Eglises d'Asie

75 000 réfugiés bhoutanais présents au Népal depuis 1990 ont trouvé asile dans un pays tiers

Publié le 11/02/2013




Un communiqué conjoint du Haut Commissariat aux réfugiés de l’ONU et de l’Organisation internationale des migrations l’affirme, un rapport du Jesuit Refugee Service le confirme : le programme international de réinstallation des réfugiés bhoutanais parqués dans des camps au Népal depuis 1990 porte des fruits ; depuis sa mise en place en 2007, ce sont 75 000 réfugiés qui ont pu ainsi trouver asile dans un pays tiers, aux Etats-Unis principalement ainsi qu’au Canada, en Australie et en Europe.

Selon un communiqué du 24 janvier dernier du Jesuit Refugee Service (JRS), impliqué de longue date dans l’aide aux réfugiés bhoutanais présents au Népal, « le rêve du JRS et de la Caritas est en train de prendre corps ». Le P. Amal, jésuite, directeur du JRS Népal, précise la teneur de ce « rêve » : « Nous sommes heureux de voir (les réfugiés bhoutanais) partir et de voir les camps fermer. »

L’arrivée de ces réfugiés au Népal remonte à 1990, lorsque le Bhoutan expulsa sous la contrainte plus de 100 000 Lhotshampas. Ces derniers, descendants de Népalais hindous, venus s’installer au début du XXème siècle au Bhoutan, royaume bouddhiste, firent les frais de la politique de « bhoutanisation » du pays, décrétée en 1988 par Thimphu (Thimbu), capitale du Bhoutan. Non désirés en Inde, ces réfugiés désormais apatrides seront accueillis au Népal, où ils furent parqués dans sept camps situés non loin de la frontière avec l’Inde. Durant des années, ils militeront pour leur retour au Bhoutan, sans jamais réussir à se faire entendre de la communauté internationale. Finalement, ce sont les Etats-Unis et quelques autres pays développés qui finiront par leur ouvrir leurs portes, aux termes d’un accord passé entre le Népal et l’ONU en novembre 2007.

Avant cette date, faute de retour possible au Népal, le sort des réfugiés bhoutanais bloqués dans l’est du Népal depuis 1990 paraissait sans issue, les multiples sessions de négociations entre le Népal et le Bhoutan ne débouchant sur aucune solution concrète en matière de rapatriement au Bhoutan (1). Depuis l’accord de novembre 2007, les réfugiés se sont résolus dans leur très grande majorité à l’exil dans un pays tiers. Après deux années de montée en puissance, le processus de réinstallation a fonctionné à plein de 2010 à 2012 et, à la fin de l’an dernier, le HCR a pu annoncer que le programme mené par lui, qualifié de « particulièrement satisfaisant », avait permis le départ de 75 000 réfugiés des sept camps gérés par ses équipes : 63 400 réfugiés ont été accueillis par les Etats-Unis, 5 296 au Canada, 3 837 en Australie, 724 au Danemark, 710 en Nouvelle-Zélande, 546, en Norvège, 326 aux Pays-Bas et 257 au Royaume-Uni.

Pour autant, le départ de ces 75 000 réfugiés ne clôt pas le dossier. Selon le P. Amal, il reste à ce jour 39 000 personnes dans les camps. Quatre-vingts pour cent d’entre elles sont candidates à la réinstallation dans un pays tiers. Le HCR évoque un horizon à dix ans avant d’obtenir leur arrivée effective dans un pays d’accueil. Pour les vingt pour cent restants, l’espoir d’un retour au Bhoutan est très faible : en vingt-deux ans, le Bhoutan n’a pas accepté le retour sur son sol d’un seul réfugié, pas même pour les quelques rares Lhotshampas qui, en 1990, avaient quitté le pays en laissant de proches parents derrière eux. Le P. Amal précise que ceux qui choisiront de demeurer au Népal devront continuer à vivre dans les camps.

Le JRS cite le cas de Kezang, responsable d’un établissement scolaire installé au sein du camp « Belangi 3 ». Kezang explique que ce sont des raisons familiales qui l’ont décidée à ne pas demander la réinstallation, même si cette décision signifie pour elle et ses proches de rester au Népal en l’absence de cadre définissant clairement leurs droits et la protection auxquels ils peuvent prétendre. « Si je demeure ici, j’aurai besoin de la citoyenneté, mais je sais que je ne l’obtiendrai pas. Ceci dit, mon père est ici, il est vieux et il ne veut pas partir. Je dois respecter ses sentiments. Alors, nous verrons…», précise-t-elle.

Pour ceux des réfugiés qui resteront au Népal, le JRS et d’autres agences non gouvernementales réfléchissent à ce qui pourrait être fait. Des contacts ont été pris avec le ministère népalais de l’Education pour s’assurer que les réfugiés auront accès aux écoles et aux universités. Mais, une fois la mission du HCR achevée, l’incertitude quant au sort des réfugiés restants est grande. « Si nécessaire, nous continuerons à aider les réfugiés qui restent sur place à faire face à leur nouvelle situation », a déclaré le P. Amal.