Eglises d'Asie

Chaque année, plus de mille jeunes filles mariées de force et converties à l’islam

Publié le 11/04/2014




Plus de mille jeunes filles chrétiennes et hindoues sont enlevées, converties de force à l’islam et contraintes d’épouser un musulman chaque année, révèle un nouveau rapport, paru le 7 avril dernier, du Mouvement pour la Solidarité et la Paix (MSP), un regroupement d’ONG, d’associations et …

… d’organismes dont fait partie la Commission ‘Justice et Paix’ de la Conférence des évêques catholiques du Pakistan.

Selon ces dernières estimations, sur le millier de victimes concernées – dont le nombre augmente sensiblement chaque année –, 700 sont chrétiennes et 300 hindoues. Des chiffres qui sont très largement sous-évalués, poursuit le document du MSP, « un grand nombre de cas ne faisant pas l’objet de plaintes ».

Le rapport, intitulé « Mariages forcés et conversions forcées dans la communauté chrétienne du Pakistan », dénonce un scénario immuable : âgées de 12 à 25 ans, appartenant à des familles pauvres, les jeunes victimes sont séquestrées, converties à l’islam puis mariées de force à leur ravisseur ou à celui qui leur a été « réservé ».

Selon la Commission ‘Justice et Paix’, qui a participé à l’élaboration de ces statistiques, la plupart des jeunes filles chrétiennes enlevées viennent de familles pauvres de la province du Pendjab où se trouve la majorité des deux millions de chrétiens que compte le Pakistan.

La plupart du temps, les jeunes filles sont dans l’incapacité de se défendre face aux menaces des ravisseurs ou de la police qui tentent de les dissuader de porter plainte ou, lorsqu’elles comparaissent devant un tribunal, les forcent à se rétracter. Quant aux familles des victimes, si elles décident de porter l’affaire devant la justice, invariablement les ravisseurs portent plainte à leur tour, les accusant de s’opposer à la conversion ou au mariage spontanés de la jeune fille. De plus, seuls les rapts de mineures sont pris en compte, les femmes de plus de 18 ans étant censées être « consentantes ».

« La jeune fille peut subir des violences sexuelles, une prostitution forcée, des coups et des abus domestiques, voire même être victime de trafic des êtres humains », rapporte le document, étayé par de nombreux témoignages.

En février 2012, un article de l’IRIN (1) rapportait le cas d’une jeune fille de 16 ans, d’origine hindoue, qui avait été enlevée par un groupe de jeunes gens à Karachi, dans le Sind, province où ont lieu la plupart des rapts de femmes hindoues. Elle s’était alors retrouvée mariée de force à un certain Ahmed Salim, âgé de 25 ans, et contrainte de se convertir à l’islam. Voilée et affublée d’un nouveau nom, elle avait été emmenée par sa nouvelle famille au Pendjab où elle vit aujourd’hui.

« Le kidnapping de jeunes hindoues est devenu extrêmement courant, explique à l’IRIN Amarnath Motumal, un avocat réputé de la communauté hindoue de Karachi. Ce phénomène s’est accentué ces cinq dernières années et s’aggrave de jour en jour. Le Pakistan est l’un de ces nombreux pays d’Asie qui souffre des conséquences de l’avortement sélectif en faveur des garçons, ce qui a conduit à cette situation où plus de 90 millions de femmes sont estimées ‘manquantes’ dans cette partie du monde. »

Selon lui, il y aurait chaque mois environ une vingtaine de conversions forcées à l’islam de jeunes filles originaires de Karachi. L’avocat est persuadé que des écoles coraniques sont impliquées dans ce « trafic de conversions », un procédé qui, semble-t-il, est conseillé aux étudiants musulmans par leurs professeurs eux-mêmes.

« Le phénomène est prouvé. Il est véritablement très préoccupant pour les chrétiens et les hindous, qui se sentent dans un état de grande insécurité et de grande vulnérabilité, confirme le P. James Channan, directeur du Peace Centre de Lahore, à l’agence Fides. Nous nous sommes occupés de plusieurs cas de mariages forcés : les jeunes filles appartiennent aux milieux les plus pauvres et souvent les riches propriétaires fonciers musulmans en profitent pour perpétrer ces abus. »

Le rapport, qui fournit également une explication du contexte historique et social du phénomène du rapt et de la conversion forcée à l’islam des jeunes filles chrétiennes et hindoues, conclut par l’absence totale au Pakistan « de garanties juridiques, politiques et procédurales en matière de sauvegarde des droits fondamentaux des minorités religieuses ».

Les résultats du rapport qui fait actuellement la Une des journaux pakistanais sont, cette année, accompagnés d’un appel du MSP à une prise de conscience générale. Des événements de sensibilisation de la population sont d’ores et déjà prévus, en collaboration avec la Commission ‘Justice et Paix’, au Pakistan mais aussi dans différentes régions du monde.

(eda/msb)