Eglises d'Asie

Supplément EDA 5/2008 : Le point sur la vie politique et sociale du 1er août au 30 septembre 2008

Publié le 07/10/2011




 Vie politique

La vie politique du Cambodge des deux derniers mois s’inscrit dans le sillage des élections du 27 juillet 2008 qui a donné une large majorité au PPC (Parti du peuple cambodgien). Selon les résultats officiels publiés le 2 septembre, le PPC remporte 90 des 123 sièges de l’Assemblée nationale, le PSR (Parti de Sam Rainsy) 26, le PDH (Parti des droits de l’homme) 3, le PNR (Parti de Norodom Ranariddh) 2, et le FUNCINPEC (Front uni national pour un Cambodge indépendant, neutre, pacifique et coopératif, royaliste) 2. Ces élections ont été marquées par de très nombreuses irrégularités, en dépit de tous les satisfécits accordés par les observateurs internationaux.

Le front de l’opposition

* Dès le 28 juillet, les quatre principaux partis de l’opposition (PSR, PDH, Funcinpec et PNR) signent une déclaration commune refusant le résultat des élections, au vu des très nombreuses irrégularités qui ont entaché le vote, et assez naïvement, en appellent à la communauté internationale. Ils tentent de former une coalition anti-PPC à la future Assemblée. Mais dès le 31 juillet, le Funcinpec prend ses distances par rapport à cette coalition et accepte le résultat des urnes. Il est cependant trop tard, le PPC annonce que Kéo Puth Réasmey, secrétaire général du Funcinpec, va perdre son poste de Vice-Premier ministre pour avoir signé la déclaration commune, et que désormais il ne négociera qu’avec la partie du Funcinpec représentée par Nhiek Bun Chhay. Le PSR, le PDH et le PNR établissent un comité permanent. Le PSR demande officiellement au roi Sihamoni la grâce de Ranariddh, pour se concilier les grâces du PNR. Le 12 août, Ranariddh, conformément à son habitude, abandonne la coalition et reconnaît le résultat des élections, qui ont été, selon lui, « transparentes et libres » et invite le PPC à former rapidement son gouvernement. Le PNR change de porte-parole, qui annonce, le 1er septembre, que son parti désire rejoindre la coalition gouvernementale (PPC-Funcinpec).

* Les trois partis d’opposition menacent de boycotter la séance inaugurale du 24 septembre et la cérémonie de prestation de serment, ce qui bloquera la nouvelle législature. Le PSR demande au gouvernement d’attribuer certaines présidences de commissions parlementaires à l’opposition (il en détenait deux précédemment) : « Le gouvernement peut être dictatorial, l’Assemblée, non. » Le 1er août, Hun Sen, contrairement à la législation en vigueur, menace de répartir les 26 sièges du PSR et du PDH à d’autres députés en cas d’absence lors de la séance inaugurale. Sam Rainsy rétorque qu’il représente 1,7 million d’électeurs, soit le tiers de l’électorat, que le PPC n’a pas le droit de mépriser.

Examen des Plaintes

* Les observateurs internationaux estiment le climat plus pacifique que lors des principales élections. La mission européenne fait toutefois remarquer que « l’utilisation à grande échelle des ressources de l’Etat par le PPC, les distributions d’argent et de dons, les nombreuses défections au profit du PPC, les informations inexactes au sujet du vote, la couverture médiatique du PPC… à un degré incompatible avec les standards de liberté et d’égalité d’accès aux médias ». Le 12 août, le CNE, dans un rapport de neuf pages, critique ces remarques de la Commission européenne. La Commission confirme son rapport le 14 octobre.

* Le 31 juillet, le PSR organise un meeting de protestation qui ne recueille que 600 personnes. Les trois partis d’opposition (PSR, PDH et PNR) tentent en vain de former une union.

* Le 1er août, l’ambassade des Etats-Unis au Cambodge déclare que, même s’il y a eu des irrégularités, elles ne changent pas fondamentalement la volonté du peuple cambodgien. Selon l’ambassade, seulement 57 000 personnes auraient été rayées des listes. Cependant, le communiqué critique le monopole du PPC sur les médias durant la campagne. Le PSR, quant à lui, estime ces chiffres largement sous-estimés : « Selon le CNE, 2,25 millions de gens n’ont pas pu voter. » Mme Mu Sochua, secrétaire générale du PSR, estime le nombre plus proche de 650 000 que de 57 000.

* Ce même 1er août, le Conseil constitutionnel (CC) se déclare incompétent pour examiner la plainte du PSR selon laquelle un million de votants n’auraient pas eu accès aux urnes. « Ce n’est pas étonnant, le CC est dans les mains du PPC », commente le PSR.

* A la date du 6 août, 379 plaintes sont adressées au niveau des communes, dont 236 concernant la période pré-électorale et 143 concernant le jour de l’élection. 217 sont transmises au niveau provincial, 68 au CNE. C’est le PSR qui en présenté le plus (366). Beaucoup d’observateurs, dont Comfrel, se plaignent du fait que près de 85 % des plaintes sont résolues après un rapide examen, ou pas d’examen du tout.

* Le 7 août, Comfrel déclare que les élections n’ont pas atteint les standards internationaux. 11 000 observateurs de Comfrel ont été présents dans 70 % des bureaux de vote. Ils ont noté 24 cas d’achats de vote, 1 148 personnes empêchées de voter, 703 dont les noms avaient été rayés, 141 cas de présence des autorités locales près des bureaux, 133 cas de présence de militaires en armes, des gens avec le doigt marqué à l’encre ont été autorisés à voter une seconde fois, etc.

* Le 12 août, une coalition d’ONG demande la réforme du CNE afin d’éviter des irrégularités durant les prochaines élections, notamment par l’usage des formulaires 1 018 qui autorisent le vote sans être enregistré.

* Le PSR rassemble plus de 100 fausses copies du fameux formulaire 1 018 qui remplace les cartes d’identité, distribué par les chefs de village qui sont membres du PPC à 98 %. Il offre des récompenses (50 dollars) à ceux qui lui en fourniraient, et à ceux qui fourniraient des informations sur les fraudes (entre 500 et 1 000 dollars). Le 13 août, le CNE rejette les plaintes du PSR, arguant qu’il n’a pas la compétence pour le faire. Pour Sam Rainsy, cette affaire des formulaires 1 018 n’est que le sommet de l’iceberg d’une « action coordonnée, systématique, professionnelle » pour fausser les élections. Pour Comfrel, cette action systématique a eu un impact significatif sur le résultat des élections. Le 25 août, le Conseil constitutionnel confirme la décision de CNE de rejeter les plaintes du PSR qui demandait de recompter les bulletins dans les provinces de Pursat, de Svay Rieng et de Kampot. Sam Rainsy n’est pas autorisé à témoigner : « J’ai apporté 20 000 pétitions et plus de 100 fausses copies du formulaire 1 018… Ils ont peur de moi », dit le chef de l’opposition. Sam Rainsy demande en outre que le règlement intérieur de l’Assemblée nationale soit modifié afin d’éviter que le PPC ne soit à la tête de toutes les commissions parlementaires.

* Sam Rainsy menace d’aller aux Etats-Unis et en Europe pour parler des irrégularités des élections. Ce à quoi répond très justement le PPC : « Ce n’est pas la communauté internationale qui décide pour le Cambodge ! Le CNE et le CC sont indépendants. » Le PSR et le PDH écrivent aux 18 pays signataires des Accords de Paris de 1991 pour leur faire part des fraudes « systématiques et massives » des élections, contraires aux dits Accords. Le PPC répond que ces pays seraient « stupides d’écouter les vaincus ».

* Le 2 septembre, Sam Rainsy se rend à Paris puis dans les capitales européennes pour demander aux responsables politiques de ne pas reconnaître le résultat des élections cambodgiennes. Il écrit une lettre en français au roi Sihanouk pour lui demander de lancer une « Nouvelle croisade pour sauver la Nation khmère » devant l’incapacité du gouvernement à diriger le pays. Il traite l’Assemblée nationale de « groupe de voleurs et de fantômes ». Hun Sen menace de lever son immunité parlementaire et de le traîner en justice.

* Le 3 septembre, le PSR et le PDH demandent au roi Sihamoni de présider une cérémonie de prestation de serment pour les députés de leurs partis, au lendemain de celle des députés des trois partis de la coalition au pouvoir, prévue pour le 24 septembre, que les deux partis boycotteront. Le PPC trouve cette demande « étrange », mais affirme que le roi a le droit de présider une telle cérémonie. Contrairement aux annonces précédentes, le 10 septembre, le PDH annonce qu’il participera à la première session inaugurale de l’Assemblée nationale par respect pour le roi Sihamoni. Le PSR maintient sa décision de boycott.

* Le 23 septembre, tous les députés prêtent serment au palais royal. Le 24 septembre, le roi Sihamoni ouvre la 4ème magistrature. Quelques minutes avant l’arrivée du roi, les 26 députés du PSR se présentent en habit de ville. Ils n’ont pas eu le temps de s’habiller en habits traditionnels, la décision de participer à la session ayant été prise précipitamment. Les trois députés du PDH ne sont pas arrivés à temps, « pris dans des embouteillages ». Hun Sen ironise sur l’union entre le PSR et le PDH qui n’ont pas suivi la même conduite. Cependant, les deux partis réaffirment leur volonté d’union.

* Selon Hun Sen, le PSR a négocié avec lui jusqu’à 1 heure du matin pour obtenir la modification du règlement intérieur de l’Assemblée, et la reconnaissance de l’opposition, comme condition de la présence du PSR à la session inaugurale. Hun Sen promet d’établir un groupe de travail pour étudier la question.

* Le 11 septembre, Ranariddh, en exil volontaire en Malaisie depuis 18 mois, obtient le feu vert pour entrer au pays. Le roi Sihamoni l’amnistie le 25 septembre, il rentre au Cambodge, par Siemréap le 28, « pour respecter ses ancêtres ».

* Eng Chhay Eang annonce sa volonté de quitter le poste de secrétaire général du PSR, pour laisser la place à des plus jeunes.

Nouveau gouvernement

* Le 25 septembre, 94 députés lèvent la main, sans discussion préalable, pour accréditer en bloc Hun Sen comme Premier ministre, tous les ministres, les présidents des commissions parlementaires (tous PPC). Heng Samrin est reconduit dans ses fonctions de président. On note l’absence de l’opposition qui n’est pas d’accord avec la procédure du vote en bloc.

* Le gouvernement comprend 26 ministères et deux secrétariats. Sept ministres sont des nouveaux. Auprès du Premier ministre, on compte neuf Vice-Premier ministres, 16 ministres d’Etat, 34 ministres, 198 secrétaires d’Etat, 205 sous-secrétaires d’Etat, soit un total de plus de 460 personnes (35 % de plus qu’en 2004). Le Funcinpec perd tous ses ministres, mais reçoit 54 postes de secrétaires ou sous-secrétaires d’Etat. Hun Sen justifie ce nombre élevé par sa volonté de réconciliation nationale.

* Le 26 septembre, dans un discours de quatre heures et demie, le Premier ministre expose les priorités du quinquennat : développement de l’agriculture, des infrastructures, de l’emploi et des ressources humaines, le tout avec une bonne gouvernance. Il s’attaque aux ONG qu’il voudrait voir encadrées par la loi, et qui couvrent parfois des terroristes, ainsi qu’aux étrangers qui veulent le conseiller en matière de gestion de ressources pétrolières.

* Le budget de l’Assemblée nationale pour 2009 s’élève à 25 millions de dollars, soit une augmentation de 5 % par rapport à 2008, due spécialement à l’augmentation du personnel dont le nombre s’élève à 800. Pour l’intérieur de la Chambre, et 1 200 conseillers travaillant à l’extérieur. L’opposition dénonce ce grand nombre de personnes, les dons aux amis, les dépenses pour les voyages à l’étranger, les réceptions de députés étrangers, etc.

International

Thaïlande

* Le 9 juillet, le temple de Préah Vihéar est inscrit au patrimoine mondial de l’humanité. Cette inscription alimente le psychodrame thaï-cambodgien. Depuis le 15 juillet, des soldats thaïlandais occupent les abords du temple de Préah Vihéar.

* Les 28 et 29 juillet, une centaine de soldats thaïlandais investissent les deux petits temples de Ta Moan Thom et de Ta Moan Tauch, situés dans la province d’Oddar Méan Chhey, à 150 km à l’ouest de Préah Vihéar, au sommet de la chaîne des Dangrek, à 200 m de la borne-frontière n° 23 entre les deux pays. C’est une violation patente des accords de ne plus envoyer de troupes. Cent-cinquante soldats cambodgiens sont situés à 60 m de là. Après s’être momentanément retirés, les soldats thaïlandais occupent à nouveau le terrain.

* Les cartes de 1908-1909 et de 1919-1920 placent nettement ces deux temples en territoire cambodgien et un troisième, Ta Kréal, en territoire thaïlandais. Soixante-treize bornes signalent les 800 km de frontières communes. En mars dernier, le ministère thaïlandais des Affaires étrangères demandait de réviser les cartes pour placer deux temples en territoire thaïlandais. En 2001, la Thaïlande a commencé à restaurer ces deux temples. La Thaïlande se propose de faire inscrire ces deux temples dans la liste du patrimoine mondial.

* Le 1er août, Bun Rany, épouse du Premier ministre cambodgien, accompagnée de 300 gardes du corps, se rend à Préah Vihéar, en tant que présidente de la Croix-Rouge nationale pour faire des dons aux soldats : moustiquaires, hamacs, tentes, médicaments, boîtes de conserves ainsi que 56 dollars (dont 38 de sa caisse personnelle !). Elle est accompagnée d’une délégation de 80 membres. Les moines de Phnom Penh récoltent 7 500 dollars pour la population civile. Le CHRAC, qui regroupe 60 associations cambodgiennes, demande la médiation de l’ONU, car il ne fait pas confiance aux discussions bilatérales.

* Le 4 août, le porte-parole du gouvernement cambodgien déclare que les négociations reprendront après la formation du nouveau gouvernement.

* Le 5 août, le gouvernement thaïlandais approuve la décision de Conseil de sécurité thaïlandais d’un retrait simultané des troupes thaïlandaises et cambodgiennes et prévoit une nouvelle rencontre le 18 août. Cinquante intellectuels et spécialistes d’Asie de douze universités envoient une lettre ouverte aux deux gouvernements, leur demandant de régler la question par le dialogue.

* Les syndicats SIORC et AIEC projettent de lancer une manifestation contre la présence militaire thaïlandaise à Préah Vihéar. La municipalité refuse la demande. Cinquante policiers bloquent 100 manifestants avec une certaine violence, condamnée par les ONG de défense des droits de l’homme.

* Suite à des négociations menées les 12 août à Phnom Penh et le 13 à Surin (Thaïlande), les troupes de deux côtés (450 Thaïs et 1 000 Cambodgiens) commencent à se retirer de Préah Vihéar à partir du 16 août, ne laissant qu’une dizaine de soldats des deux pays dans la pagode contestée. En revanche, les troupes encerclant les temples de Ta Moan se sont simplement repliées de 30 à 40 m de chaque côté. Les négociations se poursuivent à Hua Hin le 18 août. Le ministre cambodgien des Affaires étrangères rencontre le roi de Thaïlande. Le 19 août, après douze heures de discussion, les négociations échouent. Une nouvelle réunion est prévue le 29 août. La commission mixte de démarcation des frontières se réunira au début octobre. Les ministres des Affaires étrangères se réuniront après cette commission. Le temple de Préah Vihéar est désormais interdit aux visiteurs en provenance de Thaïlande. L’accès pourra être rétabli après le départ de toutes les troupes.

* Le 23 août, 2 000 Thaïlandais en T-shirt jaune du Parti du peuple et de la démocratie, se rendent en visite au temple de Ta Moan, fermant l’accès du côté cambodgien (qui sera ré-ouvert le 24 août). Vingt kilomètres plus loin, une vingtaine de soldats thaïlandais cherchent querelle aux villageois de Chup Kaki, situé à 300 m de la frontière, affirmant que ce territoire est thaïlandais. D’après les officiels cambodgiens, les soldats thaïlandais patrouillent ainsi depuis plus de deux mois. Dans une conférence de presse du 22 août, Hun Sen demande au génie de l’armée cambodgienne de construire les 9 km de la route reliant ces temples. La réunion de négociations du 29 août est annulée, à cause des manifestations de Bangkok contre le gouvernement Samak. Le 25 août, la construction de deux routes de 7 m de large est lancée pour rejoindre le sommet du temple de Préah Vihéar : une pour remplacer l’actuelle, très raide ; une seconde sur le flan opposé, à travers la forêt.

* Depuis le 25 août, 11 soldats thaïlandais campent à l’intérieur du territoire cambodgien, à Choup Tra Louk.

* Le député PSR, président de la Commission pour l’Intérieur et la Défense nationale voit son budget de 3 000 dollars supprimé, pour n’avoir pas incité des députés PPC à l’accompagner. Il pense que le ministère de la Défense ne veut pas qu’il voit les mauvais équipements des soldats.

* Avec la démission de Tej Bunnag, ministre thaïlandais des Affaires étrangères, les négociations entre les deux pays risquent d’être plus difficiles.

* Régulièrement, des civils cambodgiens sont tués par l’armée thaïlandaise, qui les accuse de couper des arbres sur son territoire, ou de s’adonner à divers trafics.

* L’armée cambodgienne construit 16 bâtiments pour ses hommes, à 6 km des temples de Ta Moan, et 17 autres à 20 km de Préah Vihéar. Hun Sen finance personnellement à hauteur de 400 000 dollars. Une troisième base est en construction à Ampil (Oddar Méan Chhey), à 30 km de Choup Kaki, où sont entrées des patrouilles thaïlandaises.

* Les négociations entre les deux pays n’ont pu avoir lieu à New York lors de l’assemblée générale annuelle de l’ONU par la rencontre des ministres des Affaires étrangères des deux pays, le ministre cambodgien étant retenu par la composition du gouvernement. Le 13 octobre, le nouveau ministre thaïlandais des Affaires étrangères se rend en visite de courtoisie à Phnom Penh et, dans le même temps, 80 soldats thaïlandais entrent en territoire cambodgien. Hun Sen lance un ultimatum et menace de lancer la guerre, bien qu’il préfère la négociation. Les soldats se retirent.

* Du côté cambodgien, on pouvait penser, au départ, que l’agitation thaïlandaise n’était qu’une affaire intérieure à la Thaïlande, des groupes d’opposants profitant de l’occasion pour mettre en difficulté le Premier ministre Samak. Certes, un Premier ministre plus compétent aurait calmé la situation avant qu’elle ne s’aggrave, mais il semble qu’il s’agisse d’un vieux ressentiment populaire, la Thaïlande n’ayant jamais admis d’avoir dû, en 1904, puis en 1946, rétrocéder les provinces nord du Cambodge, annexées une première fois en 1867, puis en 1941.

* La question des frontières est une vielle histoire : les cartes ont été fixées en 1907 par une commission franco-siamoise, reconnaissant la ligne de partage des eaux comme frontière. (Ce principe ne semble pas avoir été appliqué pour le temple de Préah Vihéar, situé sur une falaise de 525 m tombant à pic sur le Cambodge, et en pente douce sur la Thaïlande). Après un long silence que la France estima être un accord tacite, en 1934, la Thaïlande dresse ses propres cartes, qui placent cependant le temple en territoire cambodgien. En 1954, l’armée thaïlandaise occupe le temple, ce qui pousse Sihanouk, le 6 octobre 1959, à porter l’affaire devant le tribunal international de La Haye. Le 15 juin 1962, le tribunal international place le temple de Préah Vihéar en territoire cambodgien, et l’armée thaïlandaise doit se retirer. Cet arrêt est ressenti comme une gifle par la Thaïlande qui ne pardonne pas. En juin 1979, l’armée thaïlandaise le rappelle en précipitant 30 000 réfugiés cambodgiens du haut des falaises de Préah Vihéar, après un périple de plus de 200 km… Depuis 2001, des incidents éclatent régulièrement. Le Cambodge institue en territoire cambodgien « une zone blanche », ou neutre, de 4,6 km², pour permettre le développement économique par des investisseurs thaïlandais (l’opposition pense à des accords Thaksin-Hun Sen pour y créer des casinos). C’est cette zone qui est actuellement en jeu.

* Le Cambodge fait preuve de beaucoup de retenue, ce qui confirme que les manifestations anti-thaïlandaises du 29 janvier 2003 n’étaient qu’un montage du Premier ministre Hun Sen, pour protester contre le pot de vin trop faible qui lui était versé pour l’exploitation des hydrocarbures du golfe de Thaïlande. Cela a coûté 53 millions de dollars au Cambodge !

* Les bandits profitent du fait que la police et l’armée soient occupées sur la frontière pour commettre des vols dans les provinces du nord du Cambodge.

* Le 15 septembre, Hun Sen déclare qu’étant donné sa situation politique, la Thaïlande n’est pas en mesure de présider la réunion des chefs d’Etat des pays de l’ASEAN en décembre prochain, et devrait laisser sa place à Singapour ou au Vietnam. La Thaïlande demande au côté cambodgien de clarifier sa position.

Vietnam

* Le moine Tim Sakhorn, possédant la double nationalité vietnamienne et cambodgienne, disparu en juin 2007, demeure en résidence surveillée au Vietnam, après sa libération. Les organisations de Khmers Krom protestent.

Koweït

* Les 2 et 3 août, le Cambodge et le Koweït signent un accord visant renforcer les liens entre les deux pays, notamment la création d’une ambassade du Koweït à Phnom Penh, d’une ligne aérienne directe, d’un accord de protection des investissements koweïtiens, un accord commercial pour la production de fruits destinés uniquement au Koweït. D’autre part, le Premier ministre koweitien fait un don de 4,9 millions de dollars : 500 000 pour rénover la mosquée de Boeung Kâk (Phnom Penh), 4,4 millions pour la création d’un centre islamique tout proche, 100 000 pour la construction de trois écoles pour les Jarais de Ratanakiri. L’Arabie Saoudite s’engage à verser 687 000 dollars pour envoyer 500 étudiants musulmans à Norton University. Selon le responsable de la communauté musulmane du Cambodge, seulement 100 élèves passent du secondaire à l’université.

* Une visite officielle de Hun Sen au Koweït est projetée pour le début de l’année prochaine, lors de laquelle il signera un prêt de 500 millions de dollars pour la construction d’un barrage hydroélectrique dans la région de Kompong Thom et d’autres projets.

Tribunal exceptionnel pour juger les ex-responsables Khmers rouges

* Le 1er août, Ieng Sary, 82 ans, doit être hospitalisé pendant une semaine, pour la sixième fois depuis son arrestation en novembre dernier, pour problème de sang dans les urines.

* Le 8 août, Kaing Guek Eav, alias Duch, est formellement inculpé de crimes de guerre et de crimes contre l’humanité. Cependant, les juges d’instruction demandent qu’il soit également inculpé selon la loi cambodgienne de 1956, pour ne pas courir le risque d’un acquittement.

* Le 16 septembre, la détention provisoire de Nuon Chéa, 82 ans, est prolongée d’un an, bien que ses défenseurs assurent qu’il n’y a pas de preuves contre lui. Duch l’aurait impliqué dans beaucoup de crimes commis à S-21.

* Le Tribunal exceptionnel (TE) aura pour effet de mieux connaître l’histoire du Cambodge : par exemple, on apprend que 177 personnes ont été relâchées de S-21. A partir d’octobre 1975, le centre de tortures se situait près du marché central de Phnom Penh. Duch a en été chargé le 8 mars 1976. Le centre s’est installé au lycée Ponhéa Yat en avril 1976.

* Le 11 juillet, l’Allemagne fait un don de 2,4 millions pour la défense des victimes. L’agence allemande de développement DED, pour sa part, finance cinq avocats par le biais de Cambodian Lawyers (35 000 dollars) et Legal Aid Cambodia (39 000 dollars), mais cela ne suffira pas pour assurer les salaires des avocats en 2009. Un avocat est payé 30 dollars l’heure, pour un maximum de 50 heures par mois. Le responsable de la section de défense des victimes demande d’utiliser le don de l’Allemagne pour continuer à financer ces avocats.

* Le 16 septembre, après beaucoup de réticence, les Etats-Unis s’engagent à verser 1,8 million de dollars au TE. Le TE cherche encore 30 millions pour continuer ses travaux jusqu’en 2009.

Corruption

* Le PNUD donne son accord pour que le TE publie les accusations récentes les plus sérieuses concernant les pratiques de corruption survenues depuis la fin juin. Les quelque 250 membres cambodgiens du TE n’ont pas reçu leur salaire de juillet (en principe versé le 27), pour un total d’environ 300 000dollars, les pays donateurs ayant décidé de suspendre leurs versements. Les conclusions de l’organisme de l’ONU chargé d’enquêter sont remises à Sok An le 17 septembre.

* Le 5 août, la France, l’Australie, l’Union européenne suspendent leurs versements pour une durée indéterminée, à cause des rumeurs de corruption. Dans une lettre de ce même 5 août, Sok An, ministre du Conseil des ministres et chargé du TE, affirme que le Cambodge a les moyens et le droit de supprimer la corruption, et que les allégations de corruption doivent lui être remises. Le 8 août, on annonce que les salaires de juillet du personnel cambodgien seront versés sur un fonds de 2,9 millions, don du Japon pour des projets de développement, et qui ne sont pas contrôlés par le PNUD.

* Le 24 août, David Tolbert, envoyé spécial du secrétaire général de l’ONU pour le TE, arrive à Phnom Penh pour examiner les rumeurs de corruption au sein du TE. Le 1er septembre, une conférence biannuelle du personnel du TE redéfinit les procédures du TE. Plusieurs membres sont absents, peut-être pour bouder la présence de David Tolbert, qui n’est, d’ailleurs, pas autorisé à parler.

* Le 22 août, deux juges internationaux de « réserve » sont désignés pour le TE, en cas d’indisponibilité des juges actuels.

* L’UNESCO envisage de placer les documents de S-21 comme appartenant à l’héritage mondial.

* Le 5 septembre, suite à sa réunion biannuelle, le TE accorde des droits supplémentaires aux victimes des Khmers rouges. 1 800 plaintes sont enregistrées, mais les plaignants sont invités à se regrouper pour être défendus par un seul avocat.

Economie

Agriculture

* Les pluies étant très irrégulières, la plupart des régions rizicoles ont connu la sécheresse en juillet et août. 1,6 million d’hectares de rizières ont été repiqués, soit 19 % de moins que l’an dernier. 19 263 hectares de semis et 23 343 hectares de rizières ont été plus ou moins détruits par la sécheresse. Les pluies de septembre laissent toutefois prévoir une amélioration de la récolte. Il y aurait toutefois 7 % de rizières repiquées en moins par rapport à l’an dernier. En revanche, le Mékong atteint un bon niveau.

* Le 26 août, des défenseurs de l’environnement prennent des photos de huit tracteurs, de bulldozers et de camions en train de déboiser une forêt épaisse dans la province de Ratanakiri, pour la société DM. Des centaines de grumes de bois de luxe ont été coupées, et 200 hectares rasés. Cette société est impliquée dans un conflit foncier avec les Montagnards. Adhoc affirme que cette déforestation se fait avec l’accord des autorités provinciales de Ratanakiri.

* Le 1er septembre, deux soldats et cinq policiers sont suspendus de leurs fonctions, soupçonnés d’exportation illégale de bois de Ratanakiri vers le Vietnam en juillet dernier.

* Le Cambodge se prépare à exporter entre 50 et 70 000 tonnes de riz à Brunei.

* Le CEDAC (Centre d’études et de développement pour l’agriculture du Cambodge) inaugure une formation pour 300 jeunes dans cinq provinces pour tenter de lancer des projets d’agro-industrie. Cette formation est financée par un don de l’Education œcuménique d’Allemagne. Un Français se lance dans la culture des légumes bio, et pense pouvoir mobiliser des Cambodgiens.

* En collaboration avec la FAO, le gouvernement lance un recensement du monde rural, que la FAO finance à hauteur de 690 000 dollars et dont le montant s’élève à 4,3 millions. Le solde est, comme toujours, attendue des pays donateurs.

Confection Textile

* Le 1er janvier 2009, les Etats-Unis vont supprimer leurs restrictions à l’entrée des produits textiles chinois sur leur territoire, ce qui fait craindre aux économistes khmers que les Chinois ne relocalisent chez eux, bien que la main-d’œuvre cambodgienne reste bon marché. Deux cents des 326 usines de confection textile du Cambodge sont détenues par des Chinois (de Taïwan, Hongkong, Malaisie, Chine continentale, etc.). Pourtant, les exportations vers les Etats-Unis ont progressé de 2,15 % durant les six premiers mois de 2008, pour atteindre un montant de 1,16 milliard de dollars (on prévoit 3 milliards pour l’année), alors que dans l’ensemble du monde, les exportations de textiles vers les Etats-Unis ont chuté de 4 %. Cette augmentation est cependant liée à une diminution de la valeur des produits de 2 % (on exporte plus à moindre coût !). Mais les coûts de production (électricité, carburants) sont trop élevés et les marges trop faibles. Les exportations vers les autres pays de l’ASEAN, relativement faibles, ont grossi de 300 %.

* Les travailleuses gagnent entre 80 et 85 dollars, en comptant les heures supplémentaires. Le syndicat des patrons promet d’augmenter les salaires de 10 % en 2009, bien que l’inflation soit montée à 22 % en juillet. Les fonctionnaires reçoivent un salaire d’environ 60 dollars par mois et espèrent une augmentation de 20 % en 2009. Selon le secrétaire du SIORC, plus de dix usines ont fermé leurs portes depuis novembre dernier, et 27 000 travailleuses (5,7 %) seraient reparties dans leur village pour survivre.

* Le 11 septembre, l’usine Eternity Apparel Cambodia, ferme ses portes par manque de travail : 900 travailleuses sont licenciées. Les salaires d’août ne leur ont pas encore été totalement versés. Selon Chéa Mony, secrétaire général du SIORC, trois autres usines ont fait faillite dans la semaine.

Electricité

* Les dépenses d’électricité représentent 15 % des coûts de production des usines cambodgiennes. Avec l’importation d’électricité en provenance du Vietnam et de Thaïlande, ce coût devrait baisser à 5 %.

* Le 13 août, le gouvernement donne son feu vert pour l’étude de faisabilité de deux barrages hydroélectriques sur la Sré Pok, à la société chinoise Guangxi Guiguan Electricity. Le forum des ONG demande des informations sur ces éventuels travaux.

Tourisme

* Le 26 juillet, le roi Sihanouk s’inquiète des projets d’investissements thaïlandais dans la province de Koh Kong, par Thaksin, ancien Premier ministre thaïlandais, aidé par des fonds des pays du Golfe.

* Le 18 août, un important projet de développement du secteur de Kep est révélé au public. Le coût de ce projet, mené par Mekong Project Dev. Inter., s’élève à plus de deux milliards de dollars, et s’étend sur 400 hectares avec 6 km de plage. Seront construits environ 10 000 logements, une université, un terrain de golf et un parc de 31 hectares. Ce projet sera achevé dans quinze ans. En février dernier, la société cambodgienne Royal Group a signé un achat de d’un terrain de 79 km² dans l’île de Koh Rong, à 44 km de Kep, pour 99 ans, et projette d’y construire des hôtels.

* Le 10 septembre commence la construction d’un hôtel 5 étoiles à Sihanoukville pour la société Sokha Hotel Group, qui occupe 15 hectares d’une parcelle de 54 sur front de mer. L’hôtel actuel ne dispose que de 100 chambres. La construction d’un autre hôtel de 500 chambres de la même société a commencé à Chroy Changvar, dans la péninsule en face de Phnom Penh.

Secteur bancaire

* Le 1er septembre, une banque nippo-coréenne ouvre ses portes à Phnom Penh, avec un capital déclaré de 15 millions de dollars.

* Le 10 septembre, Bridge Capital, une nouvelle banque, s’ouvre à Phnom Penh, avec des actionnaires américains qui veulent faire partager l’expérience bancaire américaine.

* Le 19 septembre, la Banque nationale du Cambodge décide de tripler le dépôt des diverses banques qui désormais devra s’élever à 36,5 millions de dollars. Les banques commerciales qui ont des « actionnaires influents » peuvent ne pas augmenter leur dépôt, fixé à 12 millions. Les six banques spécialisées dans les prêts et qui n’ont pas de déposants doivent avoir un dépôt de 7,3 millions. Cette mesure doit limiter le nombre des banques. Les clients des banques ont augmenté de 285 639 en 2006 à 456 026 personnes. Les dépôts de la première moitié de 2008 s’élève à un milliard. Vingt-et-une banques opèrent au Cambodge. Quatre banques récoltent plus de 80 % du total des dépôts. La crise financière ne semble pas affecter le Cambodge.

* La banque Ascleda double ses profits (10 millions) durant les six premiers mois de l’année. Elle a accordé 456,6 millions de prêts et a reçu 466 millions en dépôts, avec 359 000 déposants, et 200 000 emprunteurs.

Dons, aides et investissements

* Le 29 août, le Conseil des ministres approuve un budget de 2,49 milliards de dollars, présenté par le ministère du Plan, concernant 552 projets de développement sur l’ensemble du pays pendant trois ans, qui sera financé par les donateurs internationaux. Le gouvernement s’engage, pour sa part, à financer 417 millions et les pays donateurs se sont engagés à verser 985 millions en dons et prêts. Reste 1,09 milliard à trouver. Ainsi le gouvernement espère faire diminuer la proportion de la population vivant au-dessous du seuil de pauvreté de 32 à 25 %. L’opposition reste sceptique.

* Le 13 août, l’Allemagne accorde un don de 50,5 millions de dollars, dont 14,9 pour l’amélioration du système de santé pour les pauvres (7,4 millions en contraceptifs) ; 9,7 pour la construction de routes dans les provinces de Kompong Thom et Siemréap ; 5,95 pour l’amélioration du réseau électrique de Takéo et Kampot. C’est 25 % de plus que prévu dans l’accord d’aide annuelle. L’Allemagne est au 4ème rang des pays donateurs, après le Japon, la Chine, et les Etats-Unis.

* Le 25 août, l’ambassadeur des Etats-Unis fait un don de 34,3 millions de dollars au Cambodge pour les secteurs de la Santé et de l’Education. Hun Sen remercie (en anglais !) car « c’est la première fois qu’un gouvernement signe un contrat avec un gouvernement non encore formé ! » En réalité, l’Allemagne a précédé les Etats-Unis. Le 15 septembre, le Cambodge et les Etats-Unis signent un autre accord bilatéral concernant 26 millions de dollars pour développer l’économie durant les quatre prochaines années.

* En 2007, les jeux d’argent ont rapporté 144 millions de dollars à la société Naga World’s, qui a le monopole des jeux jusqu’à 200 km autour de Phnom Penh.

* Au mois de septembre, commence l’agrandissement de l’aéroport de Banlung (Ratanakiri), financé par un prêt de 7 millions de la BAD. L’aéroport s’étendra sur 4 hectares. Quarante familles doivent être déplacées. Le gouvernement leur offre entre 25 et 50 dollars du mètre carré.

* Un programme de micro-finance (WORTH) a donné une formation à 2 985 femmes. Cette association alphabétise, aide à épargner (53 180 dollars au total), et accorde des prêts à 2 ou 4 % pour six mois pour des projets agricoles ou production de soie.

* Le Cambodge gagne dix places dans le classement de Banque mondiale pour la facilité à monter une affaire dans le pays (135 sur 181 pays). En revanche, le pays est à la166ème place sur 180 pour la corruption.

* L’Union européenne accorde un don de plus de 7 millions de dollars pour assurer la sécurité alimentaire des régions périphériques du Cambodge.

Société

Recensement

* Le recensement effectué pendant dix jours, en mars dernier par 30.000 agents, donne une population totale de 13 388 910 habitants. On s’attendait à plus de 14,6 millions. Le développement économique et le planning familial expliqueraient cette moindre croissance. La population a grandi de 17 % depuis 1998, au rythme de 1,55 % par an, soit plus que dans l’ensemble de l’ASEAN (1,3 %). On compte 2,8 millions de foyers. Ce sont les provinces périphériques les moins peuplées qui ont vu leur population grossir davantage.

* Les communes recevront un budget global annuel de 82 millions de dollars, soit 22 de plus qu’en 2008, financé par le gouvernement (26 millions) et les donateurs internationaux (56 millions) pour créer des infrastructures locales, et donner ainsi plus de pouvoirs aux structures municipales et provinciales, selon la loi organique votée en mai dernier.

La vie chère

* Le 28 août, après examen du prix de 2005 produits, notamment alimentaires, la Banque mondiale modifie le taux de pauvreté (fixé en 1993 à 1 dollars) à 1,25 dollars par jour (moins de 1 euro). Selon ce nouveau barème, on estime que 42 % des Cambodgiens, soit 6 millions de personnes, vivent au dessous du seuil de pauvreté, contre 31 et 33 % en 2007 selon l’ancien barème.

* Selon les chiffres officiels en date du 15 septembre, du mois d’août 2007 à août 2008, les prix de denrées alimentaires ont augmenté de 40 %. Les dépenses alimentaires représentent 60 % du budget des familles pauvres. Officiellement, l’inflation se chiffre à 22,56 % (essence 32,5 %, gasoil 69,47 %), mais les économistes pensent que l’inflation réelle est d’au moins 30 %. Le prix du riz au marché a doublé. 40 % des agriculteurs bénéficieraient de cette montée du riz. Le taux de croissance, qui était de 10 % en 2007, a chuté à 6,5 % en 2008, et l’on prévoit 6 % en 2009. L’inflation est prévue à 25 % en 2008 et à 15 % en 2009. Seulement 81 % des Cambodgiens mangent à leur faim. Selon le CDRI (Institut cambodgien pour la recherche et le développement), 65 % des foyers sont sans terres, ou possèdent moins d’un hectare.

* Suite à une baisse de 25 % du prix des terrains à Hô Chi Minh-Ville depuis décembre dernier, ceux de Phnom Penh devraient baisser. On pense que le prix des terres agricoles devrait augmenter. Le revenu par hectares aurait crû de 300 % depuis le début de l’année.

Conflits fonciers

Après les élections, les conflits fonciers continuent, souvent plus rudes que par le passé. Les promesses électorales n’ont pas été réalisées.

* Le 1er septembre, 400 villageois de l’ethnie Phnongs de Ratanakiri envisagent manifester contre les autorités de leur commune qui ont vendu 10 hectares de leurs terrains à un entrepreneur (Seng Ty, gendre du secrétaire d’Etat du ministère de l’Intérieur qui a obtenu une concession de 4 000 hectares pour y planter des hévéas). « C’est la seule solution qui nous reste », disent-ils. Leur plainte est rejetée par les autorités. Dans la province, on dénombre plus de plus de dix conflits fonciers avec des hommes d’affaires ou des gens du pouvoir. La justice ne fait rien dans ces cas là. Adhoc a rassemblé plus de 50 cas de ventes abusives de terrains, où les autorités locales ont reçu des pots de vin.

* Un officier de police de Lumphat (Ratanakiri) démissionne, accusé de diriger la protestation de 140 familles contre les gardes du corps de Hun Sen qui auraient saisi 200 hectares de leurs terres.

* Le 25 août, 120 villageois de Bavel (Battambang) sont retenus à un contrôle militaire. Ils allaient soutenir trois villageois, représentant 108 familles, et jugés ce même jour à Battambang, pour un conflit les opposant à l’armée, concernant 210 hectares à Lovéa, et de 612 à Bavel.

* Le 27 août, un officier de police de Préah Vihéar est condamné à sept ans de prison pour avoir déforesté 21 hectares en 2007. Le 2 septembre, quinze villageois de Préah Vihéar passent en jugement, pour avoir coupé le bois sur 470 hectares de forêts protégées, en novembre 2007, s’être opposés par la force à 200 policiers venus les expulser. Deux villageois avaient été tués, cinq blessés. D’après l’association ADHOC, les victimes deviennent les accusées.

* Neuf personnes qui coupaient illégalement la forêt du Parc national de Bokor acceptent de cesser leurs opérations.

* Le 18 septembre, cinq villageois de la province de Kompong Speu sont emprisonnés accusés avoir détruit des plantations gouvernementales sur une concession de 4 900 hectares accordés en concession à la société Golden Land en 2004. La société a tenté d’expulser 220 familles qui occupaient 228 hectares depuis les années 1980. Elle y a planté des acacias et des eucalyptus et y a employé des militaires. Selon Adhoc, les villageois sont innocents.

* Le 23 septembre, les villageois de Prey Nop accusent les autorités locales d’avoir vendu 110 hectares de terres leur appartenant. Plus de 60 maisons ont été construites sur ces terres. « La situation est pire depuis les élections », disent les villageois désespérés.

Défense nationale

* La Chine fait un don d’un bâtiment de quatre étages aux forces armées pour l’Ecole militaire de Treng Trayeung (Kompong Speu). C’est le troisième don de la Chine en ce domaine depuis 1991.

Education nationale

* Le 4 août, 80 000 élèves passent le baccalauréat, dans 139 centres. Cette année, la corruption s’est affichée au grand jour : un proviseur de lycée propose lui-même, dans la salle d’examens, les solutions contre 5 ou 10 dollars. Pour les élèves, cette pratique est devenue normale. Certains affirment sans la moindre gêne avoir versé 50 ou 100 dollars. Cependant, pour la première fois deux intermédiaires ont été sanctionnés. Plus de 70 % des candidats ont été reçus.

* Pour l’année scolaire 2008-2009, 3 260 bourses sont offertes par les universités privées et publiques aux candidats reçus avec mention. L’an dernier, seulement 2 383 bourses étaient proposées.

* Delon le CDRI, 12,5 % des enfants des familles les plus pauvres ont cessé l’école en janvier, et 20 % en juin, pour chercher de quoi se nourrir.

* Le système éducatif cambodgien, calqué sur le système français, ne prépare pas les jeunes aux propositions d’emploi qui leur sont faites à la sortie de leurs études trop théoriques. Le pays a plus besoin de techniciens que de diplômes d’universités. On recherche plus de 1 000 comptables, ce qui est un bon signe du développement économique.

Santé

* De très nombreuses saisies de drogues sont signalées ces derniers mois, détruites en plusieurs autodafés.

* Les maisons de passe reprennent leur travail en plein jour à Toul Kork (Phnom Penh), après que les tenanciers aient payé la police.

* Durant les six premiers mois de l’année, 77 villageois ont été frappées par la foudre, contre 45 en 2007.

* Depuis le début de l’année, on compte 186 accidents par mines (352 pour toute l’année 2007).

* Le 23 septembre, à l’occasion de la Journée internationale des sourds, ont apprend que 51 000 sourds vivent au Cambodge. Deux ONG permettent à 1 500 d’entre eux d’apprendre le langage des sourds.

* Les avortements clandestins seraient à l’origine d’un tiers de la mortalité maternelle (entre 15 et 20 % selon OMS). En 2005, on comptait 472 morts pour 100 000 naissances, le taux le pire de la région. Une femme sur huit y aurait eu recours au moins une fois. Seulement 47 % des hôpitaux, et 10 % des centres médicaux pratiquent les avortements. Une programme financé par le Grande-Bretagne vise à faire diminuer cette mortalité d’ici 2010. 101 médecins et sages-femmes ont déjà été formés.

Droits de l’homme

* A partir du 10 septembre, au siège de la Commission de l’ONU pour les droits de l’homme, qui comprend 47 nations, est étudié la situation de Yash Ghai, envoyé spécial du secrétaire général de l’ONU au Cambodge. Le gouvernement voudrait mettre fin à la mission onusienne d’observation des droits de l’homme ; en revanche, les associations cambodgiennes Adhoc et Locadho militent pour son maintien. Le 15 septembre, Yash Ghai donne sa démission : il regrette de n’avoir pas été soutenu par la communauté internationale alors qu’il était insulté continuellement par Hun Sen. Le 17 septembre, le Cambodge accepte l’envoi d’un nouvel envoyé spécial. On ne connaît pas le nom du prochain envoyé.

* Le 4 septembre, un officier des forces armées tue une serveuse d’un coup de feu. Il est relâché, car ce tir n’est qu’un « accident », et après avoir versé 2 700 dollars à la famille de sa victime. Ce n’est qu’un des multiples cas de violence gratuite.

* L’allègement des peines encourues pour crime de pédophilie a pour effet de faire libérer un certain nombre de personnes incarcérées, au grand dam des associations de défense des enfants.

* Le 10 septembre, le gouvernement demande aux institutions publiques et privées d’autoriser le port des habits traditionnels pour les musulmans, notamment le voile pour les jeunes filles.

* Le 28 septembre, un journaliste est arrêté pour avoir photographié des militaires en train de confisquer du bois coupé illégalement à Pursat. Vingt villageois prennent sa défense contre les policiers, et blessent l’un d’eux.

* Les fils des riches, des hommes du gouvernement ou de l’armée continuent à faire parler d’eux régulièrement, par des courses de voitures de luxe à l’intérieur de Phnom Penh, ou en tirant sur la foule.

Divers

Patrimoine

* Neuf des dix espèces de primates présentes au Cambodge sont en danger d’extinction plus que partout ailleurs dans le monde, à cause de la déforestation, de la chasse et du commerce illégal. Il y a au monde 634 espèces de primates. Le ministère de l’Agriculture dément.

Sports

* Quatre athlètes participent aux Jeux olympiques de Pékin. Ils se plaignent cependant de ne pas avoir eu suffisamment d’argent pour s’entraîner, alors que le Comité olympique cambodgien reçoit 200 000 euros par an, dépensés principalement en frais administratifs. Ils touchent chacun 30 dollars par mois, la nourriture et le logement, ainsi qu’un bonus de 400 dollars du Comité national, et 200 donnés par le ministre du Tourisme. La Banque ANZ donne 500 dollars au marathonien khmer qui a gagné une médaille de bronze et d’argent aux Sea Games.

* Le Comité international olympique fait un don de 15 000 dollars au ministre cambodgien du Tourisme et au secrétaire général du Comité olympique cambodgien pour leur déplacement et celui de leurs épouses, et 12 000 dollars pour les seize autres membres de la délégation.

* L’un des deux nageurs cambodgiens est arrivé 79ème sur 97, l’autre 78 sur 90. La sprinteuse arrive 70ème sur 85, le marathonien se classe 73ème sur 95. C’est un excellent résultat quand on connaît le peu d’aide dont ils bénéficient.

* Le 28 août, contre toute attente, deux boxeurs de boxe cambodgienne (appelée à tort « thaïlandaise ») sortent vainqueurs d’un tournoi international à Phnom Penh.

Phnom Penh

* Le 8 août, commencent les travaux de construction d’un complexe hôtelier de 100 millions de dollars, par la société Sokimex, dans la presqu’île de Chruy Changvar. En février 2007, la municipalité a vendu les six hectares nécessaires à la construction, pour 99 ans, à un prix de 5,6 millions.

* Le 26 août, commencent les travaux de pompage visant à combler 90 hectares de l’étang de Boeung Kâk, dans la partie nord de Phnom Penh. Seuls resteront en eau 10 hectares. Une concession de 133 hectares (l’étang et ses rives) a été accordée en février 2007 à une société inconnue (Shukaku, dirigée par le sénateur Lao Meng Khim, époux de Mme Chhoeung Sophéap, patronne de la Phéap Imex, proche de Hun Sen !), pour un bail de 99 ans, et pour une valeur de 79 millions de dollars. Le rapport concernant l’impact sur l’environnement n’a pas été rendu public. Une compensation de 8 500 dollars ou un relogement à Dangkao est proposé aux 4 250 familles logeant autour de l’étang. Les résidents veulent que le terrain leur soit acheté au prix du marché, soit 6 000 dollars le m². Ils organisent plusieurs manifestations, des pétitions de protestation et demandent, en vain, que cesse les travaux.

* Une société chinoise, Global Taxi, détient 24 taxis qui travaillent 24 heures sur 24, ce qui mécontente les moto-doubles et les chauffeurs de tuk-tuk. Le tarif du taxi est de un dollar pour les deux premiers kilomètres, puis 0,10 dollars pour 200 m. Il y a environ 1 000 chauffeurs de tuk-tuk à Phnom Penh.

* L’hôtel Ronakser, situé au milieu d’un parc de 6 547 hectares, en face du palais royal de Phnom Penh, est vendu à la fille de Mme Chhoeung Sophéap (patronne de la Phéap Imex, dont le mari, sénateur, est propriétaire de Shukaku, qui a obtenu la concession de l’étang de Boeung Kâk), pour la somme de 3,8 millions de dollars. Au prix du marché, cette transaction aurait dû s’élever entre 19,6 et 22,9 millions. Elle est en violation avec le bail de location de 49 ans passé en 2001 avec l’actuelle gérante. Chaque employé a reçu une confortable enveloppe (entre 1 500 et 10 000 dollars) et la gérante une enveloppe de 200 000 dollars.