Eglises d'Asie

Un bureau catholique des mariages pour des unions arrangées sans danger

Publié le 07/10/2010




Comme la quasi-totalité des jeunes femmes célibataires de son âge, Sonali rêve de convoler en justes noces avec l’homme de ses rêves, un mari aimant qui lui offrira la quiétude d’un foyer confortable. Modeste employée d’une usine de produits manufacturés, Sonali a toutefois fait les frais d’un prétendant particulièrement indélicat : après des premiers contacts prometteurs, …

… celui-ci s’est envolé avec l’argent et les bijoux que Sonali lui avait confiés. Pour aider ces jeunes femmes à la recherche de l’âme sœur dans un pays où les mariages arrangés sont la norme, une congrégation religieuse catholique a ouvert un bureau des mariages où ne sont mis en contact que des jeunes femmes et des jeunes hommes dont les motivations ont été vérifiées.

Si les mariages d’amour existent au Sri Lanka, la société les tient pour dangereux. Une jeune femme qui se marierait par amour sans avoir fait valider son choix par ses proches serait considérée comme ayant un caractère incontrôlable et ferait retomber sur sa famille une tâche indélébile. C’est dire si la plupart des mariages sont des mariages arrangés, au sens où ce n’est pas le ou la futur(e) marié(e) qui décide du choix de son conjoint, mais ses parents, éventuellement aidés d’une entremetteuse.

Avec le développement économique, les agences matrimoniales se sont multipliées et l’on en trouve aujourd’hui partout dans les grandes villes, le meilleur côtoyant le pire. Sonali avait déposée une petite annonce auprès de l’une de ces agences. Peu après, l’agence lui envoya un jeune homme et, les premiers contacts étant positifs, Sonali fut encline à lui faire confiance. Son prétendant l’avait convaincue qu’il fallait qu’avant le mariage, ils commencent à construire la maison qui abriterait leur futur foyer. Pour cela, Sonali confia argent et bijoux au jeune homme, lequel s’empressa de disparaître sans laisser de traces.

En pareil cas, les jeunes femmes flouées n’ont aucun recours. La police ne donne pas suite à ce type de plaintes, le plus souvent faute d’éléments d’information suffisants pour retrouver les soi-disant prétendants. C’est pour éviter de telles histoires malheureuses que les sœurs de la Congrégation de la Sainte Famille à Colombo ont mis sur pied un bureau catholique des mariages. Rattaché à la paroisse de Fatima, le bureau aide les familles à trouver le conjoint qui conviendra à leur enfant. Une tâche rendue plus difficile par les bouleversements qu’ont causé ou causent encore les traditions, la guerre, les migrations ou bien encore le chômage, explique à l’agence Ucanews Sr Marie Matilda, responsable du Holy Family Marriage Bureau (1).

Selon Sr Marie Matilda, il est vain de penser qu’une jeune femme puisse au Sri Lanka se marier contre la volonté de ses parents ou sans respecter les usages sociaux. Une autre religieuse active au bureau des mariages, Sœur P. M. Freeda, précise que le système de la dot, très vivace, fait peser une lourde charge sur les familles et amènent celles-ci à repousser un mariage. « Et ce sont les jeunes femmes qui en souffrent le plus », ajoute-t-elle.

Saraswathi Naganathan, médecin de profession, de religion hindoue et militant des droits de l’homme, explique que les contraintes sont telles qu’« une jeune femme arrivée à l’âge du mariage est perçue comme un poids, pour peu que ses parents soient soumis aux obligations liées à la religion, à l’appartenance ethnique, à la langue, à la caste et à la culture ».

Dans ce contexte, Sr Marie Matilda indique que le travail du Holy Family Marriage Bureau est de se montrer très rigoureux dans l’examen des motivations des familles qui viennent lui demander de l’aide. « Nous ne donnons jamais les noms des jeunes femmes et des jeunes hommes qui nous sont confiés tant que nous ne sommes pas sûres de l’identité des prétendants que nous pouvons proposer », précise-t-elle.

Ouvert en 2004, le Holy Family Marriage Bureau accepte les demandes en vue d’un mariage de tous et toutes, quelle que soit leur religion (2), à la condition que les prétendants des deux sexes soient âgés de 20 ans au moins. Les coordonnées, profils et photographies sont conservés de manière strictement confidentielle – contrairement à nombre d’agences matrimoniales qui mettent en avant données personnelles et photos – pour un coût minime de 100 roupies (64 centimes d’euro). En moyenne, les religieuses sont en mesure d’organiser 75 rencontres par mois, et la plupart d’entre elles se concluent par un mariage en bonne et due forme.