Eglises d'Asie

A Lahore, Caritas Pakistan a ouvert un centre d’assistance médicale et de réinsertion pour les toxicomanes

Publié le 18/03/2010




La tâche de Rana Muhammed Ashraf, au Centre de réinsertion de Caritas Pakistan, est d’aider les toxicomanes en les mettant en garde contre les risques de contamination par le virus du sida. Cet ancien employé d’une verrerie, toxicomane durant vingt ans et désormais désintoxiqué, repère les drogués dans les parcs, les cimetières, les abris d’autobus, les trottoirs et les décharges et les invite à venir rejoindre la toute nouvelle instance créée à leur intention par Caritas Pakistan (1).

Ashraf, 35 ans, travaille au « Centre d’accueil Baga pour une vie saine un projet initié par la branche locale de Caritas Pakistan à Lahore (CPL), le service social de l’Eglise catholique. Là, ouvre une équipe de deux anciens toxicomanes et de quatre travailleurs sociaux professionnels de Caritas, qui visitent les drogués sur leurs lieux de prédilection. « Regarde-moi ! Tu peux le faire toi aussi est le type d’interpellation qu’Ashraf adresse aux toxicomanes pour les pousser à changer de comportement, si ce n’est de style de vie.

« Nos bénévoles communiquent facilement avec leurs anciens compagnons souligne le docteur Asher Azeem, responsable du service de santé de la CPL. Cependant, plutôt que des programmes de réhabilitation pour essayer d’amener les toxicomanes à cesser de se droguer, notre premier but est d’alléger ces gens du mal qu’ils s’infligent à eux-mêmes, explique-t-il. Un des éléments-clés de ce travail de rue est la mise en garde des toxicomanes contre la contamination du sida par échange des seringues ou lors de relations sexuelles non protégées.

Selon les médias locaux, les cas de séropositivité seraient de 3 000 et 4 000 pour l’ensemble du pays, un chiffre très bas comparé à l’estimation d’UNAIDS, qui indique 100 000 séropositifs au Pakistan. Le 2 décembre dernier, le Daily Times rapportait que le taux de contamination était le plus élevé dans la catégorie des 25-44 ans et que les hommes étaient sept fois plus nombreux que les femmes à être contaminés.

Suite à la première phase de ce travail de rue, les « clients comme les appelle le docteur Azeem, sont habilités à venir utiliser gratuitement les services de prévention du sida, une fois inscrits et titulaires d’une carte. Les services du centre de la Caritas proposent la fourniture de nouvelles seringues, de préservatifs, ainsi que des conseils de prévention et des analyses médicales. Existe également un service médical pour traiter les maladies les plus communes, les infections sexuellement transmissibles et les maladies liées au sida.

Le docteur Azeem précise que le but de son programme est de limiter le nombre des personnes atteintes du sida chez les toxicomanes, ainsi que la proportion des personnes porteuses du virus de l’hépatite C. Selon lui, la propagation du virus est principalement due aux échanges de seringues, les contaminations par voies sexuelles étant moins fréquentes. Il témoigne encore des difficultés à guérir un toxicomane de sa dépendance à la drogue. C’est « un long processus » qui suppose de « changer de mentalité et d’être soutenu pour changer de vie explique-t-il, soulignant que les drogués se trouvent dans toutes les catégories de la population, « des analphabètes aux diplômés de l’université ».

Depuis son ouverture, le 7 août dernier, le centre de la Caritas a accueilli 302 toxicomanes et sans domicile fixe – 280 musulmans et 22 chrétiens. Après un mois de formation, les membres « réguliers » passent au « Hayat-e-Nau » (‘vie nouvelle’), le centre de désintoxication et de réinsertion de la CPL, pour quinze jours. « Les trois premiers jours de la désintoxication sont très importants, explique encore le docteur Azeem. Ils ne reçoivent pas de médicament de substitution pour suppléer à leur manque. » En moyenne, quatre toxicomanes sur cinq retombent dans la drogue, mais, pour Rana Muhammed Ashraf, ce qui importe dans « [son] job c’est de tendre la main à ses amis drogués. « Mon objectif mensuel est de contacter au moins 90 drogués dit-il. Et, faisant référence à l’équipe de Caritas, il ajoute : « Avec l’aide de mes frères chrétiens, je vise à élargir encore cet objectif. »