Eglises d'Asie

D’après une étude universitaire, les croyants représentent un tiers de la population chinoise et les chrétiens sont ceux dont l’expansion est la plus rapide

Publié le 18/03/2010




Selon les conclusions d’un sondage et d’une étude menés par des universitaires de Shanghai, les croyants sont désormais au nombre de 300 millions en Chine populaire – soit un chiffre trois fois supérieur à celui avancé depuis des années par les autorités. Parmi eux, ce sont les chrétiens qui connaissent la croissance la plus rapide ; 12 % des Chinois – soit 40 millions de personnes – déclarent appartenir au christianisme.

L’étude, dont les conclusions ont été publiées dans le magazine Oriental Outlook, fait partie d’un projet de recherche sur la vie culturelle contemporaine en Chine, commandé en 2004 par le ministère de l’Education. Tong Shijun et Liu Zhongyu, chercheurs à l’Université normale de l’Est, à Shanghai, ont identifié un échantillon représentatif de la population chinoise – 4 500 personnes âgées de 16 ans et plus – et ont synthétisé les résultats d’une série d’entretiens menés avec ces personnes à partir de 2005. Il ressort de l’étude que 31,4 % des Chinois se déclarent “croyants” et disent appartenir à une religion. Ramené à la population du pays de plus de 16 ans, ce pourcentage donne une population de 300 millions de “croyants Selon Liu Zhongyu, la hausse du nombre des croyants est, pour partie, à mettre au compte de la croissance démographique que la Chine a connu depuis les années 1960 et, pour partie, à un essor remarquable des religions ces dernières années, que les sources officielles ne prenaient jusqu’alors pas ou mal en compte.

L’étude ne dit rien des pratiques religieuses, les questions posées aux sondés portant uniquement sur le fait de savoir s’ils croyaient ou non à une forme ou une autre de religion. Deux tiers des sondés se disent bouddhistes, taoïstes, catholiques, protestants ou musulmans, se rattachant ainsi au groupe des cinq religions officiellement reconnues par le gouvernement. Quant au tiers restant, les personnes interrogées déclarent adhérer à la religion populaire chinoise, aux divinités variées (du roi-dragon au dieu de la fortune). Par ailleurs, d’après les auteurs de l’étude, les “religions traditionnelles chinoises identifiées comme étant le bouddhisme, le taoïsme, le culte des ancêtres et les croyances populaires, réunissent 66,1 % des croyants. L’islam, quant à lui, rassemble 15,5 % des sondés.

Un des points saillants du sondage est l’essor du christianisme. Sans distinguer l’appartenance au catholicisme ou au protestantisme, 12 % des croyants chinois se disent chrétiens, soit 40 millions de personnes. Un tel chiffre double les données communiquées jusqu’à ce jour par les organisations officielles, à savoir les 15 millions de protestants annoncés par le Mouvement des trois autonomies et les 6 millions de catholiques annoncés par l’Association patriotique.

Cet essor traduit-il une simple libération de la parole – les Chinois n’hésitant désormais plus à dire leur religion à travers un sondage en dépit du fait, par exemple, que la législation interdise toujours tout enseignement religieux aux personnes âgées de moins de 18 ans – ou est-ce un renouveau de la foi, dans un pays où, ainsi que l’exprime Liu Zhongyu, “de plus en plus de Chinois se sentent déstabilisés par la pression sociale et vivent comme un déracinement les existences qui sont les leurs aujourd’hui” ? Dans les colonnes de Outlook, le professeur explique que “les normes morales déclinant, les gens ne se font pas confiance les uns aux autres et sont à la recherche de quelque chose auquel arrimer leur vie”.

Parmi les raisons que les croyants invoquent pour expliquer leur adhésion à une religion, un quart des sondés disent que la religion “montre le vrai chemin de la vie un peu plus d’un quart ajoutent qu’elle “aide à soigner les maladies, qu’elle permet d’éviter les catastrophes et assure une vie paisible”. Ce type de déclaration est particulièrement fréquent dans les campagnes, souligne le professeur Liu, qui ajoute que l’on ne doit pas en conclure que les religions n’attirent à elles que des gens pauvres et peu éduqués. Dans les zones économiques spéciales des provinces côtières, le nombre des croyants a augmenté rapidement ces dernières années, indique-t-il. Dans un pays où la liberté religieuse, inscrite dans la Constitution, s’est accrue et où les problèmes sociaux se posent avec une acuité redoublée du fait de la rapidité de l’évolution de la société, les religions attirent à elles des personnes en recherche.

Le professeur Liu indique encore que les jeunes ne sont pas les derniers à rejoindre les rangs des croyants. C’est une tendance nette de ces cinq ou dix dernières années et “un changement en comparaison de la décennie précédente, quand les croyants étaient dans leur grande majorité âgés de 40 ans et plus”. L’étude montre que 62 % des croyants se situent désormais dans la tranche d’âge des 16-39 ans et que les plus de 55 ans ne représentent que 9,6 % des croyants. Quant aux 39-55 ans, “ils étaient athées dans leur jeunesse, mais ils se sont tournés vers la religion à l’âge mûr explique le professeur. 72 % des croyants se déclarent plus heureux aujourd’hui que lorsqu’ils n’étaient pas croyants.