Eglises d'Asie

Des représentants des minorités religieuses se réunissent pour dénoncer le phénomène des conversions forcées à l’islam

Publié le 18/03/2010




Le 26 mai dernier, à Lahore, capitale de la province du Pendjab, des représentants des minorités religieuses du pays se sont réunis pour dénoncer le phénomène des conversions forcées à l’islam. Intitulé Forced Conversion of Women and Minority Rights in Pakistan, le forum a lancé un appel pour que cessent ces pratiques. Selon Mgr Joseph Coutts, évêque catholique du diocèse de Faisalabad, “il est triste de constater que ce sont les minorités religieuses, chrétiennes et hindoues en particulier, qui sont visées et qui ne peuvent jouir de l’égalité des droits, un principe pourtant inscrit dans la Constitution du pays”. L’évêque a notamment condamné les conversions forcées à l’islam qui visent des femmes et des enfants ; il a appelé les autorités à agir pour empêcher ces phénomènes.

Parmi les représentants des minorités religieuses, outre des chrétiens et des hindous, se trouvaient également des sikhs. Kaliyan Singh Kaliyan, secrétaire général d’une organisation sikh, la Guru Nanak Ji Mission, a cité le cas d’une fillette âgée de six ans, kidnappée et convertie de force à l’islam il y a quelques années dans la Province de la frontière du nord-ouest. “La police et la justice, bien qu’ayant eu connaissance de l’affaire, n’ont rien tenté pour aider la fillette ou ses parents a dénoncé le responsable sikh, qui a ajouté que les autorités se montraient coupables par leur inaction face aux nombreux actes dirigés contre des chrétiens. Au fil des mois passés, des lieux de culte et des villages chrétiens ont été profanés ou incendiés, et aucune action n’a été entreprise pour faire cesser de tels actes (1). Kaliyan Singh Kaliyan a rappelé que les lois dites anti-blasphème étaient “comme une épée” suspendue au-dessus de la tête des minorités du pays (2).

Selon I.A. Rehman, directeur de la Commission des droits de l’homme du Pakistan, une ONG indépendante, ce sont des facteurs tels “les statuts sociaux, les inégalités de condition économique et la pauvreté” qui se cachent derrière le phénomène des conversions forcées. Dans les zones rurales des provinces du Pendjab ou du Sind, où le système social est encore largement féodal, “les propriétaires terriens, qui sont quasiment tous des musulmans, ont pour habitude de prendre de nombreuses épouses, y compris des femmes qui n’appartiennent pas à la religion musulmane”. Pour changer cet état de fait, il a suggéré que les communautés musulmanes et non musulmanes s’unissent pour empêcher les conversions forcées qui en résultent.

Pour Om Prakash, président de la Commission pour les droits des minorités, instance officielle, les cas de jeunes femmes encore célibataires qui sont kidnappées pour être mariées à des musulmans et converties à l’islam ne sont pas rares, mais, pour contraindre les autorités à agir, les ONG qui agissent dans le domaine de la défense des droits de la personne, doivent unir leurs efforts afin d’établir des statistiques précises à l’échelle nationale sur ce phénomène.

Intervenant lors du forum, un chercheur du Centre d’études chrétiennes de Rawalpindi a fait remarquer que les non-musulmans qui montent dans l’échelle sociale doivent souvent faire face à des pressions pour se convertir à l’islam. Il a cité le cas de Yousaf Youhana, star nationale de cricket, qui est né et a grandi dans une famille catholique et qui a annoncé sa conversion à l’islam en 2005 (3). Ou bien encore le cas du chanteur chrétien A. Nayyar, qui a rapporté qu’en février dernier, des inconnus l’avaient pressé de se convertir à l’islam et l’avaient ensuite battu, face à son refus d’obtempérer. Tout en bas de l’échelle sociale, le chercheur a aussi mentionné le cas des enfants mis au travail dès l’âge de 5 ans, qui sont convertis de force à l’islam, et doivent quitter leur famille.

A l’issue du forum, les représentants des minorités religieuses ont conclu à la nécessité de réunir des statistiques sur ce phénomène et de recourir aux médias pour le dénoncer. Au plan politique, ils ont dit leur volonté de soulever le problème devant le Parlement, et d’agir pour obtenir l’abolition des lois anti-blasphème.