Eglises d'Asie

Le gouvernement fédéral provoque une controverse au sujet de l’utilisation du mot « Allah » dans l’hebdomadaire de l’archidiocèse de Kuala Lumpur

Publié le 18/03/2010




En demandant au Herald – The Catholic Weekly, l’hebdomadaire de l’archidiocèse catholique de Kuala Lumpur, de ne plus utiliser le terme « Allah » dans ses colonnes sous peine de voir annuler son autorisation de publication, le ministère de la Sécurité intérieure a provoqué une controverse dans le pays. L’initiative du gouvernement fédéral a soulevé les vives protestations des milieux chrétiens, avant que l’affaire ne retombe lorsque ce même ministère de la Sécurité intérieure a adressé un courrier aux responsables du Herald pour les informer du renouvellement – sans condition – de leur autorisation de publication.

En demandant au Herald – The Catholic Weekly, l’hebdomadaire de l’archidiocèse catholique de Kuala Lumpur, de ne plus utiliser le terme « Allah » dans ses colonnes sous peine de voir annuler son autorisation de publication, le ministère de la Sécurité intérieure a provoqué une controverse dans le pays. L’initiative du gouvernement fédéral a soulevé les vives protestations des milieux chrétiens, avant que l’affaire ne retombe lorsque ce même ministère de la Sécurité intérieure a adressé un courrier aux responsables du Herald pour les informer du renouvellement – sans condition – de leur autorisation de publication.

 

La controverse s’inscrit dans un contexte déjà ancien où, depuis de nombreuses années (1), un certain nombre de groupes musulmans protestent contre l’utilisation de la langue nationale, le Bahasa Melayu, par les chrétiens dans leur liturgie et leurs publications. Est notamment visée l’utilisation dans les publications – journaux, catéchisme et Bible – et dans la liturgie des mots Allah pour Dieu, solat pour prière, Kaabah pour espace sacré ou encore baitullah pour la maison de Dieu. En plusieurs occasions, ces dernières années, les autorités fédérales ont fait leur cette position et interdit diverses publications et livres chrétiens (2).

 

La polémique a rebondi lorsque, ces derniers mois, le Bureau de contrôle des publications – instance rattachée au ministère fédéral de la Sécurité intérieure – a multiplié les mises en garde envers le Herald pour lui signifier que son autorisation de publication ne serait pas renouvelée en 2008 si les rédacteurs ne se pliaient pas à ses demandes (3). Le 17 décembre, les choses se sont précisées lorsque le directeur de la publication de l’hebdomadaire catholique a reçu une lettre du ministère, datée du 10 décembre, pour l’informer qu’à compter du 1er janvier 2008, la section du journal rédigée en malais serait interdite, sauf à ne plus utiliser le terme Allah. Imprimé à 12 000 exemplaires, le Herald, qui compte quatre sections, en anglais, en malais, en mandarin et en tamoul, est le principal journal de la communauté catholique de la Fédération de Malaisie, où les catholiques sont environ 900 000.

 

Immédiatement, le rédacteur en chef du Herald, le P. Lawrence Andrew, a réagi, attirant l’attention de la presse internationale, la BBC et l’International Herald Tribune notamment, pour exprimer le point de vue des catholiques sur ces questions lexicales. Il a ainsi fait valoir que le mot Allah était utilisé par les chrétiens de langue arabe pour désigner Dieu bien avant l’apparition de la religion musulmane et qu’à ce titre, l’usage de ce mot ne pouvait être réservé aux seuls musulmans. Les catholiques de Malaisie ne cherchent absolument pas à offenser – et encore moins à convertir – les musulmans de Malaisie en utilisant ce mot dans la Bible en malais et dans leur liturgie, expliquant que le mot Allah est utilisé depuis des générations par les chrétiens en Malaisie.

 

La controverse est finalement retombée lorsque, le 30 décembre, le ministère de la Sécurité intérieure a fait parvenir au rédacteur en chef du Herald une lettre en date du 28 décembre pour lui signifier le renouvellement pour 2008 de son autorisation de publication. « Aucune condition n’est mentionnée, y compris pour notre section en malais. Il n’est pas fait mention de cette interdiction d’utiliser le mot Allah », s’est réjoui le P. Andrew, qui a toutefois précisé que le journal allait saisir la Haute Cour de Kuala Lumpur pour confirmer par une décision de justice cette mesure administrative.

 

Dans l’Etat de Sabah, sur l’île de Bornéo, l’une des principales Eglises protestantes locales, Sidang Injil Borneo, a également décidé de saisir la justice pour qu’elle se prononce sur la légalité de l’utilisation du mot Allah dans les textes en malais, la Bible notamment, écrits à l’usage des non-musulmans.

 

Selon les commentateurs politiques en Malaisie, cette controverse autour du nom d’Allah n’a pas été lancée par hasard ou par erreur par le gouvernement. Bien qu’impopulaire auprès des minorités non musulmanes – les dirigeants de la communauté sikh ont apporté leur soutien aux catholiques dans cette affaire – (4), elle sert au gouvernement à donner des gages à une partie de l’électorat musulman à un moment où la popularité du Premier ministre Abdullah Badawi n’est pas au plus haut. Les élections générales devraient avoir lieu en 2008.