Eglises d'Asie

A Rome, une réunion a été consacrée à la Chine et, à Pékin, des débats ont eu lieu quant à l’urgence d’une ouverture politique du régime, notamment dans le domaine religieux

Publié le 18/03/2010




Annoncée le 2 mars par le South China Morning Post, confirmée officiellement le 8 mars par le Vatican, une réunion à haut niveau s’est tenue à Rome du 10 au 12 mars 2008 au sujet de la Chine. Si les responsables de l’Eglise catholique cherchent à analyser les réactions à la lettre écrite par Benoît XVI aux catholiques de Chine, des signes indiquent qu’à Pékin, certains cercles proches des hautes sphères du régime chinois réfléchissent à l’urgence d’une ouverture politique, notamment dans le domaine religieux.

Aucun évêque de Chine continentale n’a bien entendu fait le déplacement jusqu’à Rome pour participer à la réunion des 10, 11 et 12 mars. Mais cinq évêques chinois – dont deux cardinaux –, venus de Hongkong, Macao et Taiwan (1), y ont pris part. La commission que le pape Benoît XVI a instituée en janvier 2007 afin d’« étudier les questions les plus importantes concernant la vie de l’Eglise en Chine » a réuni, cette fois-ci, quelque 30 personnes. Outre les principaux responsables du Saint-Siège et les membres de la curie qui suivent le dossier chinois (2), des représentants de congrégations religieuses et de sociétés missionnaires ayant une relation spéciale avec la Chine ont participé aux travaux de la commission.

 

Au lendemain de la fin de la réunion, le Saint-Siège a publié un communiqué indiquant que l’objet de la rencontre avait été l’étude des réactions en Chine et hors de Chine à la lettre adressée par le pape aux catholiques chinois, le 30 juin 2007. Les échanges ont porté « sur les principes théologiques » qui inspirent cette lettre, de façon « à envisager les développements au sein de la communauté catholique ». Ils ont gardé un tour plus pastoral que politique, les membres de la commission évoquant l’évangélisation à l’heure de la mondialisation et l’application des enseignements de Vatican II dans l’Eglise en Chine aujourd’hui ; la question de la réconciliation et du pardon au sein des communautés catholiques a aussi été évoquée, de même que le mode de gouvernement des diocèses et ses implications dans l’activité pastorale et la formation du clergé et du laïcat. Sur le plan politique, la volonté de l’Eglise de mener « un dialogue respectueux et constructif » avec les autorités chinoises a été réitérée. Lorsque Benoît XVI a reçu les membres de la commission à l’issue de ces trois jours de réunion, il a notamment mentionné la Journée mondiale de prière pour l’Eglise en Chine, qui aura lieu le 24 mai prochain et qu’il a lui-même institué dans sa lettre du 30 juin dernier. Sans doute a-t-il été rappelé à cette occasion que le cardinal de Hongkong avait annoncé dès l’été dernier qu’il souhaitait se rendre en pèlerinage, à cette date du 24 mai, au sanctuaire marial de Sheshan, près de Shanghai, en compagnie d’un millier de catholiques hongkongais, mais qu’il avait appris depuis que les autorités chinoises ne tenaient pas à sa présence ce jour-là à Sheshan.

 

Quelques jours plus tôt, à Pékin, s’ouvrait la onzième session de la Conférence consultative politique du peuple chinois, qui tient lieu de seconde chambre du Parlement chinois. Dans son discours d’ouverture, Jia Qinglin, président de cette assemblée, a insisté sur l’importance du rôle que les religions peuvent jouer afin de « promouvoir l’harmonie sociale ». Il a aussi souligné la nécessité pour le gouvernement de « guider » les responsables religieux et les croyants. Pour les observateurs, l’appareil dirigeant chinois réaffirme là ce qu’il dit depuis de nombreuses années, à savoir que les religions ont leur utilité pour maintenir la stabilité de la société chinoise mais que le rôle directeur du gouvernement et du Parti sur les religions ne doit pas être abandonné (3).

 

Plus intéressant semble être un rapport confidentiel de plus de 300 pages élaboré de l’Ecole centrale du Parti communiste chinois. Préparé pour le 17ème congrès du Parti, qui s’est tenu au mois d’octobre dernier, ce texte alerte le pouvoir sur les risques liés à l’absence de réformes politiques sérieuses. Il préconise un plan d’action de réformes politiques, une libéralisation progressive – sur douze ans – de la presse, un renforcement des droits des citoyens et des députés, ainsi qu’un renforcement de la liberté de culte. Peu de détails ont filtré quant à cette dernière mesure, mais il est significatif sans doute que, lorsque certains cercles proches du pouvoir chinois réfléchissent à une évolution politique du système en place, ils le fassent en incluant la liberté de culte. Selon Question Chine, le site spécialisé sur la Chine qui rapporte cette information, il est trop tôt pour savoir si ce rapport est un ballon d’essai lancé par quelques factions réformatrices ou au contraire un écran de fumée créé pour laisser accroire à une dynamique réformatrice au sein des hautes sphères dirigeantes. La nouvelle de l’existence de ce rapport confidentiel a fuité via l’agence Reuters.