Eglises d'Asie

Fujian : l’évêque « clandestin » de Fuzhou est décédé à l’âge de 91 ans

Publié le 01/09/2010




Le 28 août dernier, Mgr John Yang Shudao, évêque « clandestin » du diocèse de Fuzhou, est décédé à l’âge de 91 ans. Survenu quelques jours plus tôt, un arrêt cardiaque l’avait plongé dans le coma. Selon des sources locales, l’évêque de cet important diocèse de la province du Fujian, hospitalisé dans un premier temps, est mort chez lui, dans le district de Lianjiang, au sein de la maison de religieuses où il vivait depuis quelques années, …

… après son retrait de la direction effective du diocèse.

Mgr Yang Shudao appartenait à cette génération de prêtres formés dans les séminaires de Chine avant la prise du pouvoir par les communistes en 1949, qui eurent à faire face à la mise en place de la politique religieuse du nouveau régime. Né le 16 avril 1919, ordonné prêtre en 1947, le P. Yang a ainsi fait partie d’un groupe de prêtres de Fuzhou arrêtés au début des années 1950 ; jugé en 1955, il fut condamné à la réclusion à perpétuité pour son refus à rejeter le pape comme chef de l’Eglise et pour sa non-acceptation des structures que le régime mettait alors en place, à savoir l’Association patriotique des catholiques chinois. Ce n’est qu’en 1981, après vingt-six années de prison et à la faveur des réformes entreprises par Deng Xiaoping, que le P. Yang fut libéré. En 1987, il était ordonné dans la clandestinité évêque de Fuzhou, ce qui lui valut d’être à nouveau arrêté, en 1988, et emprisonné pour trois années supplémentaires. Après sa deuxième libération, la surveillance policière ne se relâcha pas et il sera interpellé à plusieurs reprises (1). Au total, Mgr Yang Shudao aura passé un tiers de sa vie en prison.

 

Situé dans la province côtière du Fujian, dans une région économiquement prospère, le diocèse de Fuzhou, avec quelque 250 000 fidèles, est connu pour abriter une communauté catholique forte et visible. Il est également connu pour les divisions profondes qui traversent cette communauté. Au fil des années, les autorités n’ont pas ménagé leur peine pour convaincre le clergé « clandestin » de rejoindre les structures officielles de l’Eglise – souvent en vain, mais en provoquant de nouvelles scissions. Ainsi, aujourd’hui, sur la bonne centaine de prêtres que compte le diocèse, 27 seulement pratiquent leur ministère de manière « officielle » et n’entretiennent pas de fréquents contacts avec les 81 prêtres « clandestins ». Parmi ceux-ci, on compte deux « factions » : l’une fidèle à Mgr Yang Shudao et l’autre suivant un prêtre, le P. Lin Yuntuan (2).

 

Pour les observateurs locaux, l’organisation et le déroulement des funérailles de Mgr Yang Shudao vont être l’occasion de voir si une réconciliation est possible au sein de l’ensemble de la communauté diocésaine. Les obsèques sont prévues pour le 1er septembre et devraient être célébrées par Mgr Peter Lin Jiashan en l’église de Lianjiang, qui peut accueillir 3 000 fidèles. Evêque « clandestin », Mgr Lin était précédemment évêque coadjuteur de Fuzhou ; il est aujourd’hui préfet apostolique de Jian’ou, diocèse situé à 300 km au nord-ouest de Fuzhou.

 

Selon l’agence Ucanews (3), dès l’annonce de la mort de Mgr Yang Shudao, des représentants des autorités chinoises sont venus aux nouvelles et ont exprimé leurs craintes quant aux conditions de sécurité dans lesquelles les obsèques devraient se dérouler. Ils ont prévenu que le nombre des fidèles devrait être restreint.

 

Du côté du clergé « officiel » du Fuzhou, le P. Li Ronghua, qui fait office de coordinateur, a précisé à Ucanews qu’il avait appris la nouvelle du décès de l’évêque mais n’avait pas reçu d’informations complémentaires de la partie « clandestine » de l’Eglise. Lui-même et une bonne partie des jeunes prêtres « officiels » n’ont jamais rencontré physiquement l’évêque décédé, a-t-il précisé.

 

D’un point de vue canonique, c’est l’évêque du diocèse voisin de Mindong, Mgr Vincent Huang Shoucheng, évêque « clandestin », qui est l’administrateur du diocèse de Fuzhou. On ne sait pas encore s’il pourra participer aux funérailles. « Si les différentes factions coopèrent pour la messe des obsèques, on peut penser que la communication sera possible. Dans le cas contraire, la réconciliation restera un vœu pieux », analyse une source locale citée par Ucanews.