Eglises d'Asie – Pakistan
Une institution caritative catholique ouvre pour que les enfants qui travaillent dans les briqueteries parviennent un jour à conquérir leur autonomie
Publié le 18/03/2010
Cette école sans murs a été établie en mai 2004 avec pour objectif de faire prendre conscience aux parents de ces enfants de l’importance de l’instruction. “La petite école” St Paul accueille désormais quarante filles et garçons, âgés de 5 à 14 ans, précise le curé du lieu, le P. Inayat Bernard. L’an dernier, vingt des enfants qui fréquentaient l’école ont été admis à l’école publique de Raja Jang, mais seulement les plus jeunes ont eu cette chance, l’école publique n’accueillant pas les enfants âgés de plus de 7 ans. Ceux qui avaient dépassé cet âge sont donc retournés cette année sur les tapis de la “petite école” financée par Milap Ghar, où ils continuent à étudier.
Le 17 août, pour la petite foule rassemblée à l’occasion du spectacle donné pour la fête de l’Indépendance, Nadia Munsha, l’institutrice de l’école, a expliqué le fonctionnement de “la petite école”. Tous les jours, les enfants partent travailler aux briqueteries dès avant l’aube et reviennent chez eux pour le petit-déjeuner à 9 h. ; ils vont ensuite à l’école jusqu’à 13 h., puis retournent travailler à leurs briques pour ne revenir à la maison avec leurs parents qu’au coucher du soleil (2).
Paul Ashraf, un catéchiste, a remercié la Milap pour tout ce qu’elle faisait pour l’école. “Il nous a fallu beaucoup de temps pour convaincre les parents qui travaillent dans les briqueteries de se passer du travail de leurs enfants quatre heures par jour a-t-il expliqué. C’est un gros sacrifice pour eux, mais à la longue, ils réalisent que leur vie en est valorisée, ajoute-t-il. Le P. Bernard a précisé que les familles subissent un manque à gagner de quinze roupies (0,20 euros) par jour pour les heures que passe chacun de leurs enfants à l’école.
Margaret Piara, directrice de la Milap, pour sa part, a souligné devant l’assemblée combien leur joie était grande à tous de célébrer ce jour de l’Indépendance avec les enfants des briqueteries. Elle a insisté sur l’importance de l’instruction pour que “la nouvelle génération” puisse se libérer de l’esclavage moderne que représentent la confection et la manipulation des briques. Les ouvriers y sont à peine payés, maltraités et perpétuellement en dette vis-à-vis de leurs patrons (3). Milap, a-t-elle encore précisé, travaille dans deux autres districts du Pendjab et à Lahore, où une structure semblable existe en faveur des enfants.
Dans l’assemblée qui, à Raja Jang célébrait le jour de l’Indépendance, se trouvaient également trente-deux femmes et jeunes filles de l’école de couture mise sur pied en mai dernier par Milap dans ce village. Elles ont entre 12 et 45 ans et passent deux heures chaque jour, sauf le dimanche, à s’exercer à la couture, dans un local qui leur est réservé le long du mur de l’église. “C’est notre mission d’aider les veuves, les orphelins et les indigents à s’assumer à travers l’instruction de leurs enfants et les écoles de couture pour les femmes a encore exposé Margaret Piara. Le P. Bernard a précisé que les pères de famille n’aimaient pas envoyer leurs grandes filles à l’école et préféraient les voir à la maison aider leur mère au ménage ou travailler dans les briqueteries.
Sohail Anwar, animateur de Caritas Lahore, le bureau d’action sociale de l’archidiocèse de Lahore, a indiqué que, comme à Raja Jang, Caritas a organisé des fêtes de l’Indépendance ces dernières semaines en différents lieux. Nous organisons des fêtes afin de multiplier les activités éducatives pour que, explique-t-il, “de plus en plus de chrétiens, ici et là, en arrivent à se considérer, non plus comme des parias, mais comme des membres à part entière de la société pakistanaise” (4).
Pourtant, certains ouvriers ne s’imaginent pas célébrer le Jour de l’Indépendance. “Nous ne nous sentons pas vraiment indépendants parce que nous travaillons toute la semaine du matin au soir a commenté Bashir Masih, après la fête. Le Jour de l’Indépendance, dit-il, “c’est un jour comme un autre”.