Eglises d'Asie

POUR APPROFONDIR – Huitième Assemblée nationale des représentants catholiques : une farce sans gagnant

Publié le 04/02/2011




La Huitième Assemblée nationale des représentants catholiques, tenue à Pékin du 7 au 9 décembre 2010, a été l’occasion, pour le gouvernement chinois, de réaffirmer sa volonté de contrôle sur l’Eglise catholique en Chine. Jusqu’à présent, rares ont été les réactions des catholiques chinois à cet événement. Le 28 décembre 2010, l’agence Ucanews a publié le texte ci-dessous. Il est signé du pseudonyme de « Cyclops », …

derrière lequel se dissimule un groupe de prêtres appartenant à la partie « clandestine » de l’Eglise en Chine. La traduction en français est de la rédaction d’Eglises d’Asie.

 

La Huitième Assemblée nationale des représentants catholiques a consisté en un montage politique dont l’objet était, pour le gouvernement chinois, de défier le Vatican (1). En réalité, elle n’a été qu’une farce dont personne n’est sorti gagnant.

Comme chacun sait, l’obstacle principal qui empêche une normalisation des relations diplomatiques entre la Chine et le Saint-Siège est la question de la nomination des évêques. Le Vatican défend, en la matière, la suprématie spirituelle du pape, tandis que la Chine n’entend pas abandonner le contrôle qu’elle exerce sur l’Eglise en Chine.

Le résultat des élections qui ont été menées lors de la Huitième Assemblée nationale des représentants catholiques revêt une importance politique considérable, même si chacun sait que ces élections n’avaient d’élections que le nom (les résultats des votes étaient fixés à l’avance).

Mgr Joseph Ma Yinglin, évêque illégitime, a été nommé président de la Conférence des évêques catholiques de Chine. Chacun doit savoir que les neuf dixièmes des 64 évêques « officiels » sont des évêques légitimes, i.e. en communion avec le Saint-Père. De cette façon, avec Mgr Ma comme président, l’illégitimité de la Conférence des évêques « officiels » n’en apparaît que de manière plus flagrante.

Ces dernières années, la Chine et le Vatican semblaient avoir trouvé un consensus, un mode opératoire aux termes duquel la plupart des nouveaux évêques étaient reconnus par les deux parties en présence. Mais la procédure ainsi élaborée veut que la candidature d’un futur évêque « officiel » passe par la Conférence des évêques « officiels ». De fait, dans le processus de sélection des nouveaux évêques, Mgr Ma, évêque illégitime, se retrouve, en tant que président de la Conférence épiscopale, dans une position équivalente, sinon supérieure en suprématie, à celle du Vatican.

La décision des autorités chinoises de désigner comme seul candidat à la présidence de l’Association patriotique des catholiques chinois, Mgr Johan Fang Xingyao, un évêque reconnu par le pape, a été prise avec la volonté de provoquer Rome. En effet, le Saint-Père avait pris soin d’écrire, dans sa lettre de 2007, que l’Association patriotique était un organisme incompatible avec la doctrine catholique.

L’ancien vice-président de l’Association patriotique, Anthony Liu Bainian, a été nommé président honoraire de la Conférence épiscopale et de l’Association patriotique. Même s’il se place ainsi en arrière-plan, il continuera d’exercer le pouvoir au sein des instances « officielles », et son rôle continuera de s’assurer que l’Eglise de Chine poursuit sa route vers les trois autonomies, y compris l’élection et l’ordination « libres » des évêques.

Le gouvernement chinois semble donc avoir repris le dessus dans les relations Chine-Vatican, en terminant une Assemblée comme il le souhaitait. Mais ce n’est pas une vraie victoire. Cette Assemblée a été une farce sans vainqueur, car la Chine a gagné comme un voyou qui s’aliènerait le respect des autres. La Chine souhaite se présenter comme une grande puissance, mais si elle ne s’ouvre pas à la religion, elle aura de grandes difficultés à gagner le respect du reste du monde.

Beaucoup de gens s’inquiètent de ce que des évêques illégitimes détiennent des postes clés et que les évêques légitimes aient à faire face à des situations difficiles en concélébrant la messe avec eux.

En fait, ces inquiétudes sont infondées parce que, depuis 1980, ce sont des évêques illégitimes qui ont dirigé la Conférence épiscopale et que l’Eglise de Chine n’a connu aucune amélioration sous leur direction.

Même si la direction de l’Eglise, dans sa totalité, était assurée par des évêques légitimes, ces derniers ne parviendraient pas à la remettre sur le droit chemin, car ce n’est pas eux qui ont le pouvoir de décision.

De plus, il se peut qu’il n’y ait pratiquement pas de différences dans la façon de penser des évêques légitimes et des évêques illégitimes dans la partie « officielle » de l’Eglise, dans la mesure où le fait d’être reconnu comme un évêque légitime par le pape n’est en rien une garantie quant à la pureté de la foi ou au courage de chacun. Trop de facteurs politiques sont mêlés à tout cela.

Des évêques en communion avec le pape ont participé à l’ordination épiscopale illicite de Chengde ou ont pris part à la Huitième Assemblée nationale des représentants catholiques. Le monde extérieur leur accorde sa sympathie parce qu’ils ont agi contraints et forcés. Mais, de grâce, n’oublions pas qu’une victime qui se montre faible est aussi un acteur si elle ne réagit pas avec force contre l’injustice. Avant de leur montrer de la sympathie, en tant que victimes, demandons-nous qui paiera les conséquences de leurs actes – qui ruine la hiérarchie et les intérêts de l’Eglise et qui trompe les fidèles ?

Le communiqué du Vatican du 18 décembre 2010 est une déclaration d’une rare force. Il montre, au moins, que le Saint-Siège a progressivement ouvert les yeux face aux incidents de ces derniers mois et a réalisé que les conséquences pourraient être dramatiques pour l’Eglise en Chine si rien n’était fait pour redresser la pente.

Ce communiqué a également rendu espoir aux catholiques chinois, déçus de la politique chinoise du Vatican. Mais le Vatican ne semble pas encore se rendre compte de sa responsabilité dans sa conduite passée, trop empreinte de faiblesse. Ce n’est qu’en abandonnant toute attitude ambiguë et en se tenant ferme sur ses positions que le Vatican parviendra à convaincre les catholiques chinois.

Pour ramener l’Eglise de Chine dans le droit chemin, il nous faudra des cœurs courageux qui prendront vraiment en charge les joies et les peines de notre mère l’Eglise.