Eglises d'Asie – Chine
Depuis sa résidence surveillée, Mgr Ma Daqin a salué la mémoire de Nelson Mandela
Publié le 06/12/2013
Mgr Thaddeus Ma a choisi trois citations de Nelson Mandela pour honorer la mémoire de celui qui devint le premier président noir de l’Afrique du Sud. Toutes trois sont tirées de l’autobiographie de Mandela, Un long chemin vers la liberté. La première est : « La liberté est indivisible : les chaînes que portait l’un de mes compatriotes, tous les portaient, les chaînes que tous portaient, je les portais. » La seconde est celle-ci : « Il y a eu beaucoup de moments sombres où ma foi en l’humanité a été mise à rude épreuve, mais jamais n’ai cédé au désespoir. » Et la troisième est : « L’oppresseur doit être libéré tout comme l’opprimé. Tous deux sont dépossédés de leur humanité. Un homme qui prive un autre homme de sa liberté est prisonnier de la haine. Tous deux sont enfermés derrière les barreaux de leurs préjugés et de l’étroitesse d’esprit. » Mgr Ma ajoute enfin ces derniers mots : « Prions pour le repos de l’âme de Mandela ».
Mgr Ma, qui quasi-quotidiennement ‘twitte’ les réflexions que lui inspirent la Bible ou des lectures spirituelles, semble n’avoir voulu que saluer la mémoire de Nelson Mandela et son combat pour la liberté. Mais il est permis de penser que l’évêque auxiliaire de Shanghai, empêché depuis un an et demi d’exercer son mandat épiscopal, a fait siennes les réflexions qui ont été celles de Mandela.
Depuis sa messe d’ordination, le 7 juillet 2012, à l’issue de laquelle il avait déclaré publiquement se démettre de ses fonctions au sein de l’Association patriotique des catholiques chinois pour se consacrer entièrement à son ministère épiscopal, Mgr Ma est assigné à résidence au séminaire de Sheshan. En juillet dernier, accompagné par des fonctionnaires du gouvernement local, il a été aperçu en visite à Jinggangshan, berceau de l’Armée rouge dans les montagnes du Jiangxi. Le 24 octobre dernier, il a fait une brève apparition au centre funéraire de Longhua, à Shanghai, à l’occasion des obsèques d’un prêtre âgé avec lequel il avait travaillé, le P. Shen Baoyi.
Mais, au-delà de ces deux événements, Mgr Ma, âgé de 46 ans, reste confiné dans un état de semi-liberté très étroit. Un temps éloigné de Sheshan, il y est retourné vivre il y a quelques mois et peut désormais y recevoir des prêtres de son diocèse. Outre son compte Weibo, suivi par près de 25 000 personnes, il alimente également un blog. Ce dernier est sans doute strictement contrôlé : depuis un long commentaire publié à la mi-octobre 2013 au sujet de l’encyclique Lumen Fidei du pape François, ce blog est devenu muet. La liberté de mouvement de l’évêque de Sheshan, tout comme son espace de parole et surtout de gouvernement de son diocèse, paraissent toujours aussi limités.
Nommé par Rome, accepté par Pékin, Mgr Ma n’est pas le seul évêque à se trouver en butte à l’hostilité des autorités chinoises pour avoir signifié que le lien qui l’unit à la personne du pape et, à travers lui, à l’Eglise universelle est plus important que l’allégeance, exigée par Pékin, aux institutions mises en place pour contrôler l’Eglise, telles l’Association patriotique. Dans le diocèse de Zhouzhi, au Shaanxi, Mgr Joseph Wu Qinjing, ordonné évêque en 2005, vit en résidence surveillée dans un bâtiment du petit séminaire de Xi’an.
Selon les observateurs, pour Mgr Ma et Mgr Wu, comme pour d’autres diocèses en attente de nomination épiscopale, cette année 2013 qui s’achève n’a pas vu de progrès significatif, les contacts entre la Chine et le Saint-Siège paraissant au point mort. Si Rome a fait connaître sa disposition à reprendre les négociations, Pékin pour l’heure, n’a pas fait savoir quelle était la volonté du pouvoir au plus haut niveau sur ces questions.
(eda/ra)