Eglises d'Asie

Shaanxi : le diocèse de Xi’an a confirmé qu’il a bien été contraint de payer une forte somme pour récupérer la propriété d’un terrain appartenant à des religieuses

Publié le 18/03/2010




Le 12 décembre dernier, Mgr Anthony Dang Mingyan, évêque coadjuteur du diocèse de Xi’an, dans le Shaanxi, a confirmé que son diocèse avait été contraint de payer une forte somme d’argent au Bureau de l’éducation du district de Lianhu, dans la ville de Xi’an, pour récupérer la pleine propriété d’un terrain adjacent au couvent du Sacré Cour de Jésus. La somme est de 6,5 millions de yuans (650 000 euros) et l’accord conclu entre le Bureau de l’éducation et le diocèse fait suite aux violences exercées, le 23 novembre dernier, par des hommes de main sur les religieuses du couvent, qui tentaient d’empêcher l’accès au terrain en question (1). Par ailleurs, il a également confirmé que l’évêque du diocèse, Mgr Anthony Li Du’an a dû signer, le 10 décembre, un texte intitulé : « Communiqué de Mgr Li Du’an, du diocèse de Xi’an, au sujet de l’agression des religieuses de l’église de la rue Wuxing ». L’église de la rue Wuxing (‘les cinq étoiles’) renvoie à la cathédrale du diocèse, la cathédrale Saint-François, aussi connue sous le nom de Nantang (‘l’église du sud’).

On peut lire dans ce communiqué qu’il a été rédigé de manière à clarifier des points relatifs à l’agression des religieuses qui ont été « rapportés par la presse de manière exagérée et déformée ce qui a causé chez les fidèles du diocèse « un profond sentiment de désarroi ». Rédigé en trois points, le communiqué expose les questions relatives à la propriété du terrain adjacent au couvent, l’attaque dont les religieuses ont été la cible et le transfert du titre de propriété du terrain en question à l’Eglise locale.

Mgr Li Du’an rappelle ainsi que l’école primaire de la rue Wuxing se situe sur un terrain qui appartenait à l’Eglise avant la prise du pouvoir par les communistes en 1949. Après cette date et selon la politique de nationalisation de l’éducation, l’école avait été remise au Bureau de l’éducation du district de Lianhu pour devenir une école publique. A partir de ce moment, l’école a appartenu au Bureau de l’éducation, peut-on lire dans le communiqué. En 2003, une réorganisation des établissements scolaires a eu lieu et l’école de la rue Wuxing a été fermée. Le Bureau de l’éducation a ensuite conclu un accord avec la société d’investissement Zhaosheng pour démolir les locaux et reconstruire un jardin d’enfants. Toujours selon le communiqué, l’église du sud, au nom du diocèse et des besoins à long terme de l’Eglise, a alors proposé de récupérer le terrain contre dédommagement. Les autorités locales étaient favorables à cette proposition, note encore le communiqué, sans préciser de quelles autorités locales il s’agissait. Les négociations étaient en cours lorsque est intervenu l’épisode de l’agression des religieuses.

Selon le communiqué, la société Zhaosheng, craignant d’être tenue pour responsable de la rupture du contrat passé avec le Bureau de l’éducation, a envoyé des hommes de main démolir l’école désaffectée. « Cela ne concernait pas une remise en cause du droit de propriété de l’Eglise ou un différend foncier écrit Mgr Li Du’an, qui poursuit en expliquant que les franciscaines missionnaires de Marie ont tenté de s’opposer à la démolition, que plus d’une dizaine d’entre elles ont été battues et cinq hospitalisées. Il est inexact de dire que « les autorités concernées ont démoli une école catholique » ou que « les religieuses ont été battues alors qu’elles avaient organisé un sit-in de protestation ». A présent, peut-on lire dans le communiqué, avec l’aide des différentes administrations concernées, la question foncière autour de cette école a été entièrement résolue et la pleine propriété du terrain reviendra à l’Eglise selon les termes de l’accord signé entre le diocèse et les autorités le 6 décembre. Les détails de l’accord sont en cours de finalisation et « nous sommes très satisfaits de cet arrangement lit-on encore. Des cinq religieuses hospitalisées, seules deux sont encore sous traitement et onze hommes suspectés d’avoir pris part à l’agression des sours ont été interpellés, dit enfin le communiqué.

Parmi les catholiques en Chine, que ce soit dans les communautés « officielles » ou « clandestines », l’affaire a suscité une vive émotion. Très rapidement, les sites Internet et les forums de discussion qui ont rapporté l’information ou débattu à son sujet sont devenus inaccessibles ou ont dû afficher des engagements à « ne pas publier de nouvelles à caractère politique ». Localement, le Bureau de l’éducation a fait diligence pour payer les frais d’hospitalisation des religieuses (l’une d’elle a été opérée et la facture présentée se montait à 50 000 yuans, soit environ 5 000 euros).

Selon Mgr Anthony Dang, le diocèse est parvenu à réunir la somme demandée pour l’achat de leur ancienne propriété, en utilisant le produit de la vente – réalisée il y a quelques années – de deux églises, l’église de l’est et celle de l’ouest, situées en centre-ville. Il a fallu toutefois que Mgr Li Du’an emprunte de l’argent auprès de laïcs et d’amis, le diocèse ayant des ressources très limitées, a ajouté l’évêque coadjuteur, qui a engagé, dans une déclaration à l’agence Ucanews (2), les catholiques hors de Chine à continuer à prier pour le travail d’évangélisation mené par le diocèse ainsi que pour la santé de Mgr Li Du’an, affectée par un cancer.

A Hongkong, au Centre d’études du Saint-Esprit, Anthony Lam Sui-ki fait remarquer que le communiqué de Mgr Li Du’an n’apporte pas de clarification quant à la question de la propriété du terrain contesté. L’Etat avait délégué au Bureau de l’éducation du district de Lianhu la gestion de l’école ; il ne lui avait pas transféré la propriété des murs et du foncier. En Chine continentale, a-t-il poursuivi, les exemples abondent de biens d’Eglise non rendus aux diocèses. Dans le cas présent, le fait que le diocèse de Xi’an ait payé une forte somme au gouvernement pour récupérer un terrain constitue « un précédent fâcheux ». Selon lui, c’est la première fois que l’Eglise doit ainsi payer pour recouvrer un droit de propriété. Jusqu’à ce jour, c’était souvent le gouvernement qui demandait aux personnes ou aux institutions occupant une propriété d’Eglise de payer les diocèses pour que ces derniers renoncent à leurs titres de propriété, a-t-il encore souligné.