Eglises d'Asie

Près de 1 500 personnes de différentes religions ont manifesté dans les rues de la capitale pour protester contre le harcèlement dont sont victimes les civils tamouls

Publié le 18/03/2010




Le 8 juin dernier, quelque 1 500 personnes de différentes religions ont manifesté dans les rues de Colombo pour protester contre le harcèlement dont sont victimes les civils tamouls, depuis la reprise des combats entre le mouvement des Tigres tamouls (LTTE) et les forces armées du gouvernement, ces derniers mois.

A Colombo, dans la nuit du 6 juin dernier, la police a délogé près de 400 Tamouls, hommes, femmes et enfants, de religion hindoue ou chrétienne (1), réfugiés dans la capitale après avoir fui les combats. Plusieurs dizaines de bus les ont ensuite transportés jusqu’à Vavuniya, ville majoritairement tamoule à 250 km au nord de la capitale, où ils ont été abandonnés.

Pour le P. Dudley Attanayake, curé dans le diocèse de Ratnapura, « en tant que catholiques, nous devons élever nos voix pour soutenir les laissés-pour-compte, et c’est ce que je fais aujourd’hui », a-t-il déclaré. « Si la police suspecte des individus, elle peut arrêter les personnes et exiger l’ouverture d’une enquête, mais, en aucun cas, on ne peut tolérer des expulsions forcées. (…) Expulser des Tamouls qui vivent à Colombo est un manquement grave aux droits de l’homme », a précisé Marimuthupillai Shakthuvel, prêtre anglican de la paroisse Saint-Marc de Dandugam.

Madampagama Assaji Nayake Thero, moine bouddhiste, qui, pendant la manifestation, brandissait une pancarte avec un de ses confrères, a rapporté à l’agence Ucanews : « Les Tamouls du Nord-Est viennent à Colombo pour fuir les combats, mais nous les chassons et les renvoyons dans cette région. Où peuvent-ils aller ? Nous ne devrions pas tolérer ce genre d’expulsions » (2). Plusieurs associations de défense des droits de l’homme, comme le Centre pour les droits de l’homme et le développement, ont toutefois obtenu de la part des autorités une suspension temporaire des expulsions auprès de la Cour suprême qui a publié une décision condamnant ces évictions.

Le 9 juin dernier, la police faisait alors revenir la plupart d’entre eux et, un jour plus tard, le gouvernement déclarait regretter avoir expulsé de la capitale des centaines de Tamouls pour des raisons de sécurité, promettant que cela ne se reproduirait pas. D’après le Jesuit Refugee Service (3), le gouvernement a toutefois affirmé pendant deux jours que les Tamouls avaient quitté la capitale de leur propre gré, jusqu’à ce que le bureau du président de la République publie un communiqué précisant qu’une enquête au sujet de cette opération de police avait été ordonnée et que tout manquement avéré ferait l’objet d’un rappel à l’ordre.

Ces derniers temps, la recrudescence des attentats dans la capitale a exacerbé le climat de suspicion envers la communauté tamoule présente à Colombo. Le 18 juin dernier, Manickam Johnson, un chrétien tamoul, était enlevé à Wellawatte, dans la banlieue de Colombo (4). Le même jour, le Conseil chrétien national du Sri Lanka lançait un appel au président de la République, Mahinda Rajapakse, et au chef de la police nationale : « Nous sommes extrêmement préoccupés par la multiplication des enlèvements dans tout le pays. Il s’agit de crimes contre l’humanité que vous devez pouvoir arrêter. » De son côté, l’Alliance évangélique du Sri Lanka a qualifié la disparition récente de plusieurs civils tamouls de « question extrêmement urgente qui menace la sécurité des citoyens », précisant que les recherches pour retrouver quatre chrétiens portés disparus en mars dernier étaient jusqu’à présent restée « vaines » (5).

« Il semble que les Tamouls reçoivent un traitement particulier de la part des forces de sécurité (…). Pour elles, tous les Tamouls soutiennent le LTTE » (6), a déclaré le pasteur Suresh Ramachandran, lui-même tamoul. Arrêté en mai dernier, après avoir été accusé d’avoir détruit des statues bouddhiques, il a rapidement été libéré sous caution, grâce à l’intervention de ses avocats qui ont prouvé que leur client rendait visite à sa fille au moment des faits.