Eglises d'Asie – Chine
Précision sur les « facultés et directives pastorales » révoquées par le pape Benoît XVI dans sa lettre aux catholiques chinois
Publié le 18/03/2010
Lorsque l’Eglise a pu, peu à peu, reprendre ses activités, au sortir de la Révolution culturelle (1966-1976), la situation de l’Eglise était très fragile et, à trois reprises au moins – en 1978, en 1981 et en 1988 –, le Saint-Siège a édicté des règles spéciales pour l’administration des sacrements en Chine populaire. A la fin des années 1970, parmi les évêques survivants, peu nombreux étaient ceux qui étaient en communion avec Rome. Les directives données en 1978 par la Congrégation pour l’évangélisation des peuples ont donc fourni la base sur laquelle la partie « clandestine » de l’Eglise a pu se développer. Edictées comme des exceptions au code de droit canon, elles visaient à permettre de faire face au vide créé du fait de l’impossibilité pour les évêques et le clergé de mener normalement leurs activités pastorales et d’entrer facilement en contact avec Rome. A titre d’exemple, les évêques et les prêtres étaient autorisées à agir ès qualité en dehors des limites de leur diocèse pour administrer les sacrements. Une autre exception consistait en la permission donnée aux évêques d’ordonner à la prêtrise des hommes catholiques, pourvu que ceux-ci soient fermes dans la foi, vertueux, désireux de respecter le célibat et fidèle au pape ; la formation théologique normalement requise pour le sacerdoce n’était pas exigée.
Concernant l’ordination des évêques, on peut se rappeler que l’évêque de Baoding, Mgr Peter Joseph Fan Xueyan, a secrètement ordonné à l’épiscopat trois prêtres en 1981. Avec l’accord du Saint-Siège, lui et d’autres évêques qui avaient été ordonnés par le pape Pie XII, avant 1949, ont ensuite ordonné d’autres évêques. De 1980 à 1993, on estime qu’environ 80 évêques ont ainsi été ordonnés dans le secret.
A propos des relations entre les « clandestins » et les « officiels », une « Directive en huit points » est émise par la Congrégation pour l’évangélisation des peuples en 1988. Ses auteurs répondaient à une liste de treize points soulevés par des membres « clandestins » de l’Eglise qui considéraient comme illicites et non valables les sacrements administrés par les membres du clergé appartenant à l’Association patriotique des catholiques chinois. Tout en affirmant que la communicatio in sacris (la communion sacramentelle) devait être évitée avec les prêtres et les évêques appartenant à l’Association patriotique, la Directive en huit points reconnaissait la validité des sacrements administrés par ces évêques et ces prêtres pourvu qu’ils aient été ordonnés par un évêque inscrit dans la succession apostolique.
Pour Anthony Lam Sui-ki, chercheur au Centre d’études du Saint-Esprit, à Hongkong, et auteur de The Catholic Church in Present-Day China Through Darkness and Light, paru en 1994, la difficulté, à propos de ces facultés et directives, tenait au fait qu’elles n’étaient pas nécessairement connues de toute l’Eglise de Chine ; de même, lorsque le Saint-Siège les a suspendues, à la fin des années 1990, de la même façon, cela ne s’est pas su partout. « Cela a été un facteur de confusion et, au sein du clergé et de l’épiscopat, différentes personnes ont adopté différentes positions, en s’appuyant sur ces directives et facultés », explique le chercheur, qui estime que la lettre du pape Benoît XVI porte en elle le potentiel pour aider à l’unité de l’Eglise en Chine.