Eglises d'Asie – Chine
Hongkong : à la veille des élections renouvelant le Legco, le gouvernement renonce à imposer des cours de patriotisme à l’école
Publié le 10/09/2012
Au lendemain d’une manifestation qui avait réuni plus de 100 000 personnes contre ce projet devant le siège du gouvernement, le chef de l’exécutif Leung Chun-ying a déclaré à la presse que son gouvernement « donnait autorité aux écoles de décider quand et comment elles souhaitaient introduire des cours de morale et d’instruction civique ». Ce faisant, il renonçait au caractère obligatoire de ces cours, cédant à la pression de la rue, devenue considérable ces jours-ci, à la veille du scrutin renouvelant les députés du Legislative Council (Legco) (1).
Il y a plus d’un an, le Bureau pour l’éducation du gouvernement de Hongkong avait ouvert une consultation au sujet de l’introduction de cours de morale à l’école. Après étude du projet, le diocèse catholique de Hongkong, dont la présence au sein du secteur éducatif est très importante, avait fait savoir son rejet de cette initiative, estimant que les autorités cherchaient à privilégier l’attachement des petits Hongkongais au Parti communiste et au gouvernement chinois plutôt qu’à la patrie. L’Eglise reprochait à l’Etat de chercher à promouvoir une éducation morale et patriotique, là où elle appelait de ses vœux une instruction civique et morale.
Malgré les avis négatifs rencontrés lors de cette phase de consultation, le gouvernement de Hongkong était passé outre et avait poursuivi son plan de rendre obligatoires ces cours de patriotisme dans les écoles à l’horizon 2016. Ces dernières semaines, l’opposition des enseignants et des élèves n’avait toutefois cessé de monter en puissance, les opposants au projet y voyant une tentative d’imposer une propagande pro-chinoise aux enfants de la région semi-autonome de Hongkong. Pour le gouvernement de Hongkong, il s’agissait de permettre au système éducatif de contribuer au sentiment d’identité nationale des quelque sept millions de Hongkongais (2).
L’opposition au projet a culminé le 7 septembre lorsqu’un sit-in a réuni plus de 100 000 manifestants au pied des bâtiments abritant le gouvernement de Hongkong. Dans les dix jours qui avaient précédé, un total de près de 300 000 personnes s’y étaient rassemblées, mettant une pression maximale sur le chef de l’exécutif à la veille d’échéances électorales importantes.
L’annonce du retrait du projet a donc été accueillie avec soulagement par ses opposants, mais ceux-ci soulignent que la partie est loin d’être gagnée. Le chef de l’exécutif a en effet exclu de renoncer au projet mais s’est dit ouvert au dialogue. Selon le P. Stephen Chan, conseiller ecclésiastique de la Commission ‘Justice et Paix’ du diocèse de Hongkong, Leung Chun-ying a opéré « un retrait tactique » mais n’a pas renoncé à sa politique. Les cours de morale patriotique ne sont plus obligatoires mais l’administration va s’efforcer de convaincre une par une les écoles et leurs organismes de tutelle, en recourant à des incitations ou à des menaces, pour les amener à adopter le projet gouvernemental. « Nous devons nous préparer à une longue campagne », a souligné le prêtre.
Quant au cardinal Zen Ze-kiun, évêque émérite du diocèse de Hongkong, il a apporté son soutien aux 14 élèves qui avaient entamé une grève de la faim pour signifier leur refus du projet gouvernemental. Assis parmi les manifestants le 7 septembre au soir, le cardinal a déclaré qu’il espérait que la jeunesse de Hongkong resterait calme et mesurée, tout en ajoutant : « Si le gouvernement use de méthodes dilatoires, alors nous n’aurons pas d’autre choix que d’agir [en manifestant]. »
A Hongkong, la question scolaire reste un sujet sensible. Avant ce projet d’éducation patriotique, le gouvernement local s’était heurté aux Eglises chrétiennes, à l’Eglise catholique notamment, qui refusaient – et refusent toujours – la mise en place d’un plan d’autonomisation des établissements scolaires qui aurait pour conséquence d’affaiblir la tutelle que le diocèse de Hongkong et les congrégations religieuses exercent sur les établissements scolaires qu’ils animent.