme sont unanimes : elles voient dans cette levée de l’immunité parlementaire “un complot “une violation grave du droit des élus du PSR, déjà exclus des commissions parlementaires “une menace pour le processus de démocratisation “un coup sévère à la liberté d’expression “votée à huis clos cette levée est parfaitement anti-constitutionnelle”. Plusieurs d’entre elles dénoncent la détention de Chéam Channy, qui est un civil, dans une prison militaire, de plus sans mandat d’arrêt que seuls les juges d’instruction peuvent émettre. La Fédération Internationale pour les droits de l’homme, qui regroupe 141 groupes en 140 pays, fait une déclaration affirmant qu’un civil n’a pas à passer devant un tribunal militaire, sauf “cas exceptionnels 

L’ambassade américaine condamne “fortement” dès le jour même, “un pas en arrière important de la démocratie cambodgienne Le sénateur Mitch McConnell, critique habituel de Hun Sen, demande aux Etats-Unis de prendre des sanctions contre le gouvernement khmer, que les pays donateurs le condamnent ouvertement. Ranariddh accuse les Etats-Unis d’ingérence dans les affaires intérieures du pays, et menace de faire voter l’instauration de la Cour pénale internationale, que le Cambodge s’était refusé de voter en échange d’une promesse d’aide militaire. Le 7 février, Peter Leuprecht, représentant spécial du Secrétaire général de l’ONU pour l’observation des droits de l’homme au Cambodge, dénonce “l’évolution autocratique” du gouvernement. Le 10 février, l’Union européenne demande aux différentes parties de cesser de porter plainte mutuellement les unes contre les autres et demande la restauration de l’immunité parlementaire des trois députés. Elle appelle toutes les parties à travailler dans un esprit de responsabilité et de concorde pour le bien du peuple cambodgien. Même appel de l’Australie.

Pour Sam Rainsy, s’attaquer au PSR n’est qu’un cosmétique pour cacher les dissensions au sein du PPC. Cette levée de l’immunité parlementaire ne fait pas l’unanimité des élus du FUNCINPEC, et certains estiment que c’est “politiquement une grosse perte”. Deux mille Cambodgiens des Etats-Unis signent une pétition demandant à G. Bush d’interdire l’accès aux Etats-Unis aux parlementaires qui ont voté la levée de l’immunité parlementaire des trois députés.

Même si la crédibilité de Sam Rainsy est limitée dans les milieux d’affaires, car il n’offre guère d’alternatives à ses critiques, ces milieux craignent que les Etats-Unis ne se montrent peu enclins à octroyer des réductions de droits de douanes à l’entrée des produits textiles sur leur sol, ne rende plus difficile l’accès du Cambodge aux instances financières internationales que sont la BM, le FMI.

Les députés PSR boycottent l’Assemblée en signe de protestation. Ranariddh, par deux fois, menace de couper leurs indemnités. Ils écrivent au roi. A leur tour, le 21 février, les sept sénateurs PSR boycottent les séances du Sénat.

Le 9 février, Sihanouk émet un jugement : Sam Rainsy a eu “grand tort” d’ordonner à Chéam Channy de mettre sur pied une “armée de l’ombre” ; l’Assemblée nationale “a eu tort d’empêcher les diplomates, les journalistes et autres observateurs accrédités de voir et d’écouter. Ce qui n’est pas transparent devient louche. Si Sam Rainsy a des preuves, qu’il les montre !”. Le lendemain, le roi demande à Hun Sen et à Ranariddh, “en bons bouddhistes et en hommes d’Etat très sages d’accorder leur pardon à ceux qui ont mal agi à leur égard. Il demande à son fils, le roi Sihamoni, en tant que chef suprême des armées, d’amnistier Chéam Channy. De nombreux hommes politiques acceptent cette proposition avec soulagement, mais la cour militaire affirme qu’elle ne libérera Chéam Channy qu’après enquête.

Sam Rainsy, de Washington, se défend d’avoir donné ordre de créer une armée de l’ombre. Comme “dans la plupart des démocraties parlementaires il a simplement créé un “cabinet fantôme”, dans lequel Chéam Channy était “ministre de la Défense”. Il travaillait en toute légalité et en plein jour pour lui faire remonter les abus commis au sein de l’armée (corruption dans le cadre de la démobilisation, entre autres), et “formuler des propositions constructives”.

Devant l’avalanche de critiques venant de l’étranger, Hun Sen et Ranariddh disent ne rien pouvoir faire, que ces affaires de plaintes sont dans les mains de la justice : la cour avait demandé cette suspension de l’immunité des trois députés. Quant au pardon, il ne peut être accordé avant que les tribunaux n’aient jugé ces individus comme coupables.

Le 14 février, les 87 députés présents adoptent une modification du règlement intérieur stipulant que chaque orateur devra désormais parler au nombre de 13 autres, et verra son temps de parole limité à 20 minutes, avec 10 minutes supplémentaires si le sujet est important. Si certains voient en cette modification un moyen de forcer les députés à travailler ensemble plus efficacement, d’autres y voient un moyen supplémentaire pour museler l’opposition qui, avec 24 députés, n’a plus qu’un seul temps de parole.

En relation avec les critiques des Etats-Unis, le 8 février, un député du PPC et un autre du FUNCINPEC, rappellent l’épandage d’agent orange en avril 1969 sur l’Est du Cambodge, ainsi que les bombardements du Cambodge. Ils demandent des compensations financières. Un comité est mis sur pied pour étudier les effets et calculer d’éventuelles demandes de compensations.

Montagnards

Au début du mois de janvier, le dispositif de surveillance des frontières avec le Vietnam, dans la province de Ratanakiri, est renforcé : entre 30 et 40 policiers retraités sont réintégrés, en modifiant leur date de naissance. Trois cents policiers et six garde-frontières sont recrutés pour sceller la frontière.

Le 9 janvier, une famille de quatre Montagnards tente de contacter le bureau de l’UNHCR à Phnom Penh. Elle en est empêchée par la police qui la place en résidence surveillée dans une guest house pendant plusieurs nuits, puis la reconduit au Vietnam, “avec son accord disent les autorités de Phnom Penh. La femme en pleurs prouve l’inverse. Les ONG de défense des droits de l’homme s’insurgent contre cette expulsion qui viole la convention signée par le Cambodge. On sait qu’au Vietnam, sept Montagnards sont condamnés par les autorités vietnamiennes, dont Ksor Krok, arrêté à Ratanakiri en juillet dernier, qui écope de sept ans.

Le 18 janvier, Hok Lundy, chef de la police nationale, affirme que les réfugiés montagnards qui refusent de partir à l’étranger seront reconduits au Vietnam.

Le 25 janvier, un protocole est signé entre le HCR, le Vietnam et le Cambodge pour réinstaller ou rapatrier les quelque 700 Montagnards réfugiés au Cambodge. Le HCR demande le droit de visite sur les hauts plateaux vietnamiens.

Le 28 janvier, l’équipe du HCR parvient à localiser 15 Montagnards, dont trois enfants de moins de trois ans, cachés dans la forêt. Trois jours plus tard, elle en localise 26 autres. Le 1er février, les villageois leur indiquent la cache de six autres, mais les autorités provinciales, mises au courant par le HCR, les expulsent immédiatement, à la barbe du HCR, qui ne peut protester de violations de la convention signée trois jours plus tôt.

Le 26 janvier, quatre Montagnards s’envolent pour les Etats-Unis, 39 autres partiront à la fin février, 11 devraient partir au Canada en avril. Deux cent trente-six ont accepté d’émigrer, 217 ont refusé, 140 ont vu leur demande de statut de réfugié refusée. Selon le HCR, la communauté internationale devrait faire pression sur les autorités vietnamiennes pour que la réforme foncière menée au Vietnam ne soit pas discriminatoire pour les minorités ethniques. Une présence internationale, dont celle du HCR sur les hauts plateaux vietnamiens, serait le seul moyen de réduire le flot des réfugiés.

Le gouvernement vietnamien semble prendre la mesure du mécontentement des Montagnards. Juste avant le nouvel an sino-vietnamien (9 février), le Premier ministre donne des directives pour interdire “toute tentative visant à forcer la population à suivre une religion ou à nier la sienne Même si ces directives ne semblent pas encore passées dans les faits, elles sont interprétées comme une tentative pour diminuer la tension sur les Hauts Plateaux.

Procès des ex-responsables Khmers rouges

Le camarade Duch, de son vrai nom Kaing Khek Lev, l’ex-directeur de l’infâme prison de Toul Sleng, âgé de 63 ans, a été opéré de la prostate, à l’hôpital Calmette.

“Qui juger ? s’interroge Sihanouk. Beaucoup d’ex-responsables Khmers rouges “ont été intégrés dans l’armée et l’administration, avec de hauts grades et des avantages D’autre part, “ces dernières années, le petit peuple a à se plaindre des spoliations de terrains, de divers méfaits de sociétés, de compagnies, des riches, des puissants. Aucun ne m’a dit qu’il fallait punir les anciens responsables Khmers rouges Il qualifie le futur jugement de “comédie et d’hypocrisie visant à “aider les juges à vivre dans le luxe pendant trois ans Selon le roi, un jugement rendu avec justice, devrait “condamner et punir des centaines, voire des milliers de tortionnaires et de tueurs L’arrestation de responsables Khmers rouges pourrait être la goutte d’eau qui ferait déborder le vase du mécontentement populaire. Il approuve l’analyse de Peter Leuprecht, selon laquelle des “desperados n’ayant plus rien à perdre, pourraient devenir des maquisards.

Le 9 février, le Japon annonce qu’il versera en mars la somme de 21,5 millions de dollars pour la tenue du tribunal devant juger les ex-responsables Khmers rouges. Le 27 janvier, la Grande-Bretagne avait annoncé une contribution de près d’un million de dollars, qui en plus de celle de la France et de l’Australie, porte les contributions étrangères à 26,7 millions, sur les 56 prévus. Cependant, Kofi Annan n’entreprendra rien avant que des engagements précis ne soient pris pour couvrir la totalité des frais. La Chine continue d’opposer son veto à la tenue de ce tribunal.

Le 16 février, la Cour suprême confirme la peine de prison à perpétuité pour Chouk Rin, ex-responsable Khmer rouge impliqué dans le massacre de trois jeunes Européens en 1994. Depuis, atteint du sida, de la tuberculose et d’une hépatite C, il est retourné dans la forêt pour y mourir, protégé par les siens. Aux militaires d’aller le chercher ! Ce cas particulier permet d’imaginer les résultats négatifs d’un procès des ex-responsables Khmers rouges. Paix ou justice, que privilégier ?

Frontières

Le Laos et le Cambodge ont démarqué 83 % de leur 540 km de frontières communes.

ECONOMIE

Selon les statistiques officielles, le PNB serait passé de 3,4 à 5,2 milliards en 2004, le PIB de 317 à 416 dollars par habitant.

Le 31 décembre, le budget 2005 est adopté sans réelle discussion, avec un manque total de transparence, regrette l’ONG locale Comfrel, bonne observatrice du fonctionnement des institutions. Les observateurs n’ont pu assister aux discussions préliminaires, la sécheresse, l’agriculture et la décentralisation n’ont pas été abordées en séance.

Agriculture

Le 9 janvier, Hun Sen déclare que son gouvernement sera “celui de l’irrigation”. Les infrastructures existantes ne couvrent que 20 % des deux millions d’hectares de surfaces cultivables. “Notre projet est d’irriguer 20 000 à 30 000 hectares par an dit-il. Une enveloppe de neuf millions de dollars, à laquelle s’ajoute un prêt de 18 millions accordé par la BAD (Banque asiatique pour le développement), est réservée pour le développement de l’irrigation dans quatre provinces : Battambang, Bantéay Méanchey, Siemréap et Pursat. Ailleurs des projets sont lancés. Généralement, on améliore les remarquables structures d’irrigation réalisées du temps des Khmers rouges, en approfondissant les canaux ou en rénovant les retenues d’eau laissées à l’abandon.

Onze des vingt-quatre provinces font face à une pénurie de riz. Il manquerait 330 000 tonnes pour faire face aux besoins. Les réserves nationales s’élèveraient à 296 843 tonnes. Le riz cultivé au Cambodge serait suffisant pour nourrir toute la population, mais une partie part en contrebande en Thaïlande (1 280 tonnes par jour dans les provinces de Battambang et Bantéay Méan Chhey), et au Vietnam (350 tonnes dans les provinces de Takéo et de Svay Rieng.

Bois

Le 25 février, la société suisse SGS (Société Générale de Surveillance), qui a été choisie par le gouvernement pour remplacer Global Witness, trop critique à son égard, donne son rapport sur le dernier trimestre de 2004, rapport jugé “sibyllin” : “Un niveau élevé de crimes forestiers de faible intensité et un niveau bas d’activités dans certaines zones.” “Nous n’avons pas vu le gouvernement agir réellement contre les coupes illégales de bois dit le coordinateur de la Fédération mondiale luthérienne (LWF), qui estime que la SGS ne fait que dire ce que veut le gouvernement. Depuis le 24 janvier, plusieurs sociétés transportent 3 507 m3 de bois coupés en principe avant le moratoire de 2001. Dans un rapport en date du 10 février, Global Witness estime que “la Banque mondiale facilite le transport de coupes de bois illégales la SGS confirmant les volumes de bois transportés, mais ne vérifiant ni les origines, ni la date de la coupe des grumes.

Le 10 février, le CHRAC, groupement de dix-huit ONG cambodgiennes de défense des droits de l’homme, demande à la BM de suspendre toutes les concessions foncières “illégales”. Phéapimex et Wuzhishan sont particulièrement visées. Déjà Peter Leuprecht estimait que le système des concessions “ne contribue pas à la réduction de la pauvreté, mais continue à permettre le pillage des ressources naturelles Le comité demande à la BM de réexaminer ses engagements. La BM s’engage à revoir sa politique, notamment l’usage fait des 5,4 millions de dollars accordés il y a quelques années pour aider les sociétés forestières à préparer des projets d’exploitation durable des forêts.

Le ministère de l’Environnement porte plainte contre la société Asia Pulp Paper (APP) qui déboise illégalement le parc de Botum Sakor, dans la région de Koh Kor depuis mars 2004. La société a reçu l’autorisation gouvernementale de déboiser 18 000 hectares (soit 8 000 de plus que l’y autorise la loi) et en demande 300 000 autres (30 fois la limite légale) pour y planter des acacias, dont on connaît l’effet dévastateur sur les sols et la végétation. Le gouvernement demande une compensation d’un million de dollars.

330 000 hectares de forêts et de rizières ont été accordés en concession à la société Phéapimex, très proche de Hun Sen (alors que la loi interdit d’accorder une concession de plus de 10 000 hectares), pour y planter des acacias. Les paysans s’opposent par tous les moyens, souvent dérisoires qui sont les leurs : menaces verbales, bénédiction des arbres par les bonzes, appels à la protection par les esprits. “Les autorités ont définitivement pris le parti de la société contre nous disent les paysans.

Le 3 février, l’avocat de Sam Rainsy porte plainte contre le Premier ministre et le ministre de l’Agriculture et le patron de Phéapimex pour corruption, pour avoir attribué une concession en violation de la loi. Les policiers gardent le chantier, intimident les manifestants, font de la propagande pour Phéapimex. Les paysans abandonnés de tous, sont découragés, la faim les tenaille. La SGS n’a pas trouvé de preuve que la société abat des arbres !

Tourisme

Le Cambodge a atteint son million de touristes en 2004. Cependant les recettes de l’Etat ont diminué de 300 000 dollars ! Selon une commission parlementaire, le fait serait à mettre en rapport avec la corruption et la concurrence des pays voisins. Selon Sam Rainsy, les ambassades garderaient l’argent des visas, des fonctionnaires détourneraient les taxes d’aéroport, les droits d’entrée à Angkor passeraient en partie dans des caisses privées. Selon Hun Sen, “Un million de touristes donne du travail à 2,5 millions de Cambodgiens. même les éléphants ont du travail”.

Avec un visa régional unique pour six pays (Chine, Laos, Thaïlande, Birmanie, Cambodge, Vietnam), le Cambodge attend six millions de touristes par an.

Textile

En 2004, le textile représentait un chiffre d’affaires de 1,95 milliards de dollars (24 % de plus qu’en 2003), et 80 % des exportations, 12 % du PNB (à égalité avec le tourisme). L’industrie textile cambodgienne ne représente que 0,74 % de la production mondiale (en 2003). La branche emploie 270 000 ouvriers, soit 10,5 % des actifs, dont 84 % de femmes. Le salaire minimum est de 45 dollars, le salaire moyen de 70 en raison des heures supplémentaires. La durée légale est de 48 heures hebdomadaires, à laquelle il faut ajouter deux heures supplémentaires possibles (ou obligatoires) par jour. La plupart des ouvriers envoient entre 30 et 50 % de leur salaire à leur famille chaque mois. La plupart des 230 usines appartiennent à des sociétés étrangères : 30 % de Hongkong, 22 % de Taiwan, 11,7 % de Chine, 7,1 % sont cambodgiennes, 5 % sont américaines, 3 % sont britanniques.

Selon la plupart des observateurs, avec l’entrée du Cambodge dans l’OMC, les petits usines ferment, se regroupent ou sont rachetées (30 % ont moins de 500 ouvriers, soit 6 % du total de la main d’ouvre). Une vingtaine ont fermé au cours des quatre derniers mois de 2004. Les grosses usines devraient se consolider.

Selon la BAD, et contrairement aux idées reçues, la main d’ouvre cambodgienne est l’une des moins chères au monde (23 cents de l’heure). Les salaires pèsent peu sur les coûts de production. Par exemple, le coût d’un jean Denim (6,80 dollars), se répartit en : matière première 65 %, main d’ouvre 15 %, dépenses diverses 18 %, profit 2 %. C’est donc sur l’importation de la matière première, l’électricité (15 cents au Cambodge, contre 6 cents ailleurs), le transport, les prélèvements informels (= corruption 7 %), qu’il convient d’agir pour que le pays soit compétitif.

La baisse de 20 % des frais de douanes à l’import et à l’export est saluée comme une mesure allant dans le bon sens. Selon le patron des patrons, “Le Cambodge ne semble pas prêt à investir dans la production des matières premières (tissage, filage). Ces investissements s’élèveraient entre 20 et 30 millions, alors que ceux pratiqués généralement au Cambodge ne sont que de l’ordre de 1 à 2 millions”. Des mesures simples, comme la levée de la TVA pour des usines d’accessoires (boutons) travaillant sur place et vendant à des usines locales, diminueraient également les coûts. “Nous sommes actuellement 15 à 25 % plus chers que la Chine.” Il fait du lobbying pour que les Etats-Unis baissent leurs droits de douanes, actuellement compris entre 17 et 33 %, comme ils le font pour 34 pays d’Afrique.

Le 13 janvier, les Etats-Unis annoncent que le Cambodge bénéficiera de 4 % de bonus supplémentaire sur ses quotas d’exportations de 2004, en récompense de ses “efforts et accomplissements pour faire respecter le droit du travail dans le secteur de la confection Ce bonus vient s’ajouter aux 14 % d’exportations supplémentaires déjà octroyées pour 2004. Ainsi le Cambodge a reçu le quota maximum de 18 %. Il s’appliquera de manière rétroactive sur les commandes passées en 2004. Sur les motifs de satisfaction, on note l’adoption d’une législation sur les zones industrielles et l’engagement du gouvernement de financer l’OIT (Organisation internationale du travail), dans sa mission d’observation après le dégagement des Etats-Unis.

L’AFD (Agence française de développement) consacre 1,5 millions d’euros pour soutenir l’industrie textile, en collaboration avec la BM (Banque mondiale), le GMAC (syndicat des patrons) et l’OIT. Le 12 janvier, le ministère des Affaires féminines a octroyé 100 000 dollars, don de la BAD, à l’OIT (Organisation internationale du travail), au GMAC (Groupement patronal des usines textiles), et à l’ONG PADEK (Organe européen de développement) pour leurs services de formation des ouvriers du textile.

Le 9 février, la société américaine Gap, qui achète à elle seule 30 % des produits textiles cambodgiens, signe un accord pour la formation de 650 contremaîtres et techniciens étrangers et autres catégories de personnel khmer, dans sept usines, dans un programme d’un an, financé à hauteur de 80 000 dollars. L’objectif visé est d’obtenir une meilleure productivité, avec moins de fatigue.

Taxes et droits de douanes

En principe, depuis le 1er février, les taxes devraient être payées par chèques, ce qui évitera (peut-être) l’évaporation fiscale par la circulation d’argent liquide.

En dépit des ordres et des menaces du Premier ministre, les postes de contrôle refont surface pour extorquer de l’argent aux véhicules.

Depuis les directives du 13 janvier, le ministère a recueilli 10 millions de dollars en taxes sur les véhicules de luxe, 70 véhicules ont été saisis, d’autres propriétaires ont dû payer 340 000 dollars en taxes et amendes. Selon les autorités 4 000 véhicules rouleraient encore sans avoir acquitté leurs taxes.

Commerce

Le Vietnam est en train d’augmenter ses parts dans les importations cambodgiennes : les produits sont moins chers, de bonne qualité, et le transport moins coûteux que ceux venant de Thaïlande. Le géant Sokimex (très proche du pouvoir cambodgien) lance trois sociétés mixtes avec des sociétés vietnamiennes : Saigon Tourism, Saigon Investment Joint Stock (pour construire un hôpital à Phnom Penh), Saigon Trading Corp (pour lancer deux usines au Cambodge). La société Mong Rethy signe un accord avec le groupe vietnamien Sovinco pour la construction d’une autoroute entre Phnom Penh et Pochentong. “Le Cambodge et le Vietnam sont comme deux frères, nous avons besoin l’un de l’autre dit Mong Rethy.

Le 22 février, lors de la septième réunion intergouvernementale Cambodge-Vietnam, vingt-deux mémorandums ou protocoles d’accord sont signés entre les deux pays. On remarque une attention spéciale pour la région de Ratanakiri : construction par le Vietnam de la route nationale 78 reliant la capitale provinciale de Banlung à la frontière (un prêt de 24 millions de dollars est signé), construction d’un marché à O Yadav, d’un centre de formation professionnelle à Banlung, étude pour un projet de barrage hydro-électrique sur la Sésan. Création de deux zones industrielles à la frontière de Bavet, formation de 250 officiers cambodgiens au Vietnam, liaisons aériennes entre Hanoi et Siemréap, Ho Chi Minh-Ville – Siemréap, lutte contre le trafic humain, etc.

AIDES ET INVESTISSEMENT

En 2004, la Chine est devenue le premier pays investisseur au Cambodge, avec 34 projets, totalisant 80,4 millions de dollars (sur un total de 216,9). La Malaisie suit avec 23,2 millions, puis Taiwan avec 13,7. On salue cet accroissement comme “une nouvelle ère dans l’histoire du développement du Cambodge. la Chine soutient tant politiquement qu’économiquement le pays”. La Chine investit dans la confection textile, la fabrication de chaussures, le tabac, le tourisme, l’hydro-électrique et l’agriculture.

En revanche, les investissements thaïlandais baissent de six à un million, les investissements domestiques s’établissent à 75 millions, soit près de 60 % en moins par rapport à 2003, à cause de la crise politique. Les échanges commerciaux avec la Thaïlande s’élèvent à 752 millions de dollars, avec un excédent de 725 millions pour la Thaïlande, mais n’ont crû que de 5,8 % en 2004, concurrencés par les produits vietnamiens et chinois.

Le 6 janvier, la Chine accorde un prêt (ou un don, on ne sait) de 49 millions de dollars pour reconstruire le bâtiment de huit étages du Conseil des ministres, sur son emplacement actuel. La construction sera achevée en 2008.

Plus d’un millier de familles de Snuol (province de Kratié) sont raccordées au système électrique vietnamien, fruit d’une collaboration entre les deux provinces frontalières, pour un coût de 200 000 dollars. Les familles payeront leur électricité 650 riels au lieu de 2 500 actuellement.

Le 8 janvier, le Premier ministre Hun Sen reproche à la communauté internationale d’accorder beaucoup d’aide aux 280 000 victimes du tsunami, qui ne représentent que moins de 10 % des pertes et des morts durant le régime Khmer rouge.

Les travaux de reconstruction des 157 km de la route Poïpet-Siemréap (la route de Poïpet-Sisophon a déjà été refaite plusieurs fois par une société thaïlandaise !) commenceront en juin. Ils coûteront 70 millions de dollars, financés par un prêt de 50 millions de la BAD, un investissement de 18 millions du gouvernement, et un don de sept à huit millions par l’APEC. “C’est un axe stratégique pour le tourisme et l’économie en général explique le secrétaire général au tourisme.

Hongkong Investment and Development, société mixte khméro-chinoise, projette d’investir 80 millions de dollars dans la province de Battambang sur dix à quinze ans. La première tranche est la construction d’une décortiquerie de riz pour huit millions, en vue de l’exportation. La société apportera également son expertise pour le développement du cheptel, des fruits et légumes.

Le 18 janvier, le Japon accorde une aide de 5 millions de dollars pour un programme de consolidation de la paix et la gestion des armes légères, ainsi qu’à la préparation du projet de réhabilitation du système d’irrigation de Kandal Stoeung.

Le 26 janvier, l’UE accorde 1,375 millions de dollars pour le programme de réduction des armes légères ou leur gestion dans des conditions sûres.

La Société financière Internationale (institution de la BM) et la Proparco (organisme de l’AFD – Agence française de développement) prêtent 20 millions de dollars à la Société concessionnaire de l’aéroport (SCA) pour une amélioration des pistes de Pochentong et de Siemréap.

L’entreprise cambodgienne Chhay Chhay Investment passe un bail de trente ans avec le gouvernement pour la création d’une ville nouvelle au sud de la ville de Poïpet, pour un investissement d’environ 70 millions de dollars, sur 500 hectares, à 4 km de la frontière thaïlandaise. Cette nouvelle ville sera dotée d’un port sec, d’un aéroport, d’une zone franche industrielle de 386 hectares, pouvant accueillir jusqu’à 180 usines. De nombreuses sociétés thaïlandaises sont intéressées, car elles pourront ainsi bénéficier des exemptions de droits de douanes avec l’Union européenne.

Le 15 février, l’Allemagne accorde un don de 9,5 millions de dollars pour la réfection des routes en zone rurales. Depuis 1996, l’Allemagne a ainsi rénové 1 400 km de pistes. Le ministère des Finances s’engage à verser trois millions pour la réparation de ces pistes.

Le 10 février, quatre sociétés cambodgiennes reçoivent la “récompense citoyenne” du directeur de la BM : New Island Clothing, l’hôtel Cambodiana, la fabrique de vin de palme Confirel et Hagar Soja. Les deux premières sociétés se distinguent par le bon respect des lois sociales et les secondes par leur engagement dans le développement des produits locaux.

Corruption et développement

“Corruption, corruption, corruption sont les trois principaux obstacles à la compétitivité du royaume dans le combat contre les géants du textile, déclare le président de la BM de passage à Phnom Penh, les 10 et 11 février. 80 % des hommes d’affaires affirment avoir dû payer des pots de vin. Hun Sen annonce une série de mesures jugées impressionnantes, sur le papier du moins. Réaliste, la BM annonce qu’elle accordera un don de 10 millions de dollars pour aider le gouvernement à lutter contre la corruption, mais ce don dépendra des progrès des réformes accomplies dans les soixante jours.

La BM a d’autre part, réclamé et obtenu que le gouvernement lui restitue, le 21 janvier, 2,7 millions de dollars détournés lors de la première opération de démobilisation, commencée en juin 2003. Dans une lettre du 11 janvier, la BM avait menacé de suspendre le déboursement de 330 millions de dollars pour l’ensemble de ses opérations au Cambodge. Le 23 janvier, Hun Sen crie à l’injustice, car c’est la BM qui a choisi les sociétés corrompues (dont la française Thales). Il exclut désormais la BM du programme de démobilisation. De même, le PAM réclame le reversement de compensations pour 4 000 tonnes de riz détournées l’an passé.

La BM finance actuellement quinze projets, allant de l’électrification à la biodiversité, et s’est engagée pour une aide de 45 millions de dollars lors du groupe consultatif de décembre.

SOCIETE

Le 20 janvier, un nouveau syndicat est créé, après plusieurs mois de négociations avec le ministère de l’Intérieur : l’Association indépendante des cadres et fonctionnaires du Cambodge (AICF). Il lui a fallu le soutien de plusieurs députés et de Peter Leuprecht pour voir le jour. Ce syndicat est proche de l’AIEC (Association indépendante des enseignants du Cambodge). Il réclame que le salaire mensuel des fonctionnaires soit porté à 100 dollars et que soit réduite la différence de traitement des différentes catégories de fonctionnaires. Il ne comprend qu’une vingtaine de membres.

Par décret du 14 janvier, les fonctionnaires voient leur salaire augmenter de 15 %, soit environ 2 dollars par mois.

214 officiers ont été promus au rang de général à une, deux ou trois étoiles et plusieurs centaines d’autres au rang de colonel. 40 000 soldats (dont un certain nombre de “fantômes” devraient être démobilisés durant les cinq prochaines années. Un général à une ou deux étoiles gagne environ 225 dollars, un général trois étoiles environ 425.

Mouvements sociaux

Le 3 janvier, environ 200 taxis manifestent contre l’entrée en vigueur des péages sur la route nationale 4 reliant Phnom Penh à Sihanoukville. Ils sont dispersés par près de 200 policiers équipés de bâtons électriques et d’armes à feu. Un chauffeur est gravement blessé, deux sont arrêtés. Cette route a été construite au début des années 1960, puis reconstruite après 1990 par l’aide américaine. Un contrat d’exploitation en a été accordé, dans des conditions opaques, à la société AZ, qui appartient à Ing Bun Haw, député du PPC. Aucun appel d’offres n’a été lancé. La société devrait reverser 20 % de ses recettes et la TVA à l’Etat, et assurer l’entretien de la route.

Plusieurs routes, dans la région de Phnom Kulen (Siemréap), de Boeung Méaléa, de Koh Ker, sont ainsi affermées à des proches du pouvoir.

Le 12 janvier, une délégation de grévistes (choisie par le gouvernement !) rencontre Sok An, ministre du Conseil des ministres et ministre des Transports. Le ministre demande des tarifs préférentiels pour les fonctionnaires et policiers, autorise les chauffeurs de taxis à mettre une personne de plus sur chacune des banquettes de leur véhicule. Les taxis seront désormais exempts de l’inspection mensuelle de leur véhicule.

280 vendeurs du marché de Sérey Sophorn (province de Bantéay Méan Chhey) protestent contre les autorités locales qui veulent les faire déménager, alors qu’ils ont passé un contrat de location pour vingt ans en 1998.

En dépit du satisfecit américain, les mouvements sociaux sont toujours nombreux dans le secteur du textile. Un syndicaliste pose la question au président de la BM en visite au Cambodge les 10 et 11 février : “Comment le Cambodge peut-il avoir une bonne réputation pour les règles de travail, alors que les autorités brisent les droits des syndicats et que les responsables des syndicats sont assassinés ?” La confédération des syndicats libres, pour sa part, dans une lettre au BIT, estime que l’intimidation des syndicats s’est intensifiée durant les derniers mois.

Le 3 janvier, les 600 ouvriers de l’usine de confection Bu Min Cambodia entrent en grève, en dépit des menaces verbales, des coups de bâtons, et des coups de feu. Ils manifestent à l’annonce du licenciement de 200 d’entre eux le 28 février prochain.

Le 8 février, le patron coréen de l’usine de confection Hang Fung Shing, parti en secret à Hongkong, annonce sa décision de ne pas rentrer au Cambodge. L’usine employait 8 000 ouvriers et a fermé ses portes en novembre et en décembre, faute de commandes de la part de Gap, son client. En janvier, 5 000 d’entre eux sont réembauchés temporairement. Ils acceptent de ne recevoir que 50 % de leur salaire pour les deux mois de chômage. Mais le 15 février, toujours rien. La police tire des coups de feu en l’air pour disperser les 1 000 manifestants. Le gouvernement, qui avait déjà prêté 870 000 dollars à l’entreprise en octobre pour la remettre à flot, accepte de payer 80 dollars aux ouvriers qui ont travaillé en janvier, 40 dollars aux autres, soit 390 000 dollars au total. Selon l’OIT, en février 2004, l’usine n’avait rempli que 16 de ses 44 recommandations. Le 22 février, des forces de police lourdement armées, interdisent toute manifestation des employés qui réclament 300 dollars de prime de licenciement. Plusieurs manifestants sont blessés, trois autres arrêtés, puis relâchés.

Le 10 février, un syndicaliste de l’usine Fortune Garment est condamné par la cour de Kandal à quatorze mois de prison avec sursis pour incitation à la violence. La plupart des autres syndicats voient en ce verdict une tentative d’intimidation des délégués syndicaux. “C’est un réel déni de justice déclare le représentant de l’ACIL (syndicat américain).

Selon Chéa Moni, secrétaire général du SIORC, presque toutes les entreprises forcent leurs employés à faire des heures supplémentaires (34 entreprises selon le rapport de l’OIT de décembre dernier). Cependant, selon le syndicaliste, sur 230 usines, une quarantaine offrent un environnement social correct. L’usine New Island Clothing Cambodia, fabriquant exclusif pour Marks & Spencer, est l’usine modèle présentée par le BIT : 44 heures rétribuées 48, revenu moyen de 95 dollars, avec primes pour enfants, budget déjeuner, prime à la productivité, vingt-cinq jours de congés annuels. La main d’ouvre représente 30 % du coût de fabrication (contre 15-20 % ailleurs). “Economiquement, il est finalement moins coûteux de bien traiter ses employés : une armée marche sur son estomac, dit le patron. Les ouvrières travaillent mieux parce que nous les traitons avec plus d’égards.”

Spoliations de terres

La société Phéapimex exploite 318 000 hectares de forêts de rizières dans les provinces de Pursat et de Kompong Chhnang, au détriment des paysans.

La société Wizhishan, filiale de la Phéapimex, exerce des pressions sur les Montagnards de Mondolkiri pour qu’ils quittent leurs terres. Elle s’empare progressivement de toutes les collines non boisées de Mondolkiri, là où les villageois font paître leurs troupeaux. Cette société a un capital de 5 000 dollars, mais couvre curieusement un très grand volet d’activités. Elle n’est jamais passée au ministère pour signer quelque contrat que ce soit.

Le 18 janvier, près de Poïpet, la police expulse 105 familles vivant autour d’un étang de 4 hectares. Cinq femmes sont blessées. Un verdict de justice accorde ce terrain à un colonel.

Le 5 février, en dépit des ordres gouvernementaux, les bulldozers de l’armée rasent une quarantaine de maisons de Phsar Prohm, près de Païlin. Ces maisons sont installées sur des terres appartenant aux gardes du corps d’Y Chean, ancien chef Khmer rouge, gouverneur de Païlin. Vingt-huit familles se sont vues attribuer des terrains 2 km plus loin, douze autres n’ont aucune solution. Cent vingt et une familles attendent dans l’angoisse. ADHOC s’insurge.

Le gouverneur de Kratié interdit aux paysans de manifester contre la déforestation de leurs terres, car ils n’ont pas le droit d’agir en tant que communautés protectrices de la forêt. Deux cents hectares de la réserve de la vie sauvage de Snuol sont déjà rasés. Le 16 février, on apprend que deux militaires tirent à l’arme automatique sur des gens pour leur prendre leurs terres. “C’est un autre exemple de la barbarie militaire couplée avec l’anarchie qui règne ici commente l’observateur de ADHOC.

Le 5 février, le gouverneur de Sihanoukville donne dix jours et huit guest houses aux 131 familles installées sur 12 hectares, que Kong Triv, patron de le KT Pacific Co ltd, affirme posséder. Dix familles acceptent 75 dollars de compensation pour se déplacer. Hun San, frère de Hun Sen, est actionnaire d’une guest house, et intervient auprès de son frère. Le 15 février, en dépit d’un ordre venu de Hun Sen, une trentaine de policiers, sans doute à la solde de Kong Triv, détruisent les cabanes des résidents, ne laissant debout que les guest houses. Les autorités locales semblent ne pas être au courant. Soixante représentants des 131 familles manifestent à Phnom Penh et demandent 2 500 dollars de dédommagement.

Le 21 février, 700 familles de Kandal Stoeung manifestent devant la résidence du Premier ministre contre le fait que leurs terrains ont été enregistrés sous le nom d’autres personnes.

Le 6 décembre 2004, la municipalité de Phnom Penh décide d’expulser les habitants de l’île de Koh Pich (Ile des diamants), en face du casino Naga, prise entre les deux bras du Bassac, “dans l’utilité publique”. Des militaires patrouillent sans cesse sur l’île pour intimider les paysans, dont certains y vivent depuis 1987. Les deux bacs reliant l’île à la terre ferme disparaissent.

Un projet de construction d’un centre commercial a été proposé au Conseil des ministres le 8 juillet 2003. Le 16 janvier 2004, les travaux sont confiés à la société 7NG, qui inclut Phanimex et Mong Rethy group. L’utilité publique passe après les intérêts des investisseurs auxquels sont réservés les deux tiers du terrain. Les 134 familles de l’île seront relogées sur 45 hectares à Takhmau, où des infrastructures seraient déjà construites. Une centaine de familles ont déjà accepté l’offre. Quatre-vingt familles irréductibles ont reçu l’ordre de quitter les lieux avant la fin février. On leur propose d’acheter leur terrain à 2,5 dollars le m . Or, les experts internationaux estiment le prix du terrain entre 24 et 26 dollars.

Des militaires de Malai (Bantéay Méan Chhey) se saisissent de terres où vivent 280 familles.

Le 24 février, une douzaine de familles qui avaient construit des cabanes près de l’hôtel Intercontinental en sont chassées, et sont transportées à 12 km de la capitale où la municipalité leur donne une parcelle de terre et 20 kg de riz.

Le 12 février, deux cents Montagnards en colère saccagent un poste de police à Ratanakiri. Ils protestent contre la police qui a battu l’un des leurs pour avoir cherché des pierres précieuses dans le champ d’un paysan. Les policiers tirent en l’air et s’enfuient.

Spéculation foncière

La spéculation foncière et l’absence de cadastre sont à l’origine d’un grand nombre d’incidents, surtout dans la région de Phnom Penh.

Le prix des terrains dans la région de Phnom Penh a augmenté de 15 à 20 %, voire doublé entre 2003-2004. Dans la périphérie de la capitale, les prix peuvent s’élever à 100 dollars le m , entre 800 et 1 000 au centre de la ville. Les principaux investisseurs dans l’immobilier sont les Chinois et les Coréens. On comprend mieux la spéculation foncière dans toute son opacité, des groupes financiers ou immobiliers :

Une obscure société, la New Hope Co Ltd, sans bureau, sans adresse, doit assurer la construction du ministère des Relations entre l’Assemblée nationale et le Sénat, et obtient un “don” d’un million de dollars de la part de Hun Sen. Les travaux de construction seraient payés en échange des terrains voisins.

La Phanimex obtient la possession du terrain du commissariat de police de la rue Pasteur (9 000 m ) en échange de la construction de bâtiments neufs et d’un terrain de trois hectares, à 9 km de Phnom Penh. Le montant des travaux s’élèverait à trois millions de dollars.

La Canadia Bank voulait acheter une partie des terrains de l’hôpital Sihanouk, mais l’hôpital refuse.

Le siège de la police militaire a été cédé l’an dernier à une société inconnue.

La Phanimex acquiert le siège de la police municipale.

Le siège de la police municipale du trafic routier a été vendu l’an dernier à une société inconnue.

Le Royal Group Family est en pourparlers avec le ministère de l’Intérieur pour la location de l’hôpital Monivong. Le 22 février, ordre est donné aux 168 familles de squatters de vider les lieux, sous prétexte d’agrandir l’hôpital, mais il semble qu’il s’agisse plutôt de vente. L’ordre d’expulsion est reporté au 30 mars. Le ministère de l’Intérieur offre entre 500 et 1 000 dollars d’indemnités aux familles qui partiront d’elles-mêmes.

Le 27 janvier, le club de l’amicale de la police dont le siège est situé à Borey Keila, refuse de remettre son terrain à la Phanimex, et réclame 700 000 dollars au ministère.

Des rumeurs circulent autour du terrain de 3,17 hectares entourant le théâtre du Bassac qui serait donné en concession au patron du réseau des chaînes de télévision et de Mobitel, en échange de la rénovation du théâtre, dont le coût est estimé à dix millions de dollars.

Selon l’opposition, si ces terrains étaient vendus en toute transparence, ils rapporteraient dix-neuf fois plus à l’Etat. Le 25 février, Ranariddh, président de l’Assemblée nationale, demande à ce que les ministres concernés par ces transactions viennent s’expliquer devant l’Assemblée.

Le gouvernement autorise deux sociétés cambodgiennes, dirigées par des militaires (pour Ke Kim Yan, commandant en chef des FARK), à combler respectivement 32 et 48 hectares sur les 200 du boeung Pon Peay, au nord de Phnom Penh. sans prévoir de réservoirs pour retenues des eaux d’inondation. Les deux sociétés y gagneront entre 20 et 30 millions de dollars. Le boeung Kbal Damrei, également au nord de Phnom Penh, d’une superficie de 100 hectares, est comblé à 60 %, causant la fureur des riverains qui y trouvaient leur nourriture.

Santé

Le Fonds global promet une aide de 36,5 millions de dollars pour cinq ans aux diverses organisations luttant contre le sida au Cambodge. En novembre 2004, 5 500 patients recevaient des anti-rétroviraux. En 2005, 20 000 en auraient besoin, mais les fonds manquent pour la moitié d’entre eux. Selon le ministre de la Santé, les statistiques officielles ont été gonflées depuis plusieurs années.

La tuberculose est en recrudescence au Cambodge : 75 000 nouveaux cas en 2004, 15 000 décès. Mais seulement 59 % des cas ont été détectés et soignés. Le traitement est gratuit, mais beaucoup de malades sont découragés d’aller aux hôpitaux publics. 88 % des tuberculeux vont d’abord dans des cliniques privées, ou achètent des médicaments dans des pharmacies, même si officiellement, elles ont interdiction de vendre ces médicaments. Les dosages sont souvent mauvais, ce qui entraîne des résistances. Le gouvernement japonais a accordé 700 000 dollars en médicaments contre la tuberculose pour les années 2004-2006. On note 116 324 cas de malaria en 2004 qui ont causé 380 décès (132 571 en 2003 et 492 décès).

L’Union européenne s’engage à verser 6,8 millions de dollars sur cinq ans, auxquels s’ajoutent 910 000 dollars versés par l’UNICEF pour la réalisation d’un programme “permettant aux agents de santé du ministère d’améliorer leurs compétences, attitudes et comportements, de former des spécialistes de la communication pour le changement des comportements, et au renforcement des 24 unités provinciales de promotion de la santé”.

Une enquête révèle que le diabète a un taux de prévalence de 5 % à la campagne, et de 11 % en ville. Deux diabétiques sur 3 ignorent leur maladie.

Dix-sept faux médicaments sont vendus au Cambodge. Ils sont supposés être de fabrication thaïlandaise. 50 % des médicaments, dont 10 % de faux, sont importés illégalement de Thaïlande.

Les 400 agents médicaux formés dans les camps de réfugiés en Thaïlande (entre 1975 et 1993), doivent suivre un an de formation au Cambodge pour bénéficier d’un salaire complet. On signale, inévitablement, des phénomènes de corruption.

Un jeune homme de 14 ans et sa sour, âgée de 24 ans, de Kampot meurent de la grippe aviaire, l’un vers la mi-janvier, l’autre le 30 janvier. Plusieurs foyers sont confirmés près de Phnom Penh, mais des mesures draconiennes d’hygiène sont prises. On interdit l’importation de volailles, ainsi que des oufs de canes et de poules en provenance de Thaïlande et du Vietnam. Le département vétérinaire demande des fonds supplémentaires pour lutter contre le virus.

On signale des saisies de drogue de plus en plus nombreuses. Parmi d’autres, l’arrestation d’un Singapourien, le 27 janvier, à l’aéroport de Pochentong, avec 3 kg d’héroïne. Le 25 février, le gouvernement japonais contribue pour 1,2 millions de dollars à un programme de traitement et de réhabilitation des drogués au Cambodge. 3 à 4 % des Cambodgiens consommeraient de la drogue. Le 25 février, l’Assemblée nationale ratifie trois conventions des Nations Unies portant sur la drogue. Ainsi, “le Cambodge pourra prétendre à recevoir une aide technique et financière extérieure estime le responsable du service anti-drogue du pays.

En 2004, on a recensé 326 viols (356 en 2003), la plupart perpétrés par des Cambodgiens. La police a arrêté 43 % des violeurs, de nombreux bébés sont violés. Selon les données officielles, la lutte contre l’exploitation sexuelle progresserait : 563 affaires de mours ont fait l’objet d’enquête en 2004 ; 636 victimes libérées, dont 433 mineures, 401 criminels envoyés devant les tribunaux. Mais la responsable de la lutte contre l’exploitation sexuelle exprime son inquiétude face à l’apparition d’adolescentes en uniforme scolaire dans les grands hôtels.

Le 21 février, Jean-François Mattei, président de la Croix-Rouge française inaugure le centre de consultation de l’hôpital pédiatrique national, ouvert en septembre 2004, pour les enfants atteints du sida. Une vingtaine de consultations y sont données quotidiennement, 150 malades sont suivis. Le même jour, Jean-François Mattéi inaugure le “Centre de l’Espoir à Sihanoukville.

Pour son 50e anniversaire, la Croix Rouge Cambodgienne (CRC que certains malicieux appellent “la croix des Khmers rouges a récolté deux millions de dollars en une seule journée auprès des hauts fonctionnaires. Le 26 février, on apprend qu’elle a loué son ancien emplacement de Phnom Penh à une société singapourienne dont on ignore le nom, pour une somme inconnue “afin d’aider les pauvres” (dirigeants).

Education nationale

Une université publique est construite à Svay Rieng, financée par Hok Lundy, directeur général de la police nationale, par Hun Nen, gouverneur et frère de Hun Sen, ainsi que par des fonctionnaires de la province. Cette université comprendra trois facultés (Agriculture, Commerce, Langues étrangères), subdivisées en douze spécialités. Elle sera ouverte aux deux cents bacheliers annuels de la province, ainsi qu’aux fonctionnaires désireux d’améliorer leur formation. Actuellement, le pays compte 45 000 étudiants, répartis entre le public et le privé, dans 21 universités privées dans les provinces, et 30 à Phnom Penh, ainsi que neuf universités d’Etat, dont une à Prey Veng. La construction de trois universités est prévue à Battambang, Kompong Cham et Siemréap. La qualité de l’enseignement varie beaucoup entre ces diverses universités, ainsi que les coûts d’inscription (entre 80 et 600 dollars). Le ministère de l’Education nationale se montre de plus en plus réticent à accorder des licences d’agrément à des universités dont la qualité des études laisse à désirer.

Le 27 janvier, 196 étudiants de l’Académie royale ont reçu leur diplôme de maîtrise. La Corée du Sud offre un fonds d’un million de dollars pour la création d’un centre de recherche sur l’Asie, pour une période de dix ans.

Justice

La Cour municipale de Phnom Penh rejette la plainte de Sam Rainsy contre Hun Sen, impliquant sa responsabilité dans l’attaque à la grenade du 30 mars 1997, qui avait fait seize morts et plus de 120 blessés.

Le 19 janvier, deux officiers des FARK qui ont torturé à mort un soldat sont acquittés.

Après cinq mois d’attente, due au conflit pour la nomination du bâtonnier, les 74 jeunes diplômés de la 5ème promotion d’avocats a pu prêter serment, le 7 février. Suon Visal, bâtonnier évincé contre toute justice, dénonce cette prestation de serment comme illégale : il faut dix membres du conseil de l’ordre, ils n’étaient que huit. Le royaume compte actuellement 350 avocats et 60 étudiants.

Les deux commissions interministérielles chargées d’enquêter sur le cas des 84 femmes “délivrées ou “séquestrées” par l’Afésip le 8 décembre dernier, établissent un rapport qui va à l’encontre des faits et l’implication de hauts fonctionnaires. Plus prudent, le Premier ministre affirme que l’Afésip n’est pas mise en cause, mais que c’est un problème entre les diverses autorités du royaume. “Ce rapport est très gentil. Ils ont éludé le fond de l’affaire résume Pierre Legros, fondateur de l’Afésip. Le porte-parole du gouvernement demande le changement de la directrice de l’Afésip et qu’un audit soit procédé sur les finances de l’association.

Droits de l’homme

Cinq ONG cambodgiennes portent plainte contre le gouvernement cambodgien devant la CIP (Cour internationale de justice) pour abus de la durée de détention des prévenus : 114 cas de dépassement de durée légale. Plusieurs autres ONG ne se joignent pas à cette plainte qui aurait due être déposée plutôt auprès de Haut Commissariat des Nations Unies pour l’observation des droits de l’homme du Cambodge.

L’ADHOC dresse un sombre tableau de la situation des droits de l’homme au Cambodge : interdiction du droit de réunion (manifestations et grèves), avec utilisation fréquente de menaces et de la force ; menaces répétées à l’encontre de douze responsables syndicaux, assassinats de Chéa Vichéa et de Ros Sovannareth ; 356 cas de litiges fonciers, ayant souvent comme origine l’abus de pouvoir des potentats locaux et des entreprises concessionnaires, telles que Phéapimex et AZ ; refus à l’UNHCR de porter secours aux réfugiés, intimidations de ses agents.

Souvent le Premier ministre s’en prend aux ONG de défense des droits de l’homme qu’il accuse de défendre les malfaiteurs plus que les victimes. Le 22 janvier, pas forcément à tort, Hun Sen s’en prend à une ONG de défense des droits de l’homme qui critique le gouvernement afin de plaire aux Etats-Unis qui lui donnent de l’argent. Tout le monde reconnaît le Center for Human Rights (CCHR). Le 5 février, il s’en prend, sans le nommer, aux ONG (le CCHR) qui organisent des meetings dans les pagodes et interdit aux pagodes d’organiser des rassemblements. Le 8, il accuse les ONG et les médias “d’abuser des libertés qui leur sont accordées pour créer des problèmes dans la société, d’être loués par les pays étrangers pour contrôler le gouvernement ou l’Assemblée nationale”. Le vénérable Tep Vong, patriarche de l’ordre Mohanikay, veut bannir tous les forums dans l’enceinte des pagodes, “lieux non-violents et sacrés Mais la plupart des ONG, et même des moines, ne sont pas d’accord : la pagode n’appartient à aucun parti, c’est le lieu où le peuple peut faire part de ses doléances et des propositions constructives pour la démocratie. Il vaut mieux éviter les débordements que d’interdire purement et simplement les réunions. Pour beaucoup, cette interdiction reflète le manque d’indépendance du patriarche par rapport au pouvoir.

Le 12 janvier, l’Union européenne accorde une aide de 330 000 dollars dans le cadre du programme pour la démocratie et les droits de l’homme. ADHOC (Association de Défense des droits de l’homme au Cambodge) recevra 91 000 dollars, pour un programme de 13 mois ; ONG forum, 62 000 pour soutenir les organisations qui aident les populations à défendre leurs droits fonciers ; Women’s Media Centre of Cambodia en recevra 100 000 pour un programme centré sur l’éducation des populations vulnérables, dont les femmes et les enfants.

DIVERS

290 088 nouveaux électeurs se sont inscrits sur les listes électorales, qui sont ainsi portées à 6 545 486 personnes, dont 46 % d’hommes et 54 % de femmes. 86 602 personnes ont été rayées des listes pour raison de déménagement ou de double nom. Comfrel, association d’observation des élections, note le peu d’information fait auprès des nouveaux électeurs, la trop grande facilité avec laquelle nombre de Vietnamiens ont obtenu leur carte d’électeur.

Le 24 janvier, un météorite de 4,5 kg s’écrase dans un champ près de Bantéay Méan Chhey, s’enfonçant d’un demi mètre en terre, et brûlant les herbes des environs. Cela donne lieu à des cérémonies religieuses. Le météorite est transporté au ministère des Mines à Phnom Penh pour examen. Un collectionneur américain propose 4 500 dollars pour son acquisition. Son prix est estimé entre 1 à 1 000 dollars le gramme.

Le 28 janvier, Ranariddh annonce qu’Hun Sen est d’accord pour construire un nouveau stade olympique pour les jeux du Sud-est asiatique de 2011. Il dénonce de nombreuses imperfections dans la rénovation du Stade olympique construit par Sihanouk en 1964, et qu’il a lui-même confiée, jadis, à la société taïwanaise Yuanta Group, quand il était Premier ministre, pour 3,6 millions de dollars. La société a réalisé des bâtiments commerciaux de rapport autour du stade, mais a peu rénové les installations sportives. Ce nouveau stade sera financé par des fonds privés.

Depuis janvier, la ville de Battambang est jumelée avec celle de Stockton en Californie.

La ville de Phnom Penh est soumise à de nombreuses coupures d’électricité, dues à la surconsommation de la saison chaude, et à la sécheresse qui ne permet pas au barrage hydro-électrique de Kirirom de fonctionner.

Religion

Tsunami : le Cambodge n’a pas été directement touché par le tsunami, la presqu’île malaisienne faisant un solide rempart aux vagues. Sihanouk a contribué à hauteur de 15 000 dollars au secours international pour chaque pays, le gouvernement pour 10 000. Selon Sihanouk, la reine avait été avertie plusieurs semaines auparavant, que selon Indra (le grand Dieu de l’hindouisme), “un tel cataclysme allait atteindre le Cambodge, à moins que des cérémonies appropriées ne soient organisées en un certain nombre d’endroits sacrés. Tenant compte de ces cérémonies, Indra et autres Puissances célestes ont eu la grande bonté d’épargner le Cambodge et son peuple”.

Le 12 janvier est inauguré le plus grand centre bouddhique de diffusion des principes du Bouddha (Thamatout), à une trentaine de kilomètres au sud de Phnom Penh. Il s’étend sur plus d’une centaine d’hectares. Ce centre comprendra un musée, un studio de radio, une école, des logements pour les moines. Les travaux ont commencé en 1996, et sont financés essentiellement par les Khmers de la diaspora de France, des Etats-Unis et du Canada. La moitié des travaux a été réalisée, pour une somme de 1,6 million dollars.