Eglises d'Asie

Commission pour la Chine : appel à la libération des prêtres et évêques emprisonnés et invitation au travail dans l’unité pour les évêques

Publié le 08/04/2010




La libération des prêtres et évêques emprisonnés en Chine continentale et un appel aux évêques pour qu’ils travaillent à l’unité de l’Eglise en Chine : ce sont les deux points qui dominent les conclusions de la commission réunie au Vatican, indiquait l’agence Zenit dans une dépêche du 25 mars.Le Saint-Siège a en effet publié le 25 mars un communiqué détaillé sur les travaux…

… de la Commission pour l’Eglise en Chine, instituée par Benoît XVI en 2007 et qui s’est réunie du 22 au 24 mars au Vatican (1).

Les membres de la commission ont voulu prier pour la libération de leurs confrères privés de libertés en raison de leur état de prêtres ou évêques catholiques, et pour qu’ils puissent le plus vite possible « reprendre leur ministère épiscopal et sacerdotal au service des fidèles confiés à leurs soins pastoraux ». A ce jour, on compte trois évêques de la partie « clandestine » de l’Eglise en Chine détenus en prison ou en résidence surveillée et plusieurs dizaines de prêtres.

A la lumière de la lettre de Benoît XVI aux catholiques de Chine du 27 mai 2007, la commission a réfléchi, indique le communiqué, « à la façon de promouvoir l’unité à l’intérieur de l’Eglise catholique en Chine et de surmonter les difficultés que celle-ci rencontre dans ses relations avec la société civile ». Si l’expression « société civile » peut surprendre ici dans la mesure où l’Eglise rencontre des difficultés non pas avec la société civile elle-même mais bien avec le pouvoir politique, la commission insiste sur le fait que l’unité passe par chaque catholique en Chine et les efforts qu’il est amené à faire en faveur de l’unité. La commission salue ainsi « les pas accomplis en réponse à l’invitation du pape à une communion ecclésiale authentique, qui ne peut pas s’exprimer sans un effort personnel de recherche de la vérité et de la réconciliation spirituelle ».

Les membres de la commission ont souhaité que « tous les évêques de Chine soient toujours plus engagés pour favoriser la croissance de l’unité de la foi et de la vie de tous les catholiques, en évitant par conséquent de poser des gestes (comme par exemple des célébrations des sacrements, des ordinations épiscopales, la participation à des réunions) qui sont en contradiction avec la communion avec le pape, qui les a nommés comme pasteurs, et qui créent des difficultés, parfois angoissantes, au sein des communautés ecclésiales respectives ». A travers ces quelques lignes, le Saint-Siège s’exprime pour la première fois avec une particulière clarté : on peut y voir un appel aux évêques « clandestins » qui rechignent à faire un pas en direction de leurs frères dans l’épiscopat « officiel » ; on peut surtout y voir une mise en garde adressée aux évêques « officiels », à ceux qui sont reconnus comme tels par le pape, à ne pas prendre part à des ordinations épiscopales de futurs évêques qui seraient ordonnés sans mandat pontifical ou bien encore à participer à des assemblées telle l’Assemblée nationale des représentants catholiques. Plusieurs fois repoussée (2), la tenue de cette assemblée, qui n’a aucune légitimité ecclésiale dans la mesure où elle prétend se placer au-dessus de la Conférence des évêques « officiels » de Chine, devrait être convoquée avant la fin de l’année 2010.

Toujours selon le communiqué du 25 mars, la commission souhaite que l’on puisse surmonter « les difficultés actuelles » concernant la liberté de l’Eglise en Chine grâce à un « dialogue respectueux et ouvert entre le Saint-Siège et les autorités gouvernementales » qui conduise à une « entente fructueuse » en faveur de la communauté catholique et de la « cohabitation sociale ». Et pour surmonter ces difficultés, la commission a encourage la promotion de l’unité dans l’Eglise en Chine. La note souligne que les pasteurs ont « conscience que le chemin de pardon et de réconciliation ne pourra pas s’accomplir du jour au lendemain », mais que « l’Eglise tout entière accompagne ce chemin » et tout spécialement lors de la Journée de prière pour l’Eglise en Chine instituée par Benoît XVI et fixée au 24 mai de chaque année, en la fête de Marie Auxiliatrice.

Benoît XVI, qui a rencontré la commission au terme de ses travaux, a souligné la nécessité de fournir à ceux qui se préparent au sacerdoce et à la vie consacrée, une solide formation spirituelle centrée sur « l’amitié avec Jésus », qui garantit le succès à la fois au plan personnel et au plan pastoral. Le pape a souligné l’importance de la mission confiée aux formateurs et a rappelé que, pour les évêques, il s’agit d’une responsabilité « prioritaire ». Ce faisant, Benoît XVI affirme bien que la formation ressort du domaine exclusif des évêques, sans que les autorités civiles s’arrogent un droit de regard sur les enseignements dispensés dans les grands séminaires « officiels » de Chine, comme cela est souvent le cas.

Réunion après réunion, le thème de la formation demeure au centre des préoccupations de la Commission pour la Chine. La première réunion avait eu lieu les 10-12 mars 2008, et était centrée sur la Lettre de Benoît XVI aux catholiques de Chine (27 mai 2007), son « accueil » dans et en dehors de l’Eglise, les « principes théologiques » inspirateurs de la Lettre, et les « perspectives » qu’elle ouvrait pour les catholiques de Chine. La deuxième, tenue du 30 mars au 1er avril 2009, avait commencé à examiner le thème de la « formation humaine, intellectuelle, spirituelle et pastorale des séminaristes et des personnes consacrées, ainsi que la formation permanente des prêtres ». Celle qui vient de s’achever se proposait d’« approfondir le thème de la formation afin qu’en Chine, comme dans le reste du monde, l’action des prêtres et des personnes consacrées aide l’Eglise à incarner l’Evangile et à lui rendre témoignage, y compris face aux défis de l’évolution de la situation sociale et culturelle ». A travers l’insistance mise sur la formation, on peut penser que Rome et ceux qui sont appelés à travailler aux côtés de l’Eglise en Chine, cherchent à renforcer la structuration intellectuelle et spirituelle des évêques, prêtres et laïcs chinois qui sont amenés, au quotidien, à négocier l’espace de liberté que le régime veut bien laisser à l’Eglise.

Interrogé par l’agence AsiaNews (3), le cardinal Zen Ze-kiun, évêque émérite de Hongkong et membre de la Commission pour la Chine, s’est dit très satisfait de la « clarté » du communiqué rendu public le 25 mars. Le passage du communiqué où il est fait mention de la nécessité d’éviter « les gestes qui sont en contradiction avec la communion avec le pape » renvoie directement aux vigoureux propos que le cardinal Zen avait tenus le 4 janvier 2009 (4). Dans la perspective, déjà, de la convocation de l’Assemblée nationale des catholiques chinois, le cardinal avait appelé les évêques « officiels » à « ne pas avoir peur ». « Prendre part à une telle assemblée ne revient-il pas à poser un acte qui fait mine d’ignorer totalement la Lettre du pape ? (…) Votre conscience vous permet-elle cela ? Le peuple de Dieu acceptera-t-il cela ? Notre pays peut-il en être fier ? », avait écrit Mgr Zen, ajoutant : « Le compromis peut être une stratégie provisoire, mais cette situation ne saurait durer éternellement. Etre parfaitement uni au Saint-Père en son for intérieur et, en même temps, faire partie d’une Eglise qui se dit autonome présente une contradiction dans les termes. »