Eglises d'Asie

Surveillées ou non par la police, les communautés catholiques de Chine ont prié et célébré des messes de requiem ou d’action de grâces pour le pape Jean-Paul II

Publié le 18/03/2010




En Chine, comme partout dans le monde, la mort du pape Jean-Paul II, le 2 avril dernier, a été un événement. Dans les médias, la nouvelle a été réduite à la portion congrue, les journaux à travers le pays ne reprenant le plus souvent qu’une courte dépêche de l’agence officielle Xinhua et les télévisions une séquence de seize secondes. Au sein des communautés catholiques, toutefois, les veillées de prière et les messes, de requiem ou d’action de grâces, ont été nombreuses, qu’elles aient été surveillées par la police ou non.

A Xi’an, dans la province du Shaanxi, Mgr Anthony Li Du’an a rappelé le désir profond du pape Jean-Paul II de voir se normaliser les relations entre la Chine populaire et le Saint-Siège. Il a également évoqué le souci constant du pape pour l’Eglise de Chine. L’évêque “officiel” de Xi’an a précisé que les autorités locales s’étaient informées auprès de lui au sujet des cérémonies que son Eglise mettait en place pour saluer la mémoire du pape défunt, mais qu’aucune restriction ne lui avait été imposée. De Pékin, la Conférence des évêques “officiels” avait demandé aux paroisses de célébrer des messes de requiem.

Dans la province du Liaoning, Mgr Pius Jin Peixian, a souligné que chacun devait accepter “dans la paix” la mort du pape. Il a regretté le fait que Jean-Paul II n’ait pas pu se rendre en visite en Chine. Au sujet de l’annonce par les journaux chinois de la mort du pape, Mgr Jin Peixian a précisé que les journalistes avaient partout souligné que Jean-Paul II avait demandé pardon, en 2001, pour les erreurs commises par l’Eglise catholique en Chine (1). “Le gouvernement aussi considère cette demande de pardon comme un geste amical et espère qu’il pourra servir de fondation à de futures relations a ajouté l’évêque “officiel” de Shenyang.

A Pékin, Anthony Liu Bainian, vice-président de l’Association patriotique des catholiques chinois, a lui aussi rappelé la demande de pardon du pape. Ce geste, a-t-il souligné, a changé la perception que de nombreux Chinois non catholiques avaient du catholicisme. Dans le diocèse de Pékin, plus d’un millier de personnes ont pris part à la messe de requiem, célébrée le 4 avril au matin en la cathédrale de l’Immaculée Conception. Vendredi 8 avril, jour des obsèques du pape place Saint Pierre, à Rome, la messe du matin à la cathédrale n’était pas spécifiquement dédiée à la mémoire de Jean-Paul II, même si les fidèles étaient plus nombreux qu’à l’accoutumée. Selon France-Presse, la présence de policiers en civil à l’extérieur de l’édifice était visible (2).

Ailleurs, dans le pays, la surveillance autour de certains bastions de l’Eglise “clandestine” avait été renforcée dès avant l’annonce du décès de Jean-Paul II. Ainsi, à Zhengding, Mgr Julius Jia Zhiguo a été autorisé à dire la messe dans l’église à côté de laquelle il réside, mais ce fut une messe “privée”, deux diacres seulement l’accompagnaient et personne n’était autorisé à l’approcher. “Une ou deux voitures de police étaient stationnées devant l’église et la Sécurité publique a interdit l’accès du village aux non-résidents a rapporté une source citée par l’agence Ucanews. Mgr Jia a toutefois pu faire passer la consigne aux catholiques de son diocèse de ne pas se réunir pour de grands rassemblements, mais d’organiser des services religieux en petit comité, afin de ne pas mettre inutilement en danger l’ensemble de la communauté.

De façon similaire, Mgr Joseph Zhang Weizhu, évêque “clandestin” de Wanxian, toujours dans la province du Hebei, n’a pu quitter son église, mais ses prêtres ont célébré des messes de requiem. La Sécurité publique avait donné l’ordre aux responsables laïcs de communauté de ne pas quitter leurs villages ou entrer en contact avec des catholiques d’autres régions.

Dans la province du Fujian, les responsables “clandestins” du diocèse de Fuzhou ont témoigné du fait que les autorités les avaient laissés tranquilles. “Elles se sont montrées tolérantes car elles respectent le Saint Père elles aussi a déclaré une religieuse à l’agence Ucanews.

Sur Internet, le 5 avril, environ 190 jeunes catholiques ont pris part à un “chat” qui a duré près de trois heures, échangeant des impressions sur la vie de Jean-Paul II et leur vie de chrétiens en Chine. L’échange a pris fin lorsque des “bruits” inhabituels ont rendu les contacts impossibles. Ailleurs, sur les principaux sites fréquentés par les internautes chinois, les conversations au sujet du pape ont été censurées très rapidement après le décès du pape.