Eglises d'Asie

Shanxi : les catholiques du diocèse de Taiyuan ont célébré avec un certain faste le centenaire de leur cathédrale, récemment rénovée

Publié le 18/03/2010




Le 31 décembre dernier, les rues entourant la cathédrale du diocèse de Taiyuan, capitale de la province du Shanxi, ont résonné de chants et de mélodies chrétiennes. Durant plusieurs heures, des milliers de fidèles ont pris place derrière un crucifix et un orchestre mobile, marchant en procession autour de la cathédrale avant d’y pénétrer pour une messe célébrant le centième anniversaire de l’édifice. Dans la cathédrale de l’Immaculée Conception, fraîchement rénovée, l’évêque du lieu, Mgr Silvester Li Jiantang, a présidé la cérémonie, entouré des évêques de deux diocèses voisins, Mgr John Huo Cheng, de Fenyang, et Mgr John Baptist Wang Jin, de Yuci. De nombreux prêtres ont concélébré avec eux, et les religieuses étaient plusieurs dizaines parmi la foule des fidèles. Lors de l’offertoire, dans un geste se voulant symbolique de l’ancrage de l’Eglise dans la province, des laïcs ont apporté du charbon, du vinaigre, une carte de la province et de la terre – ce loess qui fait la fertilité des plateaux du Shanxi.

Durant la procession et la célébration, les prêtres portaient des ornements liturgiques de couleur rouge. Selon un prêtre qui a pris part à cette journée, cette couleur était à la fois le symbole de la joie à l’occasion de ce centenaire et le signe de la communion des fidèles d’aujourd’hui avec les catholiques morts martyrs à Taiyuan et ailleurs dans le pays, lors de la révolte des Boxers en 1900.

A Taiyuan, lors de la révolte des Boxers dirigée contre les puissances occidentales et leurs représentations en Chine, la cathédrale du diocèse fut détruite. Les Boxers exigeaient des missionnaires et des catholiques locaux qu’ils renoncent, sous peine de mort, à leur foi. Vingt-six catholiques, des Chinois ainsi que des missionnaires étrangers, furent tués en juillet 1900 : douze franciscains (Mgr Gregorius Grassi, responsable du vicariat apostolique du Nord-Shanxi – l’actuel diocèse de Taiyuan -, son coadjuteur, Mgr Franciscus Fogolla, deux prêtres, un séminariste, sept religieuses Franciscaines Missionnaires de Marie) et quatorze Chinois (neuf laïcs et cinq séminaristes). Béatifiés par Pie XII en 1946, ils figurent parmi les 120 martyrs de l’Eglise en Chine canonisés par Jean-Paul II, le 1er octobre 2000 (1).

Selon les chroniques du diocèse, lors de la révolte des Boxers, la cathédrale et les bâtiments d’Eglise qui l’entouraient furent détruits ou incendiés. En 1902, la cathédrale fut reconstruite par Mgr Agapito Fiorentini, le nouveau vicaire apostolique, un franciscain italien lui aussi, qui choisit un autre lieu dans la ville pour l’édifier. Achevé en 1905, l’édifice a traversé la guerre sino-japonaise (1937-1945) et la Révolution culturelle (1966-1976) sans dommage irréparable. En 2005, les autorités provinciales l’ont portée sur la liste des monuments à préserver du Shanxi. Selon le procureur du diocèse, le P. Anthony Han Huide, la campagne de rénovation du bâtiment, qui vient de s’achever, a coûté 3,5 millions de yuans (350 000 euros) – dont un million a été fourni par la province.

Dans la cathédrale rénovée, la face avant du maître-autel porte une stèle où ont été gravés les visages des 26 martyrs du diocèse. Derrière l’autel se dresse une statue de quatre mètres de haut de la Sainte Vierge, représentée dans le style chinois. Selon un laïc interrogé sur place par l’agence Ucanews, le fait d’honorer ainsi les martyrs du diocèse est un facteur d’édification de la foi. « Le diocèse de Taiyuan, tel qu’il est aujourd’hui, est bâti sur leur sang. Les piliers de la cathédrale ont pu être détruits, l’esprit des saints demeure et forme la fondation sur laquelle s’appuie notre foi a-t-il témoigné. Selon une paroissienne, l’Eglise locale « ne s’est pas effondrée et cela montre que Dieu nous a sans cesse protégés ».

Selon une source catholique locale, citée par Ucanews, les autorités provinciales ne souhaitaient pas que les catholiques commémorent ouvertement les vingt-six martyrs. Elles ont fait savoir à l’évêque que, selon l’historiographie officielle, ceux que l’Eglise proclame saints sont accusés d’avoir servi l’impérialisme occidental et soutenu l’invasion de la Chine par des puissances étrangères. Aucun officiel n’a pris part à la cérémonie organisée dans la cathédrale. Toutefois, à l’issue de celle-ci, une rencontre a réuni Mgr Li Jiantang et l’adjoint au maire de la ville ainsi que des responsables du Bureau provincial des Affaires religieuses ; des représentants bouddhistes et musulmans étaient également présents et des discours ont été prononcés à cette occasion.

Les responsables du diocèse font remarquer que la campagne de rénovation a permis, entre autres choses, d’abattre un mur qui cachait l’entrée du bâtiment abritant le Centre de service social du diocèse. Désormais, celui-ci sera visible et plus accessible à tous. Il se compose d’un dispensaire médical, d’une agence matrimoniale pour célibataires catholiques, d’un centre de soins pour handicapés et pour les personnes âgées, ainsi que d’un service de prières pour les malades et les défunts. Une petite librairie proposant livres et articles religieux le complète. Le diocèse de Taiyuan compte environ 80 000 catholiques et 25 paroisses desservies par 50 prêtres, quatre diacres et 26 religieuses. Le séminaire diocésain compte 23 étudiants.