Eglises d'Asie

Sind : l’Eglise catholique dénonce la discrimination dont sont victimes les minorités religieuses touchées par les inondations

Publié le 30/09/2011




 Dans la province du Sind, au sud du Pakistan, qui a été la plus touchée par les pluies de mousson torrentielles et les inondations qui ont suivi, l’ONU annonce un bilan de près de 400 morts, plus de 1,8 million de déplacés et au moins 665 000 maisons détruites. Dans tous les districts de la province, encore sous les eaux, la presque totalité des récoltes est perdue. Dès le début de la catastrophe, la Caritas Pakistan, …

 … qui lors des inondations de 2010 était venue en aide à 50 000 familles du Sind, a mis en place les secours, distribué des colis alimentaires, des médicaments, des purificateurs d’eau et des tentes. Selon ses responsables sur le terrain, des discriminations se produisent dans la distribution des aides publiques et privées et elles touchent en priorité les minorités religieuses et les dalits (ex-intouchables).

Vers la mi-septembre, le diocèse de Hyderabad et des organisations humanitaires ont décidé de lancer un appel à la communauté internationale. Dans leurs communiqués, ils ont dénoncé l’impossibilité d’accéder à l’aide humanitaire pour les minorités hindoues, chrétiennes, ahmadi, en particulier si elles appartenaient aux Scheduled Castes (SC) ou Scheduled Tribes (ST) et donc étaient considérées comme des dalits (1). Exclues des camps de réfugiés, oubliées des distributions alimentaires, elles ne recevaient même pas les aides qui leur étaient destinées, celles-ci étant systématiquement détournées par l’administration de la province, une pratique que l’Eglise avait déjà vigoureusement dénoncée lors des inondations de 2010 (2).

Le P. Samson Shukardin, vicaire général du diocèse de Hyderabad et directeur de la Commission diocésaine ‘Justice et Paix’, a témoigné auprès de l’agence Fides : « Tout le diocèse est touché et toutes les paroisses ont demandé de l’aide. Les évacués sont principalement des hindous mais il y a également des milliers de familles chrétiennes et musulmanes (…). Toutefois, ce sont les populations tribales, présentes dans la moitié des paroisses, qui sont victimes des plus fortes discriminations. » Et le prêtre de citer comme exemple les chrétiens de l’ethnie aborigène parkari qui ont été chassés des camps de réfugiés du gouvernement dans le district de Badin, aussi bien en raison de leur religion que de leur statut de Scheduled Tribes (SC) qui fait d’eux des intouchables.

Le district de Badin est l’un de ceux qui a été le plus affecté par la catastrophe. Dans cette région où 20 % des victimes sont des hindous aborigènes ou dalits, leur exclusion de l’aide humanitaire est visible : aucun d’eux n’a pu pénétrer dans l’un des 278 camps mis en place par les autorités, toute distribution d’eau et de nourriture leur a été refusée et ils ont dû s’installer sur le bord des routes, sans jamais avoir reçu aucun des secours d’urgence envoyés par des ONG hindoues, qui ont été confisqués dès leur arrivée dans le district par les forces de police.

La communauté ahmadi, considérée comme hérétique par la majorité musulmane et régulièrement discriminée à ce titre, dénonce les mêmes exactions. « Les villages ahmadi inondés ont été délibérément ignorés et leurs habitants refoulés des camps de réfugiés du gouvernement. Nous avons dû louer nous même plusieurs bateaux pour sauver environ 370 Ahmadi et d’autres personnes piégées par les flots », a raconté Saleem-ud-din, l’un des responsables de la communauté ahmadi, à l’agence Ucanews le 27 septembre dernier.

Suite à la révélation par différents médias ces derniers jours du traitement réservé aux dalits et minorités religieuses par les autorités du Sind, ainsi qu’aux déclarations des responsables religieux et de plusieurs ONG demandant au gouvernement de faire cesser cette discrimination mettant en danger la vie de milliers de personnes, le président pakistanais Asif Ali Zardari a demandé un rapport au gouverneur de la province. « Les discriminations fondées sur la caste, la croyance ou la religion dans le cadre d’opérations de secours, d’aide ou de réhabilitation sont inacceptables. Il s’agit d’une catastrophe humanitaire qui demande une réponse en dehors de toute considération partisane ou religieuse », a déclaré le porte-parole du président pakistanais.