Eglises d'Asie – Thaïlande
Selon des responsables de l’Eglise catholique, le coup d’Etat est une bonne occasion de réfléchir sur les enjeux actuels de la société thaïlandaise
Publié le 18/03/2010
Le 19 septembre dernier, Sonthi Boonyaratklin, commandant en chef de l’armée de terre, a pris le pouvoir en ralliant les forces terrestres ainsi que des unités militaires de la marine et de l’aviation, pourtant réputées pour leur soutien au chef du gouvernement. Ce jour-là, le Premier ministre, Thaksin Shinawatra, se trouvait en déplacement à New-York pour l’assemblée générale des Nations-Unies. Selon les militaires, ce coup d’Etat était nécessaire pour mettre fin à une crise politique qui dure depuis près d’un an et qui a conduit le peuple et des hommes politiques dans la rue, le Premier ministre étant accusé de subvertir la démocratie au profit des intérêts économiques de sa famille et de ses amis.
Ce même jour, le commandant en chef de l’armée de terre annonçait la nomination d’un Premier ministre d’ici deux semaines, la rédaction d’une nouvelle Constitution confiée à plusieurs personnalités politiques respectées, afin de remplacer celle de 1997 qui a été abrogée du fait de dispositions encore ambigües sur les garanties démocratiques, et des élections législatives d’ici un an. Les rassemblements publics de plus de cinq personnes ont été interdits et la coopération des médias a été demandée afin de diffuser des nouvelles “constructives
Pour Mgr Michael Michai Kitbunchu, cardinal archevêque de Bangkok et président de la Conférence des évêques catholiques de Thaïlande, interviewé par l’agence de presse Ucanews le 21 septembre dernier, l’Eglise est très soucieuse de la situation dans le pays, bien que le coup d’Etat “n’ait pas de répercussions sur la vie de l’Eglise particulièrement engagée dans les activités éducatives et sociales. Il précise que “par bonheur, il n’y a pas eu de violences ni de résistance” et que les catholiques “prient pour un retour rapide de la démocratie
Mgr Michael Bunluen Mansap, qui dirige la Commission catholique ‘Justice et paix’, s’est dit quant à lui “personnellement heureux” du changement de gouvernement, “même si les moyens utilisés n’étaient pas bons L’évêque émérite d’Ubon-Ratchathani pense que la situation actuelle est “une bonne occasion pour l’Eglise catholique de réfléchir sur la société expliquant que nombre de Thaïlandais, y compris des catholiques, sont très influencés par le capitalisme et la société de consommation, qui ont été encouragés par l’ancien Premier ministre.
“Je pense que c’est également une occasion donnée aux responsables de l’Eglise pour réfléchir sur ce qui fait défaut dans le pays a-t-il ajouté, en précisant qu’il s’agissait là d’une opinion personnelle. Selon lui, la plupart des prêtres prêchent aux fidèles l’importance de la charité, mais les catholiques n’osent pas aborder la question de la justice. “La charité va de pair avec la justice a insisté Mgr Bunluen Mansap, précisant que la charité est un moyen de parvenir à la justice et à la dignité humaine. “Nous ne pouvons rester oisifs, nous avons le devoir d’éduquer les Thaïlandais” et les laïcs “doivent sans aucun doute s’impliquer dans la vie politique a-t-il dit. Ces derniers mois, dans la capitale, différentes manifestations avaient réuni plus de 100 000 personnes pour demander le départ de Thaksin.
D’après un laïc travaillant pour l’Eglise, la communauté catholique thaïlandaise ne prend pas partie dans les débats politiques, “consciente d’appartenir à une minorité religieuse dans un pays essentiellement bouddhiste Selon des statistiques officielles, 94,6 % des 65 millions d’habitants en Thaïlande sont bouddhistes, 4,6 % sont musulmans et 0,5 % sont chrétiens, le général Sonthi étant le premier musulman à commander l’armée.