Eglises d'Asie – Pakistan
Faisalabad : deux chrétiens ont été condamnés à dix ans de prison pour « blasphème »
Publié le 18/03/2010
Les deux condamnés, James Masih, 25 ans, et Buta Masih, 60 ans (1), auraient commis cette « offense au Coran » en septembre dernier et, selon les officiers de police qui ont témoigné au procès, c’est aux forces de l’ordre que les deux hommes doivent d’avoir la vie sauve. « Nous leur avons sauvé la vie en les soustrayant à la colère d’une foule de musulmans qui voulaient les tuer et les avons emmenés en prison a expliqué un policier.
Selon leur avocat – un catholique -, ses clients ont été, comme beaucoup d’autres avant eux, victimes des lois dites anti-blasphème et de leur détournement par des individus peu scrupuleux et désireux de régler ainsi des litiges d’ordre privé (2). Aucune preuve n’a été produite contre eux et le verdict est le résultat des pressions exercées par des groupes musulmans fondamentalistes. L’avocat justifie ses propos en soulignant que la loi anti-blasphème prévoit la prison à vie pour ce type d’offense, là où les deux chrétiens ont été condamnés à « seulement » dix ans de prison. A l’annonce du verdict, un parlementaire chrétien local, Pervez Rafiq, a déclaré vouloir faire appel des condamnations.
Le 10 novembre dernier, la Haute Cour de justice a ordonné la remise en liberté de Ranjha Masih (1), un catholique de 58 ans, en prison depuis huit ans. Le catholique a été acquitté des charges de « blasphème » qui pesaient contre lui et sa remise en liberté a eu lieu le 14 novembre. Pour Joseph Francis, directeur du groupe d’action chrétien qui a défendu Ranjha Masih lors de son procès en appel, c’est là « une victoire pour les chrétiens et pour ceux qui croient aux droits de la personne ».
Lorsqu’il a été arrêté, Ranjha Masih était un vendeur de rue. Il a été interpellé à Faisalabad, le 8 mai 1998, au cours de la manifestation qui avait accompagné l’arrivée du corps de Mgr John Joseph dans la ville, après que celui-ci se fût donné la mort deux jours plus tôt pour protester contre la législation anti-blasphème (2). Ranjha était accusé d’avoir endommagé à coups de pierres un panneau comportant la profession de foi musulmane : « Il n’y a pas d’autre Dieu qu’Allah et Mahomet est son prophète. » A l’époque, en vertu de l’article 295, alinéas B et C, du Code pénal, les plaintes pour blasphème contre le Coran et contre le prophète étaient enregistrées sans enquête préalable. Son premier procès a été repoussé à plusieurs reprises et son avocat a été la cible de menaces de mort, dirigées contre lui et sa famille (3). Ce n’est qu’en 2003 qu’il a été condamné en première instance. Durant les huit années de sa détention, Ranjha Masih a été placé à l’isolement, l’administration pénitentiaire justifiant cette mesure « pour raisons de sécurité ».
« Ranjha est le vingtième chrétien accusé de blasphème que le CLASS (Centre for Legal Aid Assistance and Settlement) a fait acquitter a déclaré Joseph Francis, directeur du CLASS, le groupe qui a contribué à la défense du catholique. Il a ajouté que les difficultés n’étaient pas terminées pour Ranjha, car, bien souvent, des islamistes menacent ceux qui ont été acquittés des accusations de blasphème. « Un grand nombre de ceux qui ont été acquit-tés ne se sentent pas en sécurité ici et ont émigré a-t-il précisé. Sept d’entre eux sont partis aux Etats-Unis et trois en Allemagne.