Eglises d'Asie

Des responsables d’Eglise et du gouvernement chinois clarifient leur position quant à la récente ordination d’un évêque auxiliaire pour le diocèse de Shanghai

Publié le 18/03/2010




L’ordination d’un évêque auxiliaire pour le diocèse de Shanghai, le 28 juin dernier (1), avait attiré l’attention de par le monde, notamment du fait que l’ordination de l’évêque en question, Mgr Joseph Xing Wenzhi, avait été menée avec le double accord des autorités gouvernementales chinoises et du pape. Dans les jours qui ont suivi, des responsables de l’Eglise catholique en Chine et du gouvernement chinois ont pris position publiquement pour clarifier les choses de leur point de vue, déclarant notamment que la nomination de l’évêque ne résultait pas d’un “accord commun” entre Pékin et Rome, des responsables de l’Eglise se déclarant néanmoins heureux que le Vatican ait approuvé la nomination de Mgr Joseph Xing.

Le 28 juin, dans la cathédrale de Shanghai, Mgr Joseph Xing a promis d’être “fidèle à l’Eglise une, sainte, catholique et apostolique, avec saint Pierre à sa tête”. Il n’a toutefois pas publiquement fait état du fait que sa nomination avait été approuvée par le Saint-Siège.

Le 4 juillet dernier, Mgr Aloysius Jin Luxian, évêque “officiel” du diocèse de Shanghai, a accordé un entretien à Ucanews, agence catholique d’information (2), où il explique que la nomination de son auxiliaire a été approuvée par Pékin et par le Saint-Siège. “J’ai presque 90 ans maintenant. Il sera ainsi mon successeur a-t-il déclaré, ajoutant “et je serai son mentor pour quelques années encore”. Mgr Jin a aussi précisé que la question de la nomination d’un évêque auxiliaire pour Shanghai, même si elle était acceptée par Pékin et Rome, ne devait pas être mêlée au problème des relations entre la Chine populaire et le Saint-Siège. Sur le dossier des relations, Mgr Jin a redit ce qu’il avait déjà dit par le passé, à savoir que “les deux parties doivent faire des concessions lors des négociations”. Il s’est contenté d’ajouter qu’il espère que “des liens diplomatiques seront progressivement noués”.

Au sein de l’Association patriotique des catholiques chinois, son vice-président, Anthony Liu Bainian, a expliqué, le 30 juin dernier à Ucanews, que le P. Joseph Xing, alors vicaire général du diocèse de Shanghai, avait été élu évêque auxiliaire par un vote majoritaire des représentants de l’Eglise de Shanghai. Le vote a eu lieu le 17 mai dernier et les prêtres, les religieuses et des délégués des laïcs y ont pris part. Après ce vote, la Conférence des évêques de l’Eglise catholique en Chine a accepté et approuvé le choix de Mgr Joseph Xing. Enfin, a ajouté Anthony Liu Bainian, si ce que les médias internationaux ont rapporté à propos de l’acceptation par le pape du choix de Mgr Xing est vrai, “je suis heureux de voir le Saint-Siège faire un pas en avant, en reconnaissant le principe de l’élection et de l’ordination autonomes des évêques en Chine”. Pour le responsable chinois, “le fait que le Vatican n’interfère pas dans les affaires intérieures de la Chine est un facteur favorable au développement des relations entre le Saint-Siège et la Chine”.

A l’échelon gouvernemental, au sein de l’Administration d’Etat des Affaires religieuses, une porte-parole, Guo Wei, a accordé, le 1er juillet dernier, une interview exclusive à l’agence de presse officielle, Chine nouvelle. Elle y a réitéré la position habituelle de la Chine. D’une part, l’Eglise catholique en Chine continuera à élire et à ordonner de manière autonome ses évêques, conformément aux règlements en vigueur dans la Conférence des évêques et dans le droit chinois. D’autre part, la Chine est prête à améliorer ses relations avec le Vatican si deux principes de base sont respectés. L’un concerne la nomination des évêques, a-t-elle précisé, et l’autre la rupture des relations entre le Vatican et Taiwan.

Pour Anthony Lam Sui-ki, du Centre d’études du Saint-Esprit, à Hongkong, ces affirmations successives ne sont pas contradictoires. Le fait qu’aucun accord formel n’a été passé entre le Vatican et Pékin “ne signifie pas qu’il y a opposition”. “Pékin ne demandera pas au Vatican la permission d’élire un évêque chinois, pas plus que le Saint-Siège ne consultera Pékin avant de donner son accord à une nomination a expliqué le chercheur, précisant que chacune des deux parties ne faisait qu’assumer ses propres responsabilités. En revanche, on ne peut pas dire qu’il existe “un accord commun sur les nominations d’évêques” entre Rome et Pékin.

Pour Kwun Ping-hung, observateur attentif des réalités de l’Eglise catholique en Chine, la couverture médiatique dont a bénéficié l’ordination de Mgr Joseph Xing n’aura pas d’effets sur les contacts qui se développent, de façon apparemment prometteuse, entre Pékin et Rome (3). “Après les ordinations épiscopales qui ont eu lieu ces dernières années, je pense que la Chine avait anticipé que celle de Shanghai rencontrerait un certain écho à l’extérieur a-t-il expliqué le 4 juillet à Ucanews. Là où l’ordination de Mgr Joseph Xing pourrait servir de précédent pour les ordinations épiscopales à venir est dans le fait que Pékin et Rome gardent le silence sur la question de la nomination et laissent le nouvel évêque dire en public ce qu’il souhaite dire. Ne pas mentionner qui a le premier nommé un évêque peut s’interpréter comme “un accord tacite » entre la Chine et le Vatican, a encore noté Kwun Ping-hung, ajoutant que c’est là une différence fondamentale avec ce qui se passe entre le Vatican et le Vietnam pour les nominations épiscopales. Entre le gouvernement de Hanoi et le Saint-Siège, les communications et les négociations existent.