Eglises d'Asie

Dans son message de Pâques, l’évêque « officiel » de Shanghai met en garde ses diocésains contre les dangers du matérialisme

Publié le 18/03/2010




« Allez et voyez ! » Tel est l’appel que Mgr Aloysius Jin Luxian, évêque « officiel » du diocèse de Shanghai, a adressé à ses diocésains dans une lettre publiée le 2 avril dernier, peu avant Pâques. Le texte, long de 6 200 caractères, a été diffusé via le site Internet du diocèse. Pour l’évêque, âgé de 91 ans, si « aller et voir » est l’attitude que tout catholique doit avoir pour s’engager à la suite de Jésus, il y a cependant des lieux et des attitudes où les catholiques feraient « mieux de ne pas aller et de ne pas regarder ». L’évêque cite en particulier la spéculation boursière et tout un ensemble de comportements qui ont en commun de développer un esprit matérialiste.

S’agissant de la spéculation boursière, Mgr Jin déplore que ce phénomène triomphe à Shanghai et dans toutes les grandes villes du pays. Les spéculateurs jouent leurs économies, empruntent pour placer des fonds supplémentaires en bourse et vont jusqu’à détourner des fonds publics pour spéculer, car ils estiment que la bourse est le chemin qui mène le plus rapidement à la fortune. Si l’Eglise ne condamne pas le commerce des actions, Mgr Jin rappelle que les gens « doivent être très prudents » à la bourse qui est un placement très risqué. Avec une hausse de 130 % en 2006, la bourse de Shanghai a attiré une foule de nouveaux investisseurs.

Dans le même ordre d’idée, Mgr Jin appelle les catholiques à ne pas tenter leur chance dans les casinos, interdits en Chine mais présents à Macao ou sur des bateaux croisant au large. Les casinos ne sont que fraude et escroquerie, met-il en garde, « à la fin, nous serons ruinés et aurons ruiné nos vies ».

Mgr Jin note aussi que quasiment tous les foyers de Shanghai sont équipés d’un ou de plusieurs ordinateurs. Si l’outil informatique et Internet sont utiles, ils peuvent aussi servir à des usages frauduleux. De plus, les comportements d’addiction se développent très rapidement (1). Pareillement, si la télévision a de bons côtés, Mgr Jin remarque qu’elle peut imperceptiblement « envahir nos âmes et changer notre regard et nos valeurs sur la vie », notamment chez les plus jeunes.

Plus fondamentalement, la lettre de l’évêque de Shanghai rappelle aux catholiques qu’ils n’ont pas à être fascinés par ce que le monde peut offrir : puissance, statut social, argent et réputation. Au contraire, les catholiques doivent « aller et aider » les plus faibles. Que ce soit via le service social du diocèse, Quangqi, ou les groupes caritatifs paroissiaux, les fidèles peuvent « trouver Jésus parmi les pauvres, les malades et ceux qui souffrent ».

Citant l’encyclique de Benoît XVI, Deux caritas est, Mgr Jin invite ses diocésains à répandre la Bonne Nouvelle. Une obligation où les protestants se montrent plus efficaces que les catholiques, remarque-t-il. Citant des sources gouvernementales, il souligne que le nombre des protestants a été multiplié par quarante depuis 1949, ceux-ci passant de 700 000 à près de 30 millions, quand le nombre des catholiques a seulement doublé, passant de trois à six millions (2). « Notre travail d’évangélisation n’a pas été assez bon », note-t-il.

Mentionnant les 1 484 baptêmes inscrits dans les registres du diocèse en 2005, Mgr Jin écrit qu’il « n’y a rien de splendide dans ce chiffre » et qu’« en tant qu’évêque, [il] en prend la responsabilité ». Prêtres, religieuses et laïcs sont tous appelés à avoir à l’esprit l’urgence de l’évangélisation, dans un diocèse où les catholiques, au nombre de 150 000, représentent 1 % des 13,6 millions de Shanghaïens.

Lors de la messe chrismale, célébrée le 4 avril en la cathédrale Saint-Ignace par Mgr Jin, l’évêque auxiliaire du diocèse, Mgr Joseph Xing Wenzhi, a appelé les catholiques à venir en aide aux pauvres, que leur pauvreté soit matérielle ou spirituelle.