Eglises d'Asie – Thaïlande
Face à la progression du sida chez les jeunes, l’Eglise catholique, très minoritaire dans le pays, propose une éducation à l’amour
Publié le 18/03/2010
Les études montrent aussi que la conscience du sida a augmenté et a entraîné des changements de comportement. Ainsi, les jeunes hommes fréquentent moins les prostituées pour leur première expérience et recherchent une partenaire parmi les jeunes filles de leur entourage, au lycée ou au travail. Mais, malgré ces changements, les personnes impliquées dans la prévention du sida disent leur difficulté à toucher ces jeunes et à les convaincre de la nécessité de recourir au préservatif. Des études officielles indiquent ainsi que la moitié des lycéens ont eu des relations sexuelles et que, parmi eux, la moitié a eu recours au préservatif.
Pour l’Eglise catholique en Thaïlande, très minoritaire, la pandémie de sida et l’augmentation du taux d’infection chez les jeunes sont un souci. Pour les membres de l’Eglise impliqués dans des actions de prévention, il est souvent mis en avant le fait que l’Eglise est une voix bien modeste dans ce pays très majoritairement bouddhiste. Ils soulignent que bien que les moines bouddhistes prônent eux aussi l’abstinence sexuelle avec le mariage, le message n’est pas entendu.
“L’Eglise a beaucoup d’activités à proposer aux adultes et aux jeunes explique le P. Phirud Sripasert, secrétaire du Comité catholique sur le sida, rattaché à la Commission épiscopale pour la pastorale de la santé. Ce sont en particulier des programmes pour “apprendre à se protéger du sida et à se tourner vers des activités autres que celles du sexe, comme le sport ou les études”. Le P. Sripasert souligne que, dans la réalité, le gouvernement fait campagne pour l’utilisation du préservatif alors que l’Eglise catholique propose autre chose. “Nous cherchons la vérité profonde. Le préservatif protège contre le sida mais pas à 100 % explique-t-il, alors que, continue-t-il, n’avoir des relations qu’avec son épouse protège à 100 %. “C’est ce que nous essayons de dire afin que les gens comprennent que notre position n’est pas dirigée contre la politique du gouvernement” (2).
Le P. Siranon Sanpepch, quant à lui, sait d’expérience combien il est difficile de faire passer cette idée. Le centre Rayong où il travaille à l’éducation des jeunes, y compris les jeunes travailleurs qui affluent vers les usines à la recherche de travail, organise des camps de jeunes pour les aider à choisir. A travers une éducation à l’amour vrai, il leur est proposé “une simple, une meilleure et une vraie sécurité Mais, en fin de compte, c’est aux jeunes “à décider par eux-mêmes”. “Nous n’allons pas contre les campagnes du gouvernement, mais nous sommes fidèles à l’enseignement de l’Eglise. L’Eglise n’accepte pas le préservatif et nous entendons suivre son conseil explique le prêtre.
Oolavaan Kaankhamthong, coordinatrice chez les Sours de la Charité de St Vincent de Paul à Kalasin, dans le nord-est du pays, anime des camps de jeunes centrés sur la spiritualité. “Nous ne prônons pas l’usage du préservatif, dit-elle. Nous leur enseignons l’amour de soi, l’amour des autres et l’amour de la famille. Si, pour les préparer, nous leur parlons de spiritualité, ils comprennent.”
Quant à juger du succès des initiatives de l’Eglise en la matière, l’évolution de la société contemporaine laisse augurer un faible écho. Un nouveau terme – “gik” – a fait son apparition dans le langage courant, sur Internet notamment. Un gik est un partenaire pour une relation sexuelle passagère. Par rapport aux “épouses secondaires” avec qui des hommes thaïlandais peuvent entretenir des relations plus ou moins durables, gik renvoie à l’idée d’une liaison sans lendemain et la nouveauté est qu’une femme peut elle aussi se choisir un gik.