Eglises d'Asie

LORSQUE LA PRESSE OFFICIELLE CHINOISE PRESENTE UNE PAROISSE CATHOLIQUE TIBETAINE COMME UN EXEMPLE D’HARMONIE.

Publié le 18/03/2010




Perché au sommet d’une colline, le bâtiment d’un blanc étincelant domine la vallée, à l’ouest du fleuve Jinsha (1), dans les immensités du Tibet oriental, sous un ciel incroyablement clair et bleu. Ce n’est pourtant pas là une résidence ordinaire tibétaine. Les deux croix fixées sur les murs extérieurs, la belle décoration intérieure représentant des arcs gothiques ainsi qu’un plafond peint représentant des scènes de la Bible révèlent la vérité : nous sommes devant l’église catholique de Yanjing, connue également sous le nom de “Yerkalo”, l’unique lieu de culte catholique de l’ensemble de la Région autonome du Tibet.

Le village du Haut-Yanjing compte une population de 900 âmes, dont 600 sont catholiques. Le prêtre qui réside là, un Tibétain, le P. Laurent, déclare : “L’existence d’une église catholique en ce lieu, dont l’histoire remonte à plus d’un siècle, est la preuve que différentes religions peuvent coexister en harmonie.”

Selon son récit, l’église catholique de Yanjing a été fondée en 1865 par un missionnaire français du nom de Félix Biet. Né en 1838, le P. Félix est arrivé au Tibet en 1864. Il est devenu évêque et est mort en septembre 1901 (2). S’établir au Tibet n’a pas été chose aisée pour la petite communauté catholique. Les heurts entre l’église catholique et une lamaserie voisine ont été fréquents et ont culminé avec la mort du successeur du P. Félix, le P. Maurice Tornay, dans les années 1940 (3). Des lamas armés ont ensuite pris le contrôle de l’église et ce n’est pas avant 1951 qu’elle a été rendue aux catholiques.

Durant la “révolution culturelle (1966-1976)”, les bâtiments de l’église ont été transformés en école primaire et en collège. Certains des joyaux de l’église ont été détruits et le toit de l’église a été démonté de façon à permettre une extension de l’école. A la fin des années 1980, l’église a été en partie rénovée pour un coût de 102 000 yuans (12 750 dollars US), financés sur des fonds gouvernementaux à hauteur de 95 000 yuans (4).

Lisa, une Tibétaine de 84 ans du village du Haut-Yanjing, est analphabète, mais elle est capable de réciter par cour et à haute voix la version tibétaine de la Bible. “Les nouveau- nés sont amenés à l’église par leurs parents et ils sont baptisés par les prêtres. Ils portent leurs noms chrétiens toute leur vie et, à leur mort, ils sont inhumés selon les rites catholiques explique Lisa.

La foi catholique au Tibet a revêtu des accents tibétains. Par exemple, les catholiques tibétains, à l’image de tous les autres Tibétains, fêtent le Nouvel An en mars (sic) (5). Ils récitent la Bible en tibétain en lieu et place de l’anglais (re-sic). Ils présentent des “hada ces longues pièces de soie utilisées par les Tibétains comme cadeaux, à la Sainte Vierge.

Le prêtre tibétain précise qu’ils invitent des paroissiens des provinces voisines ou des bouddhistes des lamaseries alentour pour célébrer des fêtes telles que Noël et, en retour, ils sont invités à assister aux fêtes bouddhiques. “Seule une petite minorité des croyants au Tibet sont catholiques. La vaste majorité des Tibétains sont bouddhistes, mais, en dépit de nos divergences religieuses, nous avons tous la même nationalité et le même style de vie, explique Gongqiu Zhaxi, directeur du Comité villageois du Haut-Yanjing. Les conflits religieux entre catholiques et bouddhistes appartiennent au passé.”

(1)NdT : Jinsha (‘sables dorés’) est le nom donné au Yangzi Jiang au-dessous de 5 000 m. d’altitude, dans les montagnes du Tibet. Le village de Yanjing domine en fait le Mékong.

(2)NdT : Mgr Félix Biet, des Missions Etrangères de Paris, fut ordonné prêtre le 10 janvier 1864 et partit pour le Tibet le 15 mars suivant. Arrivé à Bonga, au Tibet, en mars 1865, il y fut attaqué par des lamas en octobre de la même année et dut se retirer à Yerkalo, où il resta une dizaine d’années à développer ce qui deviendra une chrétienté fort vivante. C’est en juillet 1878 qu’il fut nommé vicaire apostolique du Tibet. En 1887, les chrétientés de Bathang, Yaregong et Yerkalo ayant été dévastées par les lamas et leurs amis, il entreprit pour obtenir justice de longues et difficiles négociations, pendant la durée desquelles, en 1892, il tomba gravement malade et vint en France, où il mourut en septembre 1901 (source : Archives des Missions Etrangères de Paris)

(3)NdT : le Bx. Maurice Tornay, chanoine du Grand saint Bernard, est mort martyr à la frontière du Tibet et de la Chine en 1949. Il a été béatifié le 16 mai 1993 à Rome par le pape Jean-Paul II.

(4)NdT : la dépêche ne dit rien de la destruction de l’église par un tremblement de terre en 1999 et de sa reconstruction par le P. Laurent Lu Rendi en 2004 (voir EDA 433).

(5)NdT : le journaliste de Xinhua assimile sans doute ici le Nouvel An à la célébration de Noël.