Eglises d'Asie

Les laïcs chrétiens donnent beaucoup à l’Eglise mais s’expriment très peu en raison de longues habitudes de silence lentes à disparaître

Publié le 18/03/2010




L’importance renouvelée donnée aux laïcs par le concile Vatican II a tardé à se traduire dans les faits au sein de l’Eglise catholique en Birmanie, mais cette situation évolue. Dans une Eglise où évêques et prêtres sont encore considérés comme des dirigeants jamais contestés, un laïc vient de prendre la tête d’une toute nouvelle Commission, celle des laïcs, dans l’archidiocèse de Mandalay. Selon l’évêque du lieu, Mgr Paul Grawng, c’est là un petit pas, mais il représente une avancée réelle pour donner aux laïcs un plus grand rôle dans l’Eglise.

Les autres diocèses de Birmanie ont certes des associations de laïcs, mais elles sont toutes dirigées par des prêtres. A Mandalay, Mgr Grawng a choisi un médecin âgé de 60 ans, le docteur John Khin Maung Pyone, pour être « le visage laïque » de l’archidiocèse. Sa nomination à la tête de la Commission pour les laïcs remonte au mois de juillet 2006 et a été faite après une large consultation des diocésains.

En mars dernier, lors d’une réunion de la Commission pour les laïcs, Maung Pyone a évoqué sa conception du rôle des laïcs dans l’Eglise. Selon lui, l’initiative dans l’Eglise peut venir des laïcs et ne revient pas nécessairement au clergé. Et cette initiative peut trouver à s’exprimer dans les domaines de la formation catéchétique, l’éducation, ou bien encore les questions économiques et sociales. Maung Pyone s’est dit préoccupé par « la faiblesse des catholiques tant dans le domaine de la foi que de celui de l’économie, de l’éducation et des réalisations sociales ». Il a évoqué la nécessité pour les laïcs de prendre des initiatives pour la promotion du développement personnel de chacun. « Nous avons besoin de voir davantage de laïcs s’impliquer dans les activités ecclésiales », a-t-il affirmé, ajoutant qu’il n’était pas souhaitable « pour autant de provoquer des heurts avec les prêtres ».

Soulignant combien les fidèles étaient désireux de servir, il a expliqué que nombreux étaient ceux qui aidaient déjà les prêtres dans les missions d’évangélisation, les services d’entraide ou d’autres activités. « Par exemple, au moment des inondations en 2006 près de Mandalay, notre Commission pour les laïcs a organisé des collectes d’argent, de vêtements et d’huile auprès des paroissiens de la ville », a-t-il rappelé.

L’un des prêtres qui participaient à la session de mars dernier, le P. Richard Hla Min Oo, a expliqué que les laïcs de sa paroisse se réunissaient tous les mois sans aucune difficulté et que le service d’entraide dépendait entièrement d’eux. Parce qu’ils connaissent mieux la situation des gens dans les milieux où ils vivent, les prêtres devraient écouter les laïcs et ne pas les ignorer sous prétexte que « quelques-uns sont contre nous ». Redisant que les prêtres ont besoin de collaborer avec le laïcat, il a aussi indiqué que les fidèles « seraient plus actifs si les prêtres se rendaient compte de ce qu’ils sont capables de faire ».

Dans une récente interview de l’agence Ucanews, Mgr Grawng, qui a été nommé archevêque de Mandalay en 2003, a souligné « la grande amélioration » qu’il avait pu constater dans la participation du laïcat au sein de l’Eglise (1) : « C’est encourageant d’avoir des laïcs qui viennent vous voir avec des suggestions et des propositions, par exemple sur l’enseignement de la foi, l’obtention de fonds pour des travaux d’église, leur propre formation ou l’aide aux séminaristes. »

 

Dans une certaine mesure, la théorie et la pratique diffèrent toutefois dans une certaine mesure. Ainsi, selon le laïc Eusebius Aung Nyunt, de la paroisse St François-Xavier, à Mandalay, l’idée que ce sont uniquement les évêques et les prêtres qui ont autorité pour diriger une réunion, par exemple, est profondément ancrée chez les fidèles. « Quand le prêtre de la paroisse organise une réunion, explique-t-il, les gens viennent. Si c’est un laïc, leur réponse est moindre. » Un autre laïc, Aung Nyunt, actif dans l’Eglise depuis trente ans, témoigne que les fidèles ne participent aux activités « que lorsque c’est le prêtre de la paroisse qui leur demande de faire quelque chose ».