Eglises d'Asie

Dans le cadre d’un programme initié par Caritas Lahore, des paysans musulmans et chrétiens travaillent ensemble en bonne intelligence

Publié le 18/03/2010




Tandis que leurs voisins ont déjà commencé à moissonner le blé, un groupe de paysans catholiques et musulmans attendent l’arrivée de l’archevêque de Lahore. Ils sont assis, ce 20 avril, dans les locaux de la paroisse St Luke, à Balykekla, un village situé à 90 km. au nord de Lahore. Certains patientent en attachant des rubans de couleurs à leur faucille. Lorsque Mgr Lawrence Saldanha, archevêque de Lahore, arrive, accompagné de Raymond Rizario, secrétaire général de Caritas Lahore, ils sont accueillis avec des guirlandes de fleurs. Une grande partie des 1 000 habitants de ce village, qui compte neuf familles chrétiennes, est présente. Ils attendent que l’archevêque bénisse le blé à moissonner. Après l’aspersion d’eau bénite, Mgr Saldanha et Raymond Rozario coupent les premières gerbes de blé à l’aide des faucilles décorées, donnant ainsi le signal de la moisson. Avant, la bénédiction avait été célébrée à l’église paroissiale, au nom de “la Fête du blé co-organisée par Caritas Lahore, la Société communautaire de développement (CDS) et la coopérative Kissan (‘paysans’) (1).

La fête a commencé par une lecture d’un texte biblique, donné par un chrétien de la CDS, suivie de celle d’un passage du Coran, lu par une musulmane, élève de l’atelier de couture du village. Les chrétiens ont entonné des cantiques en punjabi. Sur l’estrade, un des chanteurs, assis en tailleur, joua du dholki, petit tambour tenu entre les genoux. Raymond Rizario félicita ensuite les paysans pour leur coopération, déclarant qu’il était heureux de voir “des croyants de foi différente travailler ensemble pour le bien de tous”. La population, a-t-il rappelé, ne demande que “l’unité et la paix”. Mgr Saldanha a fait également l’éloge des relations entre musulmans et chrétiens. “Nous sommes tous des êtres humains, tous Pakistanais, et il n’y a pas de différence entre nous a-t-il affirmé, ajoutant : “Il nous faut tous travailler ensemble pour le développement du Pakistan.” Asadullah Selahri, un musulman membre de la CDS, a, pour sa part, expliqué comment Caritas l’avait aidé à comprendre les chrétiens et le christianisme. “Avant de rejoindre la CDS, je ne savais pratiquement rien des chrétiens et je n’avais même jamais partagé un verre d’eau avec mon ami chrétien, a-t-il reconnu. Maintenant, nous sommes les amis de sa famille, un peu comme des frères”.

La Caritas de l’archidiocèse de Lahore a lancé la CDS en janvier 2005. Elle compte aujourd’hui 25 femmes et 50 hommes. Elle a créé une coopérative agricole, Kissan, et fait l’acquisition de deux champs pour faire connaître des méthodes plus productives. Pendant six mois, les paysans ont été formés à de nouvelles techniques de semis et à un meilleur usage des produits phytosanitaires. Auparavant, “nous supprimions les insectes nuisibles en utilisant des pesticides dangereux pour l’environnement et le goût des légumes. Désormais, en travaillant ensemble et en nous entraidant, chrétiens et musulmans, nous obtenons de meilleurs résultats a expliqué un des membres de la CDS.

Sur un plan financier, l’opération est qualifiée de succès par les responsables de Caritas Lahore. Un emprunt d’un million de roupies a été presque entièrement remboursé par les paysans. Mais ce qui est le plus important aux yeux de ces paysans est qu’ils ne sont plus fermiers ; ils sont désormais des “chaudrys” (propriétaires terriens). Selon Kramat Masih, un paysan chrétien âgé de 60 ans, membre de la CDS, “autrefois, nous étions habitués à travailler les terres des autres. Caritas nous a accordés des prêts et des conduites en ciment pour les puits. Ils nous ont fourni des semences et des engrais, et organisé les visites régulières des vétérinaires et des spécialistes pour les yeux”.

Il y a trois ans, CDS a ouvert deux centres de couture à l’intention des femmes du village. Pour la venue de l’archevêque de Lahore, les élèves avaient exposé des échantillons de vêtements confectionnés par elles. A tous, Raymond Rizario a demandé d’avoir à cour de transmettre aux autres leurs connaissances et leur savoir-faire. “La continuité de vos efforts apportera réussite et progrès et la continuité de notre relation à Dieu nous conduira à la vérité et à la piété a-t-il déclaré.