Eglises d'Asie

Supplément EDA 3/2008 : Le parcours douloureux de la flamme olympique

Publié le 18/03/2010




Lors de la fête de Pâques, les chrétiens du monde entier se sont assemblés autour du cierge pascal pour célébrer la résurrection du Christ et la vie nouvelle qu’il apporte au monde. A la même heure, la flamme des exploits sportifs était allumée à Olympie par une prêtresse d’Apollon symbolisant le lever d’un soleil nouveau sur l’humanité en progrès. Cette flamme née de la Grèce antique allait parcourir le monde pour rayonner sur la Chine d’aujourd’hui, un vaste pays pressé de tenir sa place parmi les nations développées.

Mais, dès l’ouverture de ce rituel sacré, trois membres de Reporters sans frontières se sont précipités aux côtés du représentant de la Chine pour faire valoir les droits de l’homme que ce pays ne respecte pas encore. Emergeant à peine d’un long passé de bureaucratie impériale suivie de près par une dictature du Parti communiste, la Chine se présente encore comme un bloc compact et secret abrité derrière la grande muraille de son système policier et le mur de feu encerclant son réseau Internet. L’économie de la Chine progresse à pas de géants, mais sa vie politique évolue peu au goût des Occidentaux. Le plus grand défi des Jeux olympiques est celui des médias. La Chine se trouve soudain exposée à l’armée internationale des journalistes. Tout au long des 137 000 km de son parcours à travers le monde, la flamme olympique éveille le ressentiment des pays inquiets de cette grande puissance émergeante et oublieux des humiliations qu’ils lui ont fait subir lors des guerres coloniales du XIXème siècle. L’anniversaire du soulèvement tibétain de 1959 a sonné un premier coup de glas. Il peut être suivi de récriminations de la part des mouvements indépendantistes ouighours en Asie centrale. Les membres opprimés du Falungong peuvent aussi entrer en lice. Les récriminations se multiplient, justifiées ou injustifiées. Et la Chine ne sait pas comment y répondre sans se mettre en position de faiblesse. Elle pourrait faire valoir des arguments acceptables, mais elle est encore novice dans ce genre de dialogue. Du côté de ses détracteurs, bien des jugements de valeur gagneraient à être étayés par une connaissance objective de la Chine, de son histoire et des courants culturels qui la traversent.

 

Le Tibet est devenu le grand cheval de Troie d’où le flot des journalistes fait irruption sur la scène olympique. Les manifestations des lamas et des jeunes Tibétains grandis en exil interviennent au moment le plus susceptible de mettre le gouvernement chinois en difficulté. Quelle que soit leur connaissance du Tibet et des Tibétains et la longue histoire de leurs relations avec la Chine, les partisans de la démocratie, des droits de l’homme et de la liberté d’expression utilisent cette machine de guerre. Ont-ils analysé les motivations des manifestants tibétains ? Sont-elles d’ordre culturel ou économique ? A qui profitent-elles ?

 

Les responsables chinois répondent avec la langue de bois qui leur est habituelle et ne craignent pas d’agiter le spectre d’une répression sévère. Ils manipulent le mensonge tout en dénonçant le mensonge des reportages étrangers. Reprenant le jargon de la Révolution culturelle, ils blâment inlassablement « la clique du dalaï lama ». Ils savent pourtant que celui-ci est débordé par les violents qui veulent l’indépendance totale du Tibet. Pour sa part, le dalaï lama reste modéré. Il ne demande que le respect des accords de 1951 suivant lesquels la Chine doit assurer la défense et la prospérité du Tibet tout en assurant son autonomie religieuse et culturelle. La répression du mouvement d’indépendance de 1959 l’a forcé à s’exiler au nord de l’Inde. Mais il demeure partisan d’un dialogue avec les autorités chinoises. Le gouvernement chinois a peut-être eu tord de ne pas lui offrir une rencontre avant le déclenchement des violences.

 

Les chrétiens, pour leur part, ont aussi beaucoup souffert de la répression politique en Chine. Mais ils ne veulent exercer aucun chantage contre leur gouvernement à l’occasion des Jeux olympiques. Le pape lui-même recommande seulement l’arrêt des violences et la recherche de solutions pacifiques. De cœur sans doute avec le dalaï lama, il demande seulement plus de liberté religieuse au service de la paix.

 

Champs libres – Zhonglian Chine La vie de l’Eglise dans la province de Canton  Canton, base de pénétration occidentale en Chine 

C’est au cours du VIIème siècle que les premiers navigateurs occidentaux connus ont atteint la Chine par voie de mer. C’étaient des musulmans. Ils se sont implantés sur les rives de la Rivière des perles. La grande mosquée actuelle du Huaishengsi (‘le sanctuaire’) avec sa haute tour ronde témoigne du passé lointain de la communauté musulmane en Chine. Ces marchands musulmans n’étaient pas particulièrement prosélytes, mais ils formaient une solide poche ethnique fidèle au culte du Dieu unique. Les Chinois respectaient leurs coutumes, y compris leurs interdits alimentaires. Marco Polo est sans doute passé par Canton au XIIIème siècle. Vers 1323, le fameux voyageur franciscain, Odoric de Pordenone, visite à son tour Guangzhou (Canton), qu’il appelle alors Chin-Kalan, c’est-à-dire « Grande Chine » (Mahachin). Mais le port d’attache des franciscains est plutôt Quanzhou (appelé alors Zaitoun), sur les côtes du Fujian. Leur communauté alors florissante sous domination mongole dépérit ensuite sous la nouvelle dynastie chinoise des Ming. Les routes maritimes et terrestres de l’Occident sont contrôlées par les musulmans.

 Les « Folangkis » portugais 

Il faut attendre le XVIème siècle pour que les navigateurs portugais apparaissent dans la région, après s’être assurés des bases à Goa, en Inde, et à Malacca, sur les détroits qui séparent la péninsule malaise de l’île de Sumatra. En 1521, une première expédition portugaise est entrée à Canton grâce à un « capitan » chinois de Malacca. Ils sont retenus un an auprès du fonctionnaire chinois Gu Yingxiang. Celui-ci remarque la grossièreté de leur comportement et leur intérêt pour les « écritures bouddhistes ». Il s’agit en fait des écritures chrétiennes, car tout ce qui vient de l’Inde est alors considéré comme bouddhiste. En 1552, François Xavier projette de se rendre à Canton. Mais les Portugais ne veulent pas d’ennui supplémentaire dans leurs relations difficiles avec les autorités chinoises. Ils déposent François dans la petite île de Sancian, à proximité de l’embouchure de la Rivière des perles. C’est là qu’il meurt le 3 décembre, en attendant vainement une jonque chinoise. En 1555, le provincial jésuite Melchior Nunez Barreto passe deux mois à Canton pour tenter d’y faire libérer six prisonniers chrétiens, dont trois Portugais. La même année, le dominicain portugais Gaspard de la Croix prêche l’Evangile à Canton pendant plusieurs mois. Sa prédication, puissante, est fort peu comprise. Elle fait même scandale lorsqu’il se permet de renverser une statue. Il doit rapidement quitter le pays. Les Portugais fondent une place forte à Macao, d’où ils peuvent assurer des échanges commerciaux avec Canton. Un évêché est créé à Macao en 1557. Depuis la fin du siècle précédent, le pape a confié aux Portugais le padroado, c’est-à-dire un « parrainage » des missions catholiques sur toutes les terres découvertes à l’est de l’Europe chrétienne. Macao devient ainsi le tremplin de nombreuses missions sur le continent chinois. Les jésuites en particulier y bâtissent leur séminaire de formation missionnaire pour le Japon et la Chine. La façade imposante du séminaire Saint-Paul s’élève encore aujourd’hui au sommet d’un grand escalier.

 La première implantation jésuite en Chine : deux bonzes italiens 

C’est à Macao que Matteo Ricci et son confrère jésuite Michel Ruggieri se mettent à une étude sérieuse du chinois, vers 1580. Ils tentent une première expédition dans la province de Canton en 1582 et obtiennent la permission d’y résider en 1583. Le gouverneur des deux provinces du Guangdong (‘le grand est’) et du Guangxi (‘le grand ouest’) les accueille dans sa capitale de Zhaoqing, à environ 100 km à l’ouest de Canton. Ils sont reçus en tant que moines bouddhistes. Ils ont le crâne rasé et portent la toge (kasha). Mais le gardien de leur résidence comprend si bien leur enseignement qu’il élève un autel en l’honneur de Tianzhu, « le maître du ciel ». Ce nom sera finalement adopté pour signifier Dieu chez les catholiques chinois. Car les Chinois honoraient le Ciel, la loi du ciel assurant l’harmonie terre-ciel. Mais les jésuites leur font découvrir le créateur du ciel et de la terre, la véritable origine, qu’il faut aimer par-dessus tout.

 

Le culte du maître du ciel éliminant toute superstition, les statues bouddhiques sont considérées comme des idoles. Les bouddhistes cantonais en prennent vite conscience et font tout pour écarter les faux bonzes. Les deux jésuites se réfugient à Shaoguan, quelque 200 km au nord de Canton. En arrivant dans cette nouvelle localité, ils font tout de même un pèlerinage au célèbre temple de la Fleur du Sud, le Nanhuasi. Mais Matteo Ricci se laisse séduire par l’intelligence d’un disciple confucéen qui comprend bien son enseignement chrétien. Il choisit de changer de peau, défroque la kasha bouddhique et revêt la tenue des lettrés confucéens. Michel Ruggieri aurait plutôt choisi d’emprunter la voie bouddhique pour annoncer l’Evangile, mais il est envoyé à Rome en 1588. En choisissant la voie confucéenne, Ricci obtient le soutien de grands lettrés, qui voient dans l’enseignement catholique un renforcement du fondement moral de la tradition confucéenne et un moyen d’œuvrer à la réforme d’une administration impériale corrompue. Une première mouture de catholicisme chinois prend ainsi naissance. Mais le confucianisme est aussi susceptible de fermeture conservatrice. Les jésuites sont bientôt accusés de ruiner le rituel traditionnel. La construction d’une grande église à Nankin, en 1611, entraîne le mécontentement des bouddhistes. Le fonctionnaire du Bureau des rites, Shen Que, porte ses plaintes à l’empereur. Une première persécution est déclenchée contre les jésuites en 1616. Canton voit ainsi passer les premiers missionnaires prisonniers sur le chemin de leur exil à Macao.

 Le débat inter-instituts sur les rites confucéens  Au milieu du XVIIème siècle, un Chinois converti à l’islam, Yang Guangxian (1597-1669), jaloux du statut acquis par les jésuites au Bureau d’astronomie, s’indigne des interdits catholiques frappant la pratique des rites traditionnels confucéens. Il accumule les griefs contre le christianisme et obtient, en 1665, la proscription de tous les missionnaires étrangers. La plupart sont emmenés à Canton où une vingtaine d’entre eux se trouvent sous le même toit pendant deux ans. 

Jésuites, dominicains et franciscains, si différents de par leurs nationalités et leurs filières de formation, ont enfin l’occasion d’échanger des expériences faites aux quatre coins de la Chine. Partageant le même triste sort, ils peuvent réfléchir à leurs méthodes d’apostolat et en particulier tenter de définir une position commune sur la question des rites chinois. Après une quarantaine de discussions étalées sur les années 1667-1668, ils se mettent d’accord sur 42 articles plutôt favorables à une attitude de tolérance. Malheureusement, cet accord est de courte durée. En 1704, Rome interdit nettement aux convertis chinois la pratique des rites confucéens en l’honneur des ancêtres. Canton voit passer un nouveau flot d’exilés, à commencer par le légat du pape, Mgr Charles de Tournon, qui va terminer à Macao les dernières années de sa vie. Il y reçoit le chapeau de cardinal et aide à la formation du séminariste André Li, qu’il fait admettre à la tonsure. Le jeune André Li arrivait du Sichuan avec deux pères des Missions Etrangères. L’un d’eux, Jean Basset, actif promoteur de la Bible et d’une liturgie chinoise, venait de mourir subitement à Canton, en décembre 1707 (1). Quelques années auparavant, en avril 1685, le premier évêque chinois, Grégoire Luo, avait pu être consacré à Canton par l’évêque franciscain Mgr Della Chiesa. La cause de la formation d’un clergé chinois fait ainsi sa percée avec le soutien particulier des vicaires apostoliques des Missions Etrangères de Paris.

 La Guerre de l’opium et le bombardement de Canton (1840) 

Aux XVIIème et XVIIIème siècles, les Occidentaux étaient blâmés par les Chinois pour leurs mauvaises manières. Leur religion était bannie comme culte pervers contraire au principe sacré de la piété filiale. La foi chrétienne faisait pourtant son chemin parmi les paysans pauvres de provinces reculées. Au XIXème siècle, l’Europe de la révolution industrielle et du progrès technique voit naître une nouvelle race d’Occidentaux conscients de posséder tous les secrets du progrès scientifique, de la fortune et de la civilisation. Les beaux messieurs et les belles dames qui accostent sur les rives de la Rivière des perles affichent leur mépris des Chinois qu’ils considèrent comme des menteurs et des malpropres. Ils leur vendent leur opium produit en Inde contre un commerce lucratif de thé et de porcelaine qu’ils appellent dans leur langue « china ». Ce sont des chrétiens, en majorité protestants. Leur religion devient ainsi littéralement un « opium du peuple », comme le dénoncera Karl Marx. L’empereur de Chine envoie à Canton un gouverneur intègre et efficace, Lin Zexu. Rejetant tout compromis, Lin Zexu fait jeter au fleuve toute la cargaison d’opium entreposée dans le port. Les Anglais se retirent, mais ils reviennent quelques mois plus tard sur des navires de guerre. Ils bombardent Canton et d’autres ports. Le Traité de Nankin en 1842 impose à la Chine l’ouverture de ses ports au commerce et la cession à l’Angleterre du territoire de Hongkong. Hongkong prend peu à peu la relève de Macao comme base d’entreprises missionnaires protestantes et catholiques. Les Missions Etrangères de Paris y installent plus tard leur procure, leur imprimerie de Nazareth et le sanatorium de Béthanie pour les missionnaires de Chine malades ou fatigués. Le diocèse catholique de Hongkong inclut toute une partie de la côte chinoise. Un séminaire pour la Chine du sud est ouvert en 1931 sur la presqu’île d’Aberdeen.

 La flamme révolutionnaire cantonaise, de Hong Xiuquan à Sun Yatsen La Société biblique américaine répand les Ecritures parmi les Chinois. En 1833 et 1834, le converti Liang Afa est employé par le Bureau de presse américain à Canton. Cet évangéliste a été formé à la London Missionary Society auprès du professeur écossais William Milne et de l’imprimeur Henri Medhurst. A Canton, il distribue tracts et livrets aux étudiants qui viennent passer les examens provinciaux. L’un de ces livrets, intitulé Exhortations pour notre temps (Quan shi liang yan), va bouleverser l’esprit du futur chef de la révolte des Taiping, le hakka Hong Xiuquan. Hong Xiuquan avait eu la vision d’un vieillard l’engageant à détruire les démons. Il trouve dans la Bible une explication saisissante de ses rêves et une confirmation de sa mission : Dieu le Père et Jésus le grand frère l’engagent à détruire les idoles. Une secte se forme dans la province du Guangxi sous le nom de « Société des adorateurs de Shangdi », nom choisi par les protestants pour désigner Dieu. Son chef charismatique, Feng Yunshan, s’inspire à la fois des écrits bibliques et des traditions taoïstes. En 1850, la Société des adorateurs de Shangdi devient une bande subversive qui a pour objectif de renverser le pouvoir mandchou pour établir un ordre nouveau : le Royaume céleste de la Grande Paix (Taiping Tianguo). 

Sun Yat-sen est né en 1866 dans le village de Cuiheng, proche de la ville de Zhongshan, au sud de Canton. Il fait ses études secondaires dans une école missionnaire de Honolulu où il se convertit au christianisme puis il s’inscrit à la Queen’s University (18841882) de Hongkong. Il obtient finalement un diplôme de médecine à l’université de médecine pour les Chinois de Hongkong. Mais l’histoire des soulèvements paysans chinois et le souvenir des révolutionnaires Taiping le passionnent. Familier des sociétés secrètes fidèles aux Ming, il veut renverser le régime féodal mandchou. En octobre 1894, il fonde le Xingzhonghui, la « Société pour le redressement de la Chine ». Après l’échec d’une première insurrection à Canton en 1895, il va porter la flamme de la révolution chez les Chinois d’outre-mer et fait appel à leur soutien financier. Au Japon, en 1905, il fonde une ligue d’union des révolutionnaires chinois, le Tongmenghui. Il en exprime ainsi le programme : « Chasser les étrangers, restaurer la Chine, fonder une république et redistribuer équitablement les terres ». Une série de soulèvements à Canton entraîne le martyre de nombreux jeunes révolutionnaires. Mais la révolte du 10 octobre 1911, à Wuchang, provoque finalement la chute du régime impérial. Début 1912, Sun Yat-sen proclame la République.

 L’activité missionnaire dans la province de Canton 

Au début du XVIIème siècle, la communauté jésuite de Shaoguan est dirigée jusqu’en 1609 par le P. Nicolas Longobardi. Ricci l’appelle alors à Pékin et lui confie la direction de la mission en Chine. Les travaux de Longobardi sur la théologie naturelle des Chinois tendent à souligner combien elle diffère de la conception chrétienne du Dieu transcendant. Divers instituts religieux et missionnaires prennent pied dans la province de Canton : dominicains, franciscains, augustins. D’après Adrien Launay, en 1704, on compte sept églises ou oratoires dans la ville de Canton. Avec le développement plus organisé de la hiérarchie locale, la province devient le champ d’action de deux juridictions parallèles : l’évêché de Macao, solidement établi, avec autorité sur une vaste portion de la province de Canton, et, d’autre part, les vicaires apostoliques de la Société des Missions Etrangères de Paris. Le 11 mai 1848, Rome confie les deux provinces du Guangdong et du Guangxi à la Société des Missions Etrangères. L’autorité pastorale sur ces deux provinces devient plus clairement confiée aux Missions Etrangères avec la consécration épiscopale de Mgr Guillemin par le pape Pie IX, le 25 janvier 1857. Ces événements font suite au massacre du P. Auguste Chapdelaine dans la province du Guangxi. L’empereur Napoléon III y a puisé un argument pour s’engager auprès des troupes anglaises dans une seconde guerre de l’opium. Au printemps 1857, il accorde une audience à Mgr Guillemin et lui promet une somme de 300 000 francs pour la construction d’une grande cathédrale à Canton. En pleine période coloniale, les Occidentaux se croient tout permis. Les Traités de Tianjin en 1858, puis de Pékin en 1860, accordent de nouveaux droits de propriété aux missions. La construction de la cathédrale commence en 1863, en plein centre ville. Bâti sur le modèle de l’église Sainte-Clotilde à Paris, l’édifice a fière allure. Ebranlée au cours de la deuxième guerre mondiale sous les bombardements japonais, puis ravagée par les Gardes rouges pendant la Révolution culturelle, la grande « maison de pierre » a été rénovée en 2007. L’édifice gothique appartient désormais au patrimoine culturel de Canton et la municipalité en a financé les travaux. Le 4 décembre 2007, un jeune évêque chinois, le P. Gan Junqiu, a été sacré nouvel évêque de Guangzhou dans cet édifice prestigieux.

 Victimes des révolutionnaires communistes 

En décembre 1928, la Commune de Canton est écrasée par les troupes du Kouomintang. L’armée rouge en déroute se replie à l’est, où elle se mêle aux unions paysannes formées par le chef communiste Peng Bai, depuis cinq ans. La Commune de Haifeng est devenue le premier soviet chinois. Les chrétientés de la région sont mises à feu et à sang. Trois chrétiens sont massacrés dans l’église de Lufeng, quatre centres catholiques sont incendiés dans la région. Le village de Péné (Baileng) est farouchement attaqué, ses 1 000 fidèles dispersés, cinq d’entre eux sont tués. Le marché voisin de Kuêtam (Kuitam) subit le même sort : église, résidence, écoles disparaissent sous les flammes ; les 600 chrétiens du village se replient sur Hopo et Swatow (Shantou). Mille trois cents réfugiés catholiques de langue teochew (Chaozhou) s’embarquent pour Singapour, Saigon et Bangkok.

 

Après l’établissement du régime communiste, le 1er octobre 1949, le gouvernement de Pékin vise à assurer pleinement sa nouvelle indépendance en luttant contre toutes les séquelles de « l’impérialisme étranger ». Comme dans les autres régions de Chine, tous les missionnaires étrangers, évêques, prêtres et religieuses sont expulsés de la province de Canton, entre 1950 et 1953. A Canton, l’administrateur apostolique, Mgr Deswazières, nommé à ce poste en 1947 à la suite du départ de Mgr Fourquet, donne sa démission en 1950. Le jésuite Dominique Tang reçoit en novembre 1950 une lettre de l’internonce, Mgr Riberi, lui indiquant que le pape lui confie le soin de l’archidiocèse. Il est sacré le 13 février 1951 par Mgr Deswazières dans la chapelle du premier étage de l’évêché. Il doit bientôt faire face à d’énormes difficultés financières car le nouveau régime impose de lourdes taxes à l’Eglise. Il voit partir le reste des missionnaires. La Légion de Marie est sévèrement condamnée. Le Mouvement patriotique des Trois autonomies est lancé dans le diocèse. En 1957, la campagne anti-droitière s’en prend plus directement à son évêché. Des haut-parleurs hurlent : « Tang Yee-ming, repens-toi vite ! » et des affiches collées partout le dénoncent ainsi : « Tang Yee-ming, le chien-courant le plus dévoué du Vatican réactionnaire ». Il est finalement arrêté le 5 février 1958 et va passer de longues années en prison. Il en décrit toutes les épreuves dans ses Mémoires publiées sous le titre « Comme ses voies sont insondables ». Il sort de prison le 9 juin 1980. D’abord écarté de sa charge épiscopale, il est finalement autorisé à être évêque. Mais, atteint d’un cancer au rectum, on l’autorise à aller se faire soigner à Hongkong. Il se rend en visite à Rome et le pape lui confère le titre d’archevêque, auquel il a droit, puisque Canton est à la tête d’une province ecclésiastique depuis 1946. La réaction du gouvernement chinoise est une bordée d’injures envers le pape, qui, dit-on, s’ingère indûment dans les affaires intérieures chinoises.

 Ferment chrétien dans la diaspora cantonaise 

Exilés de Chine, les catholiques rejoignent les migrants chinois qui s’éloignent de leur région surpeuplée pour gagner leur vie dans les pays d’Asie du Sud-Est, voire même en Amérique et en Australie. Quittant le pays dans des conditions très pénibles, souvent à fond de cale de cargos, ils rêvent de faire fortune et d’enrichir leur famille. Ils ont entendu parler des mines d’or de Californie puis des mines d’or de Melbourne. Du coup, San Francisco devient connu sous le nom de Jiujinshan (‘la vieille montagne d’or’) et Melbourne sous le nom de Xinjinshan (‘la nouvelle montagne d’or’). En réalité, tous ces émigrés, habitués à la dure, vont être employés comme manœuvres (ku li) dans les plantations et mines d’étain de Malaisie ou à la construction du chemin de fer trans-américain. Mais nombre d’entre eux ayant le sens du commerce, commenceront comme petits colporteurs, feront des économies, enverront leurs enfants à l’université et feront fortune à la troisième génération. Les Cantonais prospèrent dans de grandes villes du monde : Kuala Lumpur en Malaisie, Singapour, Cholon à Saigon, Sidney en Australie, Vancouver et Toronto au Canada, San Francisco, etc. Ils s’implantent dans les populations locales d’Indonésie, de Madagascar.

 

Les différences linguistiques et culturelles qui existent dans la province de Canton se retrouvent dans la diaspora car des regroupements se forment autour d’associations familiales et claniques, portant souvent le nom du canton d’origine. C’est ainsi que les Hakkas de Meixian se retrouvent à l’Ile Maurice. Un catéchiste, un prêtre et quelques catholiques se sont mêlés au flot des migrants. Vers 1950, les migrants hakka à Maurice construisent un temple en l’honneur du grand général Kuangkun, au visage rouge et à la barbe noire. Cinquante ans plus tard, la plupart sont devenus catholiques, même si certains gardent encore un petit autel de Kuangkun dans un coin de leur salon. A Madagascar, les migrants sont cantonais à la suite de la politique coloniale de Gallieni qui confia à des Cantonais le soin de veiller à l’ordre public parmi les Chinois. Du coup, ceux-ci exclurent les hakkas, qui durent s’installer à la Réunion.

 

Les Teochew, pour leur part, bénéficient aujourd’hui d’un véritable réseau mondial de prospérité, y compris à Paris, où les frères Tang sont des migrants teochew qui se sont d’abord installés au Laos, puis ont rejoint, en France, le flot des réfugiés d’Indochine de 1975. Les catholiques teochew, tout en restant souvent intégrés à leurs clans, forment en réalité un véritable clan catholique qui observe la règle du soutien mutuel. Ils prennent en charge la construction de leurs églises et soutiennent généreusement toutes les entreprises d’Eglise. Au début du XXème siècle, ceux de Bangkok ont envoyé une mission en Chine même et ont converti à la foi chrétienne quelques villages dont ils étaient originaires, du côté de Taiyong, dans les montagnes au nord de Hopo. Ceux de Singapour et de Malaisie ont construit une véritable cathédrale dans le village de Péné (Baileng), où vivent plus de 3 000 catholiques avec des familles nombreuses.

 

D’une manière générale, les Cantonais dispersés dans le monde ont contribué puissamment au progrès rapide de l’économie chinoise depuis la réforme de Deng Xiaoping et l’ouverture de zones économiques spéciales. Les Chinois d’Amérique ont ainsi financé le développement considérable de la ville de Sanhui (Xinhui), au sud de Foshan. Chez les Chinois d’outre-mer, la proportion de chrétiens est plus forte qu’en Chine, car beaucoup ont découvert l’évangile au contact de chrétiens étrangers. Les catholiques, pour leur part, ont reçu un soutien de Rome. Un visiteur apostolique des Chinois d’outre-mer a été nommé en 1953. Cette tâche de soutien pastoral a été confiée à l’évêque de Ningxia, exilé de Chine, le scheutiste belge Mgr Carlo Van Melkebecke. Celui-ci s’est installé à Singapour d’où il a pu rayonner dans le monde entier, au service de communautés catholiques chinoises dispersées dans une centaine de pays.

 

Il a pu dépêcher à leur service quelque 200 prêtres chinois, alors étudiants en Europe et en Amérique. Incapables de rentrer chez eux où le contrôle communiste était de plus en plus rigoureux, ils sont devenus missionnaires des communautés chinoises de la diaspora.

 

La plus forte concentration cantonaise aux portes de la Chine se trouvait bien sûr à Hongkong. L’Eglise y a été particulièrement active pour aider à accueillir le flot de réfugiés du continent, ouvrir de nombreuses écoles de mission. La population catholique y dépasse aujourd’hui les 250 000 sur plus de six millions d’habitants. Deux évêques de Hongkong sont devenus cardinaux, Mgr Jean-Baptiste Wu, un hakka de Meixian, et Mgr Joseph Zen, dont la famille est originaire de Shanghai. Des équipes missionnaires basées à Hongkong rayonnent sur le continent. Une commission spéciale se préoccupe également des migrations cantonaises dans le monde et dépêche, à l’occasion, des prêtres cantonais là où la demande est plus urgente.

 Vitalité et retrouvailles au XXIème siècle 

L’Eglise actuelle compte officiellement quatre diocèses dans la province de Canton :

 

Le diocèse de Guangzhou inclut la capitale elle-même et les municipalités de Qingyuan, Shaozhou, Huizhou, Shanwei et Heyuan. Le diocèse englobe ainsi Shaozhou, autrefois confié aux salésiens et la région maritime de Huizhou et Shanwei, autrefois partie du diocèse de Hongkong. Le diocèse compte environ 40 000 fidèles.

 

La nouvelle grande ville de Shenzhen, située près de la frontière entre Guangzhou et Hongkong, a joué un rôle de phare en tant que première zone économique spéciale, où a pu se manifester un surprenant dynamisme économique. La population vient de toute la Chine. L’Eglise est gérée par le diocèse de Pékin. La vaste église Saint-Antoine récemment bâtie est située au cœur de la cité.

 

De Shenzhen ou de Guangzhou, l’autoroute parcourt plus de 500 km vers l’est à travers des zones industrielles et de nouveaux chantiers de construction. C’est dans la partie est de la province que se trouvent les deux diocèses de Meizhou (Meixian) et de Shantou.

 

Meixian, autrefois confié aux missionnaires américains de Maryknoll, se situe dans la zone montagneuse intérieure, peuplée de Hakkas. Le jeune évêque, Mgr Liao Hongqing, a été consacré le 25 septembre 2003, dans une église à moitié remplie de policiers. Au cours de la cérémonie, il n’a pas pu annoncer sa nomination par le pape. Mais à la fin, il s’est adressé aux chrétiens en langue hakka et a pu leur expliquer dans cette langue non officielle qu’il était reconnu par Rome. Les chrétiens de ce diocèse sont viscéralement missionnaires. Ils ont converti les migrants de l’Ile Maurice et ont fourni à Hongkong son premier cardinal.

 

Shantou n’a cessé de croître en zone économique particulièrement dynamique. Le diocèse est peuplé de Teochews dans la région côtière et de Hakkas dans la partie montagneuse proche de Meixian. Les prêtres hakkas sont en fait plus nombreux que les prêtres teochews. Mais la petite équipe de jeunes prêtres teochews serre les rangs autour du curé de Shantou, le P. Huang Bingzhang, qui fait autorité, tant du point de vue pastoral que politique. Les divergences entre Hakkas et Teochews rendent difficile la consécration d’un nouvel évêque. L’évêque, Mgr Cai Tiyuan, décédé le 24 novembre 1997, n’a pas encore de successeur. Bien que dépourvu d’évêque, le diocèse fait preuve d’une grande vitalité. La grande cathédrale, bâtie en 2006, va se doubler en 2008 d’une vaste église de la Sainte Famille, construite 7 km plus à l’est, dans une zone en plein boom proche de l’aéroport. Les visiteurs étrangers peuvent facilement venir de Hongkong en une demi-heure d’avion ou en cinq heures d’autoroute. Ils sont royalement accueillis dans des églises qui débordent d’enfants et de jeunes, avec des fastes liturgiques oubliés en Occident.

 

Le diocèse de Jiangmen (Kongmoon) a perdu son vieil évêque le 4 janvier 2007. Mgr Paul Li Panshi était âgé de 95 ans. Restent au service de quelque 20 000 fidèles deux prêtres âgés et six prêtres plus jeunes. Le diocèse couvre une vaste région très peuplée au sud-ouest de la capitale, où se sont développées les villes très florissantes de Foshan, Jiangmen, Xinhui, Shunde, Zhongshan et Taishan. De Taishan, les pèlerins catholiques se rendent à l’île de Shangchuan (Sancian), où le sanctuaire à la mémoire de saint François Xavier a été restauré.

 

Le diocèse de Zhanjiang (Chamkong), à l’extrémité ouest de la province, faisait autrefois partie du diocèse de Pakhoi (Beihai), érigé en 1921, sous l’impulsion de Mgr Budes de Guébriant. Les Français ont connu cette région sous le nom de Fort Bayard. L’entreprise Total y a développé des forages off shore. Le territoire comprend la presqu’île de Leizhou d’où les ferries atteignent rapidement l’île de Hainan. L’église Saint-Victor demeure le centre de l’activité catholique avec le jeune évêque, Mgr Su Yongda. Les religieuses, venues en partie du village de La Trinité, riche en vocations, font connaître discrètement l’Evangile grâce à leurs témoignages de charité.

  pour un encadré Mgr Budes de Guébriant, vicaire apostolique de Canton (1917-1921) 

Sacré évêque le 29 novembre 1910 à Suifu (Yibin), Mgr de Guébriant installe son évêché à Ningyuan (Xichang). Nommé vicaire apostolique de Canton il doit quitter Ningyuan le 8 janvier 1917. A Canton, en à peine quatre ans, il travaille à diviser son immense vicariat. Il confie plusieurs parties de son diocèse à de nouveaux instituts missionnaires qui souhaitent ouvrir une mission en Chine. La région de Shiuchow (Shaozhou) au nord de Canton est confiée aux Salésiens. Deux de leurs missionnaires assassinés par les rouges dans cette région en 1930, Mgr Louis Versiglia et le jeune père Calliste Caravario, seront canonisés à Rome le 1er octobre 2000. Le grand centre de Kongmoon (Jiangmen) à l’ouest de Canton est transféré aux Missionnaires américains de Maryknoll. Les pères de Maryknoll hériteront plus tard d’un autre territoire des Missions étrangères dans la province de Canton: Kiating (Meixian), un rude pays montagneux peuplé de Hakkas.

  pour un encadré L’odyssée du P. René Sylvestre, MEP 

René Sylvestre est né le 25 mars 1916 aux Villards‑sur‑Thônes (Haute‑Savoie). Ce village est voisin du Villaret, pays du bienheureux Pierre Favre (1506-1546), condisciple de saint Ignace et saint François Xavier à l’Université de Paris et premier prêtre jésuite ordonné en 1534. René était fier de ce voisinage prestigieux et il aimait aller prier dans l’église du Villaret.

 

Ordonné prêtre des Missions Etrangères de Paris le 20 mars 1943, pendant la deuxième guerre mondiale, il doit attendre trois ans avant de partir en Asie. Il apprend à se dévouer au service des jeunes. Il part enfin pour la Chine le 23 mars 1946 et rejoint le diocèse de Swatow (Shantou), dirigé, depuis 1935, par Mgr Charles Vogel, MEP. Celui-ci l’envoie étudier la langue à Kityang (Jieyang) auprès du P. Charles Lecorre, un pasteur de grande expérience, aimé de tous les fidèles.

 

En janvier 1947, il est nommé curé de Sai‑Lo, à Chaoyang, et, dès le mois de juin suivant, vicaire à la cathédrale Saint‑Joseph de Swatow. Il en devient curé en janvier 1948. Il connaît les dures années d’après-guerre. Il doit même faire face à une année de famine où il souffre de voir les enfants affamés traîner dans les rues. Il y a bien l’école des ursulines mais limitée aux élèves qui peuvent payer. Avec une aide dévouée, René crée une école gratuite pour les enfants les plus pauvres et il leur fournit à manger. Il s’active en même temps à la paroisse et forme une chorale. Il fonce partout à moto et envisage la construction d’une nouvelle église. Mais il est dépassé par les événements. La main des nouveaux maîtres communistes ne tarde pas à s’abattre sur les missionnaires qui sont tous mis aux arrêts. René, étant plus populaire et plus actif, fait l’objet d’une attention particulière. Comme il tente d’échapper plusieurs fois à ses gardiens, il est roué de coups et soumis à un régime particulièrement sévère. Son calvaire dure ainsi d’avril 1951 à octobre 1952.

 

Il est alors expulsé vers Hongkong, où il reste jusqu’en 1960. Il parlera rarement de ces mois de souffrance et ne gardera qu’un souvenir enthousiaste de ses premières années en Chine. Lorsqu’il pourra y retourner, en 1986, il restera pourtant très prudemment au fond de l’église, jusqu’à ce qu’une amie ursuline le reconnaisse et lui ménage un accueil chaleureux.

 

A Hongkong, René demeure à la maison de repos de Béthanie, proche de la paroisse Notre-Dame de Lourdes, où vivent les ouvriers catholiques de l’imprimerie de Nazareth. Toujours soucieux de la formation chrétienne des enfants, il lance en chinois le « journal des cœurs vaillants », Lefengbao. Puis il devient supérieur de la maison de Béthanie, qui n’est pas précisément occupée par des jeunes.

 

Il est alors rappelé en France comme directeur du Service ‘Information ‑ Vocations’ des Missions Etrangères de janvier 1961 à octobre 1968. Sur la lancée, il devient le dé1égué national du Service missionnaire des jeunes aux OPM (1964‑1973). Puis il doit s’occuper à nouveau du personnel missionnaire plus âgé. Beaucoup d’anciens de Chine sont rentrés en France exercer un ministère. Ils vont être rejoints par un certain nombre de confrères expulsés des pays d’Indochine, en 1975. L’Assemblée générale MEP décide un service de la « diaspora » des MEP. René en est nommé le délégué pendant six ans.

 

Mais il ne perd jamais de vue les Chinois, qu’ils soient en France, en Chine, ou même au Canada. En 1982-83, il obtient une année sabbatique à Hongkong, où il se remet au cantonais. De retour en France, il exerce un ministère de plus en plus actif dans sa chère Savoie. Chaque année, il convie les prêtres de son secteur à un repas chinois au restaurant Le Pékin, à Annecy. Incardiné dans le diocèse d’Annecy en décembre 1995, il rêve toujours de la Chine et y entreprend au moins deux grands voyages en 1996 puis en 2005. Il organise cette dernière équipée en compagnie de prêtres et laïcs de Savoie. En allant de Pékin à la grande muraille, le groupe visite une fabrique de cloisonnés. René y achète une petite urne et la montre à tout venant en expliquant, le visage rayonnant, que c’est là l’urne funéraire destinée à ramener ses cendres en Chine.