Eglises d'Asie

Une grande figure de l’islam modéré, en faveur du dialogue et contre la loi anti-blasphème, a été assassinée par les talibans

Publié le 18/10/2010




« Sa disparition est une perte grave pour l’islam modéré du Pakistan. C’est un coup donné au dialogue interreligieux et un avertissement pour tous les musulmans qui se déclarent opposés à la loi inique sur le blasphème. » C’est par ces mots que l’intellectuel catholique Francis Mehboob Sada, directeur du Christian Study Center (CSC) de Rawalpindi, a commenté pour l’agence Fides l’assassinat de Mohammad Farooq Khan, …

… une personnalité du monde musulman, vice-chancelier à l’Université islamique de Swat, dans la province de Khyber Pakhtunkhwa (ex-Province de la Frontière du Nord-ouest) (1).

Farooq Khan, qui était aussi psychiatre, a été tué le 3 octobre dernier à Merdan dans la clinique où il consultait. Il a été abattu par deux hommes non identifiés qui s’étaient fait passer pour des patients. Selon les premiers éléments de l’enquête, des groupes talibans, qui infestent la zone et qui voyaient d’un très mauvais œil l’intense activité de conférencier et de leader d’opinion de la victime, auraient commandité l’assassinat.

Pour Francis Mehboob Sada, « Farooq Khan est une nouvelle victime de l’extrémisme islamique. Sa vision de l’islam centrée sur les valeurs de la personne et sur les droits de l’homme était férocement combattue par les talibans. Le courage avec lequel il défendait publiquement ses idées lui a coûté la vie. C’était un excellent ami du Christian Study Center. Il participait à nos conférences et aux séminaires, avec un esprit de dialogue constructif. Nous étions d’accord sur de nombreux thèmes concernant la société pakistanaise, comme celui de l’urgence à abolir la loi sur le blasphème. Aujourd’hui, nous participons au deuil de sa famille. Il s’agit d’une grave perte pour l’islam pakistanais et pour tout le pays. Peu d’intellectuels musulmans sont capables de relever son héritage et de développer des idées modérées avec autant de courage. »

Le directeur du CSC rappelle la vision de Faroop Khan : « Il disait être un humaniste, vouloir le bien de l’humanité, défendre la dignité de tout être humain. Ses valeurs de référence étaient l’égalité, la démocratie, la justice, l’honnêteté, le mérite, le travail, l’Etat de droit, le témoignage et la patience, l’instruction. En tant que musulman, dans la vision sur l’islam, il avait le devoir de respecter ces valeurs. Il était critique envers les interprétations restrictives de la foi musulmane. Au-delà de tout, répétait-il, il y a la dignité et le développement de la personne. » La communauté chrétienne et les défenseurs des droits de l’homme au Pakistan ont perdu un ami et un précieux allié, conclut Fides.