Eglises d'Asie – Cambodge
Des catholiques relisent et approfondissent à la lumière de la Bible l’histoire mouvementée de l’Eglise du Cambodge au cours de leur synode annuel
Publié le 18/03/2010
Chiv Sok Noeun, un jeune converti de 29 ans de la préfecture apostolique de Kompong Cham, à l’Est du pays, a confié à l’agence Ucanews qu’avant le synode, il ignorait que l’Eglise catholique du Cambodge avait une histoire longue de 450 ans. Il pensait qu’elle avait commencé au début des années 1990 ou peut-être sous la période du protectorat français (1887-1953).
Pour Y Yim, une catéchiste de 37 ans, ce synode lui a permis d’apprendre qu’auparavant, l’Eglise locale avait eu beaucoup de fidèles et que pendant les persécutions des années 1970, les catholiques avaient continué de prier seuls, en petits comités ou en famille. “Ceux qui sont morts pour le Christ sont un bon exemple pour nous et je me souviendrai du témoignage qu’ils nous ont laissé a-t-elle confié.
Mgr Yves Ramousse, ancien vicaire apostolique de Phnom Penh et prêtre des Missions Etrangères de Paris, ajoute que durant la guerre civile qui a sévi pendant les années 1970, aucun prêtre ni religieux n’a survécu aux massacres. Seuls quelques laïcs sont restés en vie. “Bien que l’Eglise ait été détruite, cela ne voulait pas dire qu’il n’existait plus de communauté catholique a-t-il précisé. Avant le génocide, le pays comptait un total de 61 prêtres et près de 250 religieuses.
De 1975 à 1979, année où les Vietnamiens envahirent le pays, près de deux millions de Cambodgiens sont morts dans les déportations massives organisées par les Khmers rouges sous la direction de Pol Pot. 27 ans après, la justice se met enfin en marche, et le 3 juillet dernier, au palais royal de Phnom Penh, 17 juges cambodgiens et dix juges étrangers ont prêté serment, donnant ainsi le coup d’envoi d’un procès au cours duquel devraient être jugés les principaux chefs Khmers rouges. Mais l’affaire sera longue et épineuse.
La liberté religieuse fut réinstaurée en 1991, année de l’acceptation par les Khmers rouges du cessez le feu de l’ONU, et les missionnaires sont peu à peu revenus au Cambodge, à la recherche des survivants.
Pour le P. Pierre Tonlop Sophal, prêtre cambodgien qui est intervenu pendant le synode, “Bien que le peuple ait souffert et ait été mis à mort cette agonie a aidé l’Eglise du Cambodge à devenir une véritable communauté cambodgienne. “En 1955, seulement 3 000 des 126 000 catholiques étaient cambodgiens. Aujourd’hui, il existe 11 253 familles catholiques dans 84 communautés dispersées à travers le pays.”
D’après des statistiques de l’Eglise catholique, 19 000 des 12 millions d’habitants sont actuellement catholiques, et sur 50 prêtres présents dans le pays, cinq sont cambodgiens.
Le synode a également rappelé les débuts de l’histoire du catholicisme au Cambodge qui date du XVIe siècle. Le P. Gaspar da Cruz, dominicain, a ainsi introduit la Bible en 1555. Des missionnaires de France, de Goa (Inde), des Philippines, du Portugal et de l’Espagne sont ensuite venus dans le pays, sans réussir à s’installer durablement du fait des guerres.
En 1659, les catholiques du Cambodge furent mis sous la responsabilité des missionnaires français vivant à Ayutthaya, la capitale du Siam, dans l’actuelle Thaïlande. En 1850, la préfecture apostolique du Cambodge, qui comprenait également la Cochinchine (partie sud du Vietnam) peuplée de Khmers, était érigée.
Pendant les trente premières années du XXe siècle, la communauté catholique cambodgienne s’agrandit sensiblement, principalement parmi les communautés vietnamiennes installées au Cambodge. En 1924, la préfecture apostolique de Phnom Penh devenue vicariat apostolique, était ramenée aux limites politiques du pays. En 1957, l’Eglise de Cambodge assistait à la première ordination d’un prêtre cambodgien, et en 1968, les préfectures de Kompong Cham et de Battambang (nord ouest du pays), détachées du vicariat de Phnom Penh, étaient créées.
Les participants au synode ont également visité différents lieux historiques aux alentours de la capitale, comme des ruines d’anciennes églises et à Bram Bey Choum, ils sont allés se recueillir sur la tombe de Mgr Guillaume Piguel, prêtre des Missions Etrangères de Paris et vicaire apostolique de Cochinchine. Il avait beaucoup ouvré pour la communauté catholique cambodgienne au XVIIIe siècle.
Mgr Emile Destombes, actuel vicaire apostolique de Phnom Penh, qui était en voyage en Europe au moment du synode, a précisé qu’en décembre prochain, l’Eglise du Cambodge allait célébrer son 450e anniversaire.