Eglises d'Asie

Pour la première fois en près d’un demi-siècle, la petite communauté orthodoxe de Chine a pu fêter Pâques à Pékin, mais déplore l’absence de prêtre pour la servir

Publié le 18/03/2010




Pour la première fois depuis quarante-huit ans, la petite communauté orthodoxe de Chine a pu fêter Pâques à Pékin. La cérémonie a rassemblé environ 90 fidèles, venus de Pékin, mais aussi de Tianjin et de la province du Hebei (1) et, si un chour a pu accompagner les chants de l’assemblée, le prêtre orthodoxe qui avait fait le déplacement depuis Hongkong pour l’occasion, a été prié par les autorités chinoises de rester en dehors de l’église où avait lieu la cérémonie. Le P. Dionisy Pozdnyaev, prêtre orthodoxe russe du Service des relations extérieures du patriarcat de Moscou, installé depuis plusieurs mois à Hongkong, a dû ainsi patienter durant une heure et demi, surveillé par des représentants nationaux et locaux du Bureau des Affaires religieuses.

Cette année, la Pâque orthodoxe, dont la date dépend du calendrier julien, était fêtée le 1er mai. En raison sans doute de la célébration de la fête du travail ce jour-là, les autorités chinoises avaient demandé à la communauté orthodoxe de déplacer la cérémonie au 2 mai. C’est donc à cette date que Pâques a été fêté et le lieu où la cérémonie a eu lieu était l’église catholique Saint-Michel. La seule église orthodoxe de Pékin encore debout se trouve dans l’enceinte de l’ambassade de Russie et, depuis que les lieux sont devenus en 1957 ambassade d’Union soviétique, elle est hors d’atteinte.

Depuis la mort du dernier prêtre orthodoxe chinois, le P. Alexandre Du Lifu, en 2003, les orthodoxes chinois sont sans prêtre. La nièce du P. Du Lifu, Madrona Wang Linru, fait campagne depuis lors pour que les autorités chinoises autorisent la communauté orthodoxe à avoir de nouveaux prêtres. Le patriarcat de Moscou souhaite que le gouvernement chinois reconnaisse l’Eglise orthodoxe au même titre que les cinq religions ayant un statut officiel (bouddhisme, catholicisme, protestantisme, taoïsme et islam), mais le dossier ne semble pas avancer (2). Afin de ne pas créer de précédent qui pourrait être utilisé par d’autres religions, les responsables chinois des Affaires religieuses refusent qu’un évêque étranger, russe par exemple, ordonne un prêtre orthodoxe chinois. L’avenir de l’Eglise orthodoxe en Chine dépend donc de la manière dont ce problème sera résolu. L’ordination de prêtres orthodoxes se pose désormais avec une certaine acuité car la dizaine de séminaristes orthodoxes chinois étudiant à Moscou arrivent en fin de formation et, à ce jour, il n’y a pas d’évêque chinois pour les ordonner.

En attendant un éventuel dénouement de ce dossier, les autorités chinoises ont suggéré à plusieurs reprises aux orthodoxes chinois de « s’affilier » à l’Eglise catholique « officielle ». Une proposition qui a été poliment mais fermement rejetée par la communauté orthodoxe locale. A l’issue de la cérémonie du 2 mai, Madrona Wang Linru a déclaré que les orthodoxes avaient été heureux de pouvoir célébrer publiquement la plus importante fête religieuse du calendrier orthodoxe : « Cela nous donne l’espoir d’avoir un jour notre propre Eglise, officiellement reconnue. La première étape est de résoudre la question de l’ordination [d’un pope]. »