Eglises d'Asie

POUR APPROFONDIR – Lettre du cardinal secrétaire d’Etat aux prêtres de l’Eglise catholique en Chine

Publié le 25/03/2010




Au printemps 2007, le pape Benoît XVI rendait publique une Lettre aux évêques, aux prêtres, aux personnes consacrées et aux fidèles laïcs de l’Eglise catholique en République populaire de Chine. Deux ans plus tard, le cardinal Bertone, secrétaire d’Etat du Saint-Siège, publie à l’occasion de l’Année du prêtre, une lettre s’ouvrant par « une invitation à l’espérance ».

Dans un texte à la tonalité pastorale, le numéro deux du Saint-Siège rappelle et développe les indications du pape pour la vie de l’Eglise en Chine : réconciliation au sein de la communauté catholique, et dialogue avec les autorités civiles sans renoncer aux principes de la foi catholique. Eglises d’Asie propose ci-dessous une traduction française de ce texte, diffusé via les sites Internet du Vatican et de Fides, l’agence de la Congrégation pour l’évangélisation des peuples.

 

Le Vatican, 10 novembre 2009

Chers frères prêtres,

L’Année du prêtre, don du Saint Père le pape Benoît XVI, que nous célébrons à l’occasion du 150ème anniversaire de la naissance (‘Dies Natalis’) de Jean-Marie Vianney, m’amène à m’adresser à vous, les prêtres de l’Eglise de Chine, d’une façon toute particulière.

1. Une invitation à l’espoir. Dans la Lettre que le Saint Père a adressée aux évêques, aux prêtres, aux consacrés et aux fidèles laïcs de la République populaire de Chine le 27 mai 2007, un certain nombre de directives ont été données pour la poursuite du cheminement de l’Eglise. Parmi elles, je voudrais retenir la réconciliation entre les membres de la communauté catholique et le dialogue constructif et respectueux avec les autorités civiles, sans toutefois renoncer aux principes de la foi catholique. A cet égard, malgré la persistance de difficultés, les informations qui me sont parvenues de différents endroits de la Chine laissent la place à certains signes d’espérance.

Pour faire face à la situation ecclésiastique, politique et sociale qui est la vôtre, et pour progresser sur le chemin de la réconciliation et du dialogue, il est urgent pour chacun d’entre vous de tirer lumière et force des sources de la spiritualité de la prêtrise, que sont l’amour de Dieu et l’exemple du Christ.

A seulement deux ans de distance de la publication de la Lettre pontificale, il semble qu’il ne soit pas encore temps de dresser un bilan définitif. Pour reprendre les paroles d’un grand missionnaire de la Chine, le P. Matteo Ricci, je crois que nous pouvons dire que nous sommes encore dans le temps des semailles plutôt que dans celui des moissons.

Peut-être quelques-uns d’entre vous ont-ils été surpris par la Lettre du pape à l’Eglise de Chine. Mais je puis vous assurer que le Saint-Siège est au fait de la situation difficile et complexe dans laquelle vous vous trouvez. Quand il a ouvert l’Année du prêtre, le Saint Père a invité les prêtres du monde entier à « accueillir le nouveau printemps que l’Esprit apporte maintenant à l’Eglise ». Cela vaut aussi pour vous : les nouveaux défis que le peuple chinois doit affronter au début du troisième millénaire vous demandent de vous ouvrir avec confiance à l’avenir et de continuer à essayer de vivre la foi chrétienne dans son intégralité.

2. Proclamer le Christ. Chers frères prêtres, vous êtes les pasteurs du Peuple de Dieu dans un pays immense, tant géographiquement que démographiquement. Comme un petit troupeau au milieu d’une multitude, vous côtoyez les fidèles d’autres religions et des personnes indifférentes, voire hostiles à Dieu et à la religion.

Ne pensez pas que vous êtes seuls à connaître ces problèmes. En réalité, vous partagez la situation de beaucoup de vos frères dans le monde, qui « au milieu même des difficultés et de l’incompréhension, restent fidèles à leur vocation d’amis du Christ’ qu’il a appelés par leur nom, choisis et envoyés en mission » (Lettre pour l’indiction d’une année sacerdotale). La remarque du pape Benoît XVI vaut donc aussi pour vous : « Il existe aussi malheureusement des situations, jamais assez déplorées, où l’Église elle-même souffre de l’infidélité de certains de ses ministres. Et c’est pour le monde un motif de scandale et de refus. Ce qui, dans de tels cas peut être surtout profitable pour l’Eglise, ce n’est pas tant la pointilleuse révélation des faiblesses de ses ministres, mais plutôt une conscience renouvelée et joyeuse de la grandeur du don de Dieu, concrétisé dans les figures splendides de pasteurs généreux, de religieux brûlant d’amour pour Dieu et pour les âmes, de directeurs spirituels éclairés et patients. » (Lettre pour l’indiction d’une année sacerdotale). Quant à vous, en Chine, « Comment ne pas rappeler à ce propos, comme un encouragement pour tous, les figures lumineuses d’évêques et de prêtres qui, durant les années difficiles du passé récent, ont témoigné d’un amour indéfectible envers l’Eglise, même par le don de leur vie pour elle et pour le Christ ? » (Lettre à l’Eglise en Chine, para. 13).

Souvent, nous sommes effarés quand nous regardons le monde autour de nous. Tous ces gens qu’il faut nourrir ! Où pourrons-nous trouver du pain pour tous ? Comment pourrais-je, avec toutes mes limites, aider Jésus dans sa mission ? Une fois de plus, le Saint Père, en commentant le texte de l’Evangile de Jean (6,1-15) nous rappelle la réponse du Seigneur : « En prenant ‘dans ses mains saintes et vénérables’ le peu que sont les prêtres, nous, les prêtres devenons les instruments du salut pour beaucoup, pour tous ! » (Angélus, 26 juin 2009). Concrètement, il y a de nombreuses façons de valoriser votre contribution, par exemple, en visitant fréquemment les familles catholiques et non catholiques, également les villages, pour montrer votre préoccupation de leurs besoins, en redoublant d’efforts pour préparer et former de bons catéchistes, en aidant les services caritatifs qui s’adressent plus particulièrement aux enfants, aux malades et aux personnes âgées, afin de montrer la charité généreuse de l’Eglise, en organisant des rassemblements où des catholiques pourront inviter des parents et des amis non catholiques, afin de les familiariser avec l’Eglise et la foi catholiques, en distribuant des écrits catholiques aux non-catholiques.

3. Les vertus sacerdotales. Nous devons, à l’école de saint Jean-Marie Vianney, apprendre à nous identifier au ministère que nous avons reçu. Cette identification était totale pour le Christ : « En Jésus, Personne et Mission tendent à coïncider : toute son action salvifique était et est expression de son ‘Moi filial’ qui, de toute éternité, se tient devant le Père dans une attitude de soumission pleine d’amour à sa volonté. » (Lettre pour l’indiction d’une année sacerdotale). C’est de l’identification à son propre ministère que proviennent toutes les vertus nécessaires à chaque prêtre.

Le Saint Curé d’Ars savait comment parler à chacun, parce qu’il était un homme de prière : l’art du dialogue – à tout niveau – s’apprend dans le dialogue avec Dieu, dans la prière continue et sincère. Il vivait sa pauvreté avec une rigueur extrême, parce qu’il tenait toute chose qui lui était offerte comme étant destinée à son église, à ses pauvres et à ses familles les plus démunies. Il voyait sa chasteté comme l’exigence de son ministère de prêtre. C’était la chasteté qui convenait à celui qui avait habituellement à toucher l’Eucharistie. Nous savons aussi combien il était tourmenté à la pensée de son inaptitude au ministère d’une paroisse et au désir de s’en échapper : seules l’obéissance et la passion des âmes réussirent à le convaincre de rester à son poste. La règle d’or pour une vie d’obéissance lui paraissait devoir être : « Ne fais que ce qui peut être offert au Seigneur. »

4. L’Eucharistie. En cette année sacerdotale, je souhaite vous rappeler la source où vous pouvez trouver la force d’être fidèle à votre importante mission. Et je souhaite le faire avec les paroles mêmes du pape Benoît XVI : dans l’Eglise, « toute grande réforme est liée, d’une certaine manière, à la redécouverte de la foi en la présence eucharistique du Seigneur au milieu de son peuple » (Lettre à l’Eglise en Chine, para. 5, note 20).

La célébration du mystère pascal révèle l’agape, c’est-à-dire l’amour de Dieu, cet amour qui anéanti le mal et, qui par conséquent, change le mal en bien et la haine en amour. Par le partage du Corps et du Sang du Christ dans l’Eucharistie – comme nous l’a rappelé le Saint Père –, cette divine énergie « pénètre notre corps pour continuer son œuvre en nous et par nous » (Lettre encyclique Deus Caritas Est, para. 14). Unis au Christ dans l’Eucharistie, nous devenons les instruments de la véritable transformation des cœurs (cf. Deus Caritas Est, para. 13-14). Comme le disait le Saint Curé d’Ars, « toutes les bonnes œuvres réunies ne valent pas le Sacrifice de la Messe, parce qu’elles viennent des hommes, alors que la Sainte Messe vient de Dieu ».

L’Eucharistie, sacrement de communion, source et sommet de la vie ecclésiale et de l’évangélisation, est au centre de votre cheminement de réconciliation. L’Eucharistie, même si elle est célébrée dans une communauté, n’est jamais la célébration de cette seule communauté. Une communauté réellement eucharistique ne peut pas se replier sur elle-même, comme si elle se suffisait à elle-même, elle doit rester en communion avec toutes les autres communautés catholiques. En fait, la célébration de l’Eucharistie présuppose une union avec le pape, l’ordre des évêques, tout le clergé et la totalité du peuple de Dieu et non pas seulement avec l’évêque du diocèse.

Saint Paul écrivait aux chrétiens de Corinthe pour leur montrer combien leurs divisions, dans leurs assemblées eucharistiques, contrastaient avec le sacrement qu’ils célébraient – la Cène du Seigneur. L’apôtre les invitait donc à réfléchir sur la réalité de l’Eucharistie pour qu’ils reviennent à l’esprit fraternel de la communion (cf. 1 Cor 11,17-34).

Le pape Jean Paul II nous rappelait que l’Eucharistie créait la communion et enseignait la communion. Et Benoît XVI, faisant écho à cet enseignement, a donné quelques directives concernant la réception des sacrements dans l’Eglise de Chine aujourd’hui (cf. Lettre à l’Eglise en Chine, para. 10). Ces directives sont enracinées « dans la promotion de la communion » et dans « la charité, qui est au-dessus de tout » : elles ont été rappelées dans le Compendium de la même lettre pontificale qui a été publiée par le Saint-Siège le 24 mai 2009.

5. La Parole de Dieu. Puis-je vous rappeler encore une fois, chers prêtres, les paroles du Saint Père Benoît XVI : « Dans le monde d’aujourd’hui, comme dans les temps difficiles du Curé d’Ars, il faut que les prêtres, dans leurs vies et leurs actions, se distinguent par la force de leur témoignage évangélique ». Paul VI faisait remarquer avec justesse : « L’homme contemporain écoute plus volontiers les témoins que les maîtres, ou, s’il écoute les maîtres, c’est parce qu’ils sont des témoins ». Pour éviter que ne surgisse en nous un vide existentiel et que ne soit compromise l’efficacité de notre ministère, il faut que nous nous interrogions toujours de nouveau : « Sommes-nous vraiment imprégnés de la Parole de Dieu ? Est-elle vraiment la nourriture qui nous fait vivre, plus encore que le pain et les choses de ce monde ? La connaissons-nous vraiment ? L’aimons-nous ? Intérieurement, nous préoccupons-nous de cette Parole au point qu’elle façonne réellement notre vie et informe notre pensée ? ». Tout comme Jésus appela les Douze pour qu’ils demeurent avec lui (cf. Mc 3,14) et que, après seulement, il les envoya prêcher, de même, de nos jours, les prêtres sont appelés à assimiler ce « nouveau style de vie » qui a été inauguré par le Seigneur Jésus et qui est devenu précisément celui des Apôtres. » (Lettre pour l’indiction d’une année sacerdotale).

6. La tâche des évêques. Chers prêtres, permettez moi maintenant d’adresser aussi quelques mots à vos évêques, qui ont reçu la prêtrise en plénitude. A vous chers frères dans l’épiscopat, je voudrais vous rappeler que le cheminement de vos prêtres vers la sainteté a été confié à votre attention pastorale. Si l’on pense aux conditions sociales et culturelles du monde d’aujourd’hui, il est aisé de comprendre combien pèse sur les prêtres le danger de la dispersion dans un grand nombre de tâches différentes.

L’expérience de chaque jour montre que les germes de division entre les peuples sont profondément enfouis au cœur de l’humanité par suite du péché, mais l’Eglise peut offrir en réponse la puissance du Corps du Christ pour ramener l’unité. Le concile Vatican II a nommé la charité pastorale comme le lien qui unit la vie et l’activité des prêtres.

7. L’activité pastorale en faveur des vocations des prêtres. Comme le Saint Père nous l’a rappelé, « au cours des cinquante dernières années, une abondante floraison de vocations au sacerdoce et à la vie consacrée n’a pas fait défaut. Il faut rendre grâce de cela au Seigneur, parce qu’il s’agit d’un signe de vitalité et d’un motif d’espérance. […] une telle floraison s’accompagne aujourd’hui de nombreuses difficultés. L’exigence, tant d’un discernement vocationnel plus attentif de la part des responsables ecclésiaux, que d’une éducation et d’un enseignement plus approfondis des candidats au sacerdoce et à la vie religieuse, se fait donc jour. En dépit de la précarité des moyens à disposition, il faudra, pour l’avenir de l’Eglise en Chine, s’attacher à assurer, d’une part, une attention et un soin particuliers aux vocations et, d’autre part, une formation plus solide en ce qui concerne les aspects humain, spirituel, philosophique, théologique et pastoral, à mettre en œuvre dans les séminaires et dans les instituts religieux. » (Lettre à l’Eglise en Chine, para. 14).

Que la célébration de l’Année du prêtre soit donc l’occasion de lancer des initiatives pour soutenir vos séminaristes. Vous serez ainsi capables, chers évêques, d’apporter une attention particulière à leur formation, en leur rendant visite dans leurs séminaires et en vous attachant à la formation qu’ils y reçoivent sur le plan spirituel et sur le plan académique. Par ailleurs, votre affection paternelle vous suggèrera, selon les possibilités et les conditions de chaque diocèse, les initiatives adéquates pour la promotion de la prêtrise, telles que des journées ou des réunions de prières, l’ouverture de locaux où des prêtres et des fidèles – particulièrement les plus jeunes – pourront venir prier ensemble, sous la conduite d’un spécialiste ou d’un prêtre expérimenté qui joueront le rôle de directeurs spirituels.

8. La formation permanente. Le Saint Père Benoît XVI comprend qu’« en Chine aussi, comme dans le reste de l’Église, la nécessité d’une formation permanente appropriée du clergé se fait jour. De là naît l’invitation qui vous est adressée à vous, les évêques, en tant que responsables des communautés ecclésiales, à penser spécialement aux jeunes prêtres, qui sont toujours davantage soumis à de nouveaux défis pastoraux liés aux exigences de la tâche d’évangéliser une société aussi complexe que la société chinoise actuelle. Le pape Jean Paul II nous le rappelait: la formation permanente des prêtres « est une exigence intrinsèque du don de l’ordination et du ministère sacramentel ainsi reçu. Elle se révèle toujours nécessaire, en tout temps. Aujourd’hui cependant, elle est particulièrement urgente, non seulement à cause de la mutation rapide des conditions sociales et culturelles des personnes et des peuples auprès desquels s’exerce le ministère presbytéral, mais aussi pour la ‘nouvelle évangélisation’, qui constitue la tâche urgente de l’Eglise en cette fin du deuxième millénaire ». ». (Lettre à l’Eglise en Chine, para. 13).

Chaque évêque, en communion avec ses frères évêques des diocèses environnants, se préoccupera d’organiser et de suivre personnellement de véritables programmes de formation permanente. Les jeunes prêtres devraient bénéficier d’une attention particulière, alors qu’ils ont fréquemment à travailler seuls, et rapidement après leur ordination. Ils se sentent souvent isolés, avec de lourdes responsabilités. Non seulement les évêques devraient s’attacher à leur formation permanente, mais encore, ils devraient s’assurer qu’ils sont bien reçus et soutenus par le clergé en place. De plus, il serait bienvenu que les évêques et les prêtres trouvent de fréquentes occasions de se rencontrer et d’augmenter le nombre de leurs réunions formelles et informelles pour prévoir ensemble des activités diocésaines, partager leurs expériences et s’aider les uns les autres à résoudre leurs difficultés personnelles et pastorales.

9. L’adoration eucharistique. Le Saint Curé d’Ars nous apprend que l’adoration de l’Eucharistie, en dehors de la messe, est d’une valeur inestimable dans la vie d’un prêtre. L’adoration est étroitement liée à la célébration de l’Eucharistie. C’est notre rôle en tant que pasteur que d’encourager l’adoration eucharistique, soit par des témoignages personnels, soit par l’organisation d’une heure hebdomadaire d’adoration ou d’une procession dans les paroisses et dans le diocèse. De cette façon, les fidèles pourront se rassembler autour de l’Eucharistie et connaître la communion ecclésiale.

A cette proposition, j’aimerais ajouter le souvenir de ce que le pape Jean Paul II nous a laissé presque comme un testament : « Il est bon de s’entretenir avec Lui et, penchés sur sa poitrine comme le disciple bien-aimé (cf. Jn 13,25), d’être touchés par l’amour infini de son cœur. Si, à notre époque, le christianisme doit se distinguer surtout par « l’art de la prière », comment ne pas ressentir le besoin renouvelé de demeurer longuement, en conversation spirituelle, en adoration silencieuse, en attitude d’amour, devant le Christ présent dans le Saint-Sacrement? Bien des fois, chers frères et sœurs, j’ai fait cette expérience et j’en ai reçu force, consolation et soutien ! » (Lettre encyclique Ecclesia de Eucharistia, para. 25).

10. La réconciliation spirituelle des cœurs. Que peut-on faire en face des divisions persistantes à l’intérieur de la communauté catholique et des détresses qui y sont aussi présentes ? Si nous sommes dans l’union avec le Christ eucharistique, toutes les détresses du monde résonnent dans nos cœurs pour implorer la clémence de Dieu. Parallèlement, nous faisons monter un hymne de louange et d’action de grâces pour toutes les beautés de la création, pour les œuvres de bien des hommes et pour les dons de la grâce sans nombre que le Seigneur répand sur l’humanité : le cœur s’ouvre largement à un amour plus grand qui respire du souffle même du Christ, qui est mort et ressuscité des morts.

Nous ne devrions pas oublier que même « la communauté des disciples connaît dès le début non seulement la joie de l’Esprit Saint, la grâce de la vérité et de l’amour, mais également l’épreuve, constituée surtout par les oppositions aux vérités de foi, avec les atteintes à la communion qui s’ensuivent. De même que la communion dans l’amour existe depuis les origines et existera jusqu’à la fin (cf. 1 Jn 1,1 et ss), dès le début surgit aussi malheureusement la division. Nous ne devons pas nous étonner que celle-là existe également aujourd’hui » (Lettre à l’Eglise en Chine, para. 6).

Dans sa première lettre aux Corinthiens, à propos des divisions existant dans leurs communautés, saint Paul écrivait : « Il faut bien qu’il y ait aussi des scissions parmi vous, afin de permettre aux hommes éprouvés de se manifester » (1 Cor 11,19). Tout fait partie du plan de Dieu, afin que tout puisse servir à sa toute puissance, qui est sagesse et amour infini. Qu’alors personne n’hésite à se réconcilier avec des gestes concrets, à tendre la main à son frère qui « a quelque chose contre vous » (cf. Matt 5,23). Pour parvenir à cette réconciliation, il est urgent de faire attention au degré de formation de tous les fidèles, prêtres et religieuses compris, parce que le manque de maturité, de maîtrise de soi et d’harmonie intérieure sont la source la plus fréquente des incompréhensions, du manque de coopération et des conflits à l’intérieur des communautés catholiques.

11. Les organismes de communion. Dans la perspective de « l’ecclésiologie de la communion », qui est la pensée centrale et fondamentale des documents du concile Vatican II, il semble opportun d’attirer votre attention sur ce que la législation canonique fournit pour aider la tâche pastorale des évêques et le développement de la communauté diocésaine : « Chaque évêque diocésain est invité à se servir des instruments indispensables de communion et de collaboration au sein de la communauté catholique diocésaine : la curie diocésaine, le conseil presbytéral, le collège des consulteurs, le conseil pastoral diocésain et le conseil diocésain pour les affaires économiques. Ces organismes manifestent la communion, favorisent le partage des responsabilités communes et sont d’une grande aide pour les Pasteurs, qui peuvent ainsi être assurés de la collaboration fraternelle de prêtres, de personnes consacrées et de fidèles laïcs. » (Lettre à l’Eglise en Chine, para. 10).

Quand la curie diocésaine ne peut pas être réunie au complet par suite d’un manque de prêtres, les évêques doivent au moins commencer à diversifier les rôles de chacun, en nommant progressivement un vicaire général, un chancelier, un procurateur, etc., de manière à avoir quelqu’un de disponible pour une consultation ou une coopération lors de décisions juridiques et pastorales.

Je souhaite conclure ma lettre en exprimant le souhait, que je confie à la Très Sainte Vierge, que votre vie de prêtre soit guidée de plus en plus par ces idéaux de don total de soi au Christ et à l’Eglise, qui ont inspiré les pensées et l’action du Saint Curé d’Ars.
Uni avec vous dans la prière et dans l’espoir que votre travail pastoral porte une riche moisson, je reste votre tout dévoué dans le Seigneur

Tarcisio Card. Bertone
Secrétaire d’Etat