Eglises d'Asie

Au service des sidéens en fin de vie, des franciscains animent un centre de soins palliatifs

Publié le 18/03/2010




Même très malade, il n’est pas facile d’être admis au Centre Sainte Claire, une petite clinique de quatorze lits, spécialisée dans les soins palliatifs au service des sidéens en fin de vie. Face au nombre de sidéens dans l’ensemble du pays, les vingt-neuf institutions catholiques au service de ces patients représentent peu de chose. Le franciscain responsable du centre l’admet volontiers : “Notre travail n’est qu’une goutte d’eau dans l’océan” (1Mais, avec ses quatorze lits, où les patients sont admis gratuitement, l’activité du centre ne s’arrête jamais. Depuis son ouverture, en 1993, six cents personnes, hommes et femmes, jeunes et vieux, riches et pauvres, sont passées par là.

Depuis deux ans, c’est le Frère Paulo Borges, missionnaire franciscain d’origine brésilienne, qui dirige le centre, installé à une trentaine de kilomètres à l’est de Bangkok, à l’intérieur d’un centre de retraite franciscain. Les patients sont installés dans neuf petits pavillons, bâtis un peu à l’écart du centre de retraite, au calme, dans un jardin parsemé de petits étangs et de fleurs.

Pour Frère Borges, sa mission ne se limite pas à servir les malades en fin de vie. Il veut aussi aider les parents et les proches de ces malades, paniqués face à la maladie et qui ne pensent souvent qu’à se séparer le plus vite possible des sidéens en fin de vie. Le Frère voudrait aider la société thaïlandaise à mieux entourer ses malades pour qu’ils puissent vivre leurs derniers jours en famille, au milieu des leurs. En dépit des campagnes d’information lancées par le gouvernement, les gens n’ont encore qu’une compréhension limitée de la nature de cette maladie et de la manière dont le virus du sida se transmet, estime Frère Borges.

Le premier cas officiellement déclaré de sida en Thaïlande remonte à 1984. Depuis, le virus s’est diffusé et certaines estimations font état d’un million de porteurs du virus dans le pays, sur une population de 63 millions d’habitants. D’après Frère Borges, beaucoup de Thaïlandais pensent que la maladie peut être soignée et qu’une fois traitée, un malade peut reprendre une vie normale. Ils ne comprennent pas que l’immunodéficience est irréversible et que, si les traitements actuels peuvent contenir la maladie, le virus n’est pas éliminé pour autant et l’issue pour un très grand nombre de personnes contaminées est fatale.

Dans le Centre Sainte Claire, ce sont les malades en fin de vie qui sont accueillis. Pour eux, la mort est certaine, à plus ou moins brève échéance. Sour Angela San Jose, de la congrégation des Filles de la Charité, et les infirmières vont de chambre en chambre pour distribuer les médicaments et aider les plus faibles à manger. Tous les mois, le gouvernement accorde une subvention de 43 000 bahts (870 euros) pour aider le centre à faire face à ses dépenses de fonctionnement. Des médecins et des infirmières de Médecins sans frontières viennent ausculter les patients chaque semaine.

Grâce à l’appui du gouvernement pour toutes les initiatives prises dans ce domaine par l’Eglise catholique, mais aussi par de nombreuses organisations bouddhistes et non confessionnelles, la société thaïlandaise va sûrement “changer d’attitude” vis-à-vis des malades. C’est ce que veut croire Frère Borges, qui, dans le même mouvement, se lamente d’avoir toujours à se battre, même avec des hôpitaux qui renvoient les gens mourir ailleurs parce qu’ils ne veulent pas les garder une fois leur traitement terminé. “La société a besoin d’apprendre comment vivre ensemble dit Frère Borges. Il se souvient d’avoir “menacé” d’appeler la police à cause d’une famille qui refusait de reprendre un de ses membres en fin de traitement.

Au Centre Sainte Claire, 99 % des patients sont de religion bouddhique. Cet état de fait a amené Frère Borges et Sour Angela San Jose à composer une prière interreligieuse, “une prière bouddhique-catholique faite d’une prière à Bouddha et du Notre Père. Aux patients qui en font la demande, la religieuse explique que “les enseignements de Bouddha sont en harmonie avec ceux de Jésus”.