Eglises d'Asie

Rénovée, la cathédrale de Canton regagne une visibilité certaine et contribuera à faire connaître la religion chrétienne dans une ville où les catholiques sont peu nombreux

Publié le 18/03/2010




Plus d’un millier de catholiques ont participé à la messe célébrée, le 9 février dernier, en la cathédrale de Canton, capitale de la province du Guangdong. La cérémonie marquait la fin d’une importante campagne de rénovation de l’édifice, une imposante église de style gothique édifiée au XIXe siècle. Selon le responsable du diocèse, le P. Gan Junqiu, le lustre redonné à la cathédrale, dédiée au Sacré Cour de Jésus, contribuera peut-être à mieux faire connaître la religion chrétienne dans une ville où les catholiques sont peu nombreux.

La cathédrale de Canton, connue localement sous le nom de la “maison de pierre” (shishi), a été édifiée de 1863 à 1888 par les prêtres de la Société des Missions Etrangères de Paris (en particulier Mgr Philippe Guillemin) et son plan est directement inspiré de celui de l’église Sainte-Clotilde, à Paris. Construite en granit, elle fait partie de ces églises de style néo-gothique bâties en Chine sans rien concéder à l’architecture chinoise. Sa construction, considérée comme un emblème de la présence coloniale française, fut source de nombreux conflits avec le gouvernement provincial, voire même de mini-soulèvements de la population locale. Endommagée durant la guerre sino-japonaise (1937-1945) puis par la guerre civile qui opposa les troupes du Guomindang aux forces communistes, elle souffrit des dommages considérables lors de la Révolution culturelle (1966-1976), convertie alors en entrepôt. Rendue au culte en 1979, elle connut alors une première campagne de réparation – pour les travaux les plus urgents.

Inscrite en 1996 par le gouvernement central sur la liste des monuments historiques du pays, elle vient donc de faire l’objet d’une profonde restauration. Débutée en juillet 2004, celle-ci a été financée à hauteur de 80 % par la municipalité de Canton. Selon le P. Gan, la ville a déboursé 21 millions de yuans (2,1 millions d’euros), le diocèse apportant trois millions supplémentaires et les catholiques locaux deux autres millions. Dans leur travail de rénovation, les responsables des monuments historiques ont tenu à ne pas effacer les marques de l’histoire qui sont une des caractéristiques de cette cathédrale. Ainsi, les grilles qui se trouvent en avant de l’édifice portent à nouveau les deux lettres “ME pour “Missions Etrangères et, derrière le maître-autel, sur un mur, des inscriptions datant de la Révolution culturelle ont été préservées : “Longue vie au président Mao” et “La classe des travailleurs doit diriger en tout”.

A l’image des communautés variées qui fréquentent la cathédrale – des messes y sont célébrées en cantonais, en mandarin, en anglais et en coréen -, les restaurateurs ont fait appel à des artisans chinois et étrangers. Ainsi, les 98 vitraux de l’église ont été réalisés aux Philippines. Classiquement, ils représentent des scènes bibliques et des saints. Le P. Matteo Ricci (1552-1610) et Paul Xu Guangqi (1562-1633), le mandarin qui fut le premier chinois baptisé par le jésuite italien, y sont aussi représentés.

Selon des paroissiens de la cathédrale, on peut espérer que l’attention suscitée dans la presse et la télévision locales par la cérémonie d’inauguration de la cathédrale rénovée se traduira par un intérêt autre que simplement culturel ou touristique. Des visites guidées du bâtiment seront organisées et ce sera l’occasion d’un travail d’évangélisation, soulignent certains d’entre eux.

Pour le P. Joseph Huang Bingzhang, prêtre du diocèse voisin de Shantou et président de l’Association patriotique des catholiques pour la province du Guangdong, la cathédrale de Canton “représente un témoignage de l’histoire de l’Eglise” en Chine et pourra contribuer à mieux faire connaître la religion catholique dans le pays. Lors de la cérémonie d’inauguration, le responsable provincial du Département du Front uni, organisme gouvernemental auquel sont administrativement rattachées les organisations religieuses, a rappelé les principes d’autonomie auxquels adhère l’Eglise catholique de Chine et a souligné que le travail réalisé avait été fait “en application de la politique de liberté religieuse et de protection des monuments historiques” du gouvernement.

Pour le P. Gan, 42 ans, dont la candidature à l’épiscopat pour le diocèse de Canton a été approuvée par le Saint-Siège mais qui n’a pas encore été ordonné évêque (1), une cathédrale ainsi magnifiquement rénovée ne peut que contribuer à l’évangélisation de la vaste population du diocèse de Canton.