Eglises d'Asie – Sri Lanka
Les bouddhistes extrémistes poursuivent leurs attaques antichrétiennes
Publié le 11/03/2014
Selon la National Christian Evangelical Alliance of Sri Lanka (NCEASL), qui a été la première organisation à relayer l’information par Twitter le 26 février au soir, les émeutiers étaient menés par une dizaine de moines bouddhistes de l’organisation extrémiste Bodu Bala Sena (BBS, Force bouddhiste) connue pour ses opérations violentes à l’encontre des minorités religieuses de l’île.
Le secrétaire général du BBS lui-même, Galaboda Aththe Gnanasara Thero, était à la tête des agresseurs qui ont fait irruption vers 18 h 30, heure locale, dans les bâtiments de la Holy Family Church, qui sert à la fois de lieu de culte et d’habitation pour le pasteur et sa famille. L’église protestante se trouve à Asgiriya, dans la partie nord de la ville de Kandy, située au centre de l’île, un haut lieu du bouddhisme où le temple de la Dent (du Bouddha) draine quotidiennement des foules de pèlerins.
Les émeutiers, estimés selon les sources entre 250 et 350 personnes, ont vandalisé les locaux où se tenait une assemblée de prière, ordonnant que « le culte soit arrêté immédiatement ».
Alors que le pasteur Lakshita tentait de parlementer avec le secrétaire général du Bodu Bala Sena, faisant valoir ses droits à la liberté de culte et de religion tels qu’ils sont inscrits dans la Constitution sri-lankaise, les bonzes l’ont forcé à sortir de la maison, ainsi que sa femme, sa fille de 18 ans et quelques jeunes qui participaient à la réunion. Tous ont ensuite été frappés violemment, insultés et menacés de mort s’ils poursuivaient leurs activités religieuses.
Sur l’ordre de Galaboda Aththe Gnanasara Thero, les habitants des localités voisines, y compris les bouddhistes, ont été réunis autour du bâtiment saccagé. Le secrétaire général du Bodu Bala Sena leur a enjoint de ne plus avoir aucun lien avec des « traîtres » comme le pasteur, les membres de la Holy Family Church ou d’autres communautés chrétiennes, sous peine de subir le même sort.
L’un des fidèles ayant appelé la police, cette dernière est arrivée sur les lieux et a pris la déposition du pasteur et de son épouse alors que les agresseurs s’étaient dispersés.
Les jours suivants, rapporte le Christian Today Australia le 22 février, les moines du BBS ont menacé de la même manière, les villages de la province toute proche de Sabaragamuwa, leur ordonnant de ne pas soutenir et de ne pas fréquenter les chrétiens, faute de quoi ils auraient à en « subir les conséquences ».
Alors qu’en réponse à l’attaque de l’église d’Asgiriya, des chrétiens de la région avaient commencé à faire circuler une pétition destinée aux autorités de la province afin de défendre leur liberté de religion, les bouddhistes extrémistes ont également menacé les signataires de violentes représailles.
« La liberté de pensée, de conscience, de religion et d’association, devrait être accordée à toutes les communautés religieuses », avait déclaré le 26 janvier dernier Mgr Dhiloraj Canagasabey, évêque anglican de Colombo, lors d’un grand rassemblement œcuménique réunissant plus de 5 000 chrétiens à Colombo, afin de protester contre l’augmentation des attaques antichrétiennes par les moines bouddhistes ces derniers mois.
La célébration, organisée conjointement par le National Christian Council of Sri Lanka et la National Christian Evangelical Alliance, s’était tenue à la cathédrale anglicane de Colombo. « Nous attendons maintenant que le gouvernement fasse respecter la loi et nous ne pouvons que nous inquiéter fortement des discours de haine à l’encontre des communautés religieuses minoritaires », avait conclu l’évêque anglican.
A la veille de l’assemblée du Conseil des droits de l’homme à Genève, où la situation du Sri Lanka sera à l’ordre du jour, ces dernières attaques risquent d’apporter un crédit supplémentaire aux allégations de violations des droits de l’homme auquel le gouvernement de Mahinda Rajapaksa doit faire face aujourd’hui.
Le choc provoqué par la découverte à la fin du mois dernier d’un charnier contenant les restes de 80 personnes, dont des femmes et des enfants, dans le district de Mannar, est encore dans tous les esprits au Sri Lanka. Malgré les dénégations du gouvernement sri-lankais, qui vient de refuser que les Nations Unies mènent une enquête sur les crimes de guerre durant la dernière phase de la guerre civile, ces « nouveaux éléments » ont été pris très au sérieux par le Conseil des droits de l’homme.
La Haut Commissaire aux droits de l’homme, Navi Pillai, a d’ores et déjà prévenu Colombo que la mise en place d’une enquête indépendante et internationale au Sri Lanka était devenue d’autant plus inévitable qu’un rapport accablant du Public Interest Advocacy Centre (PIAC), daté du 5 février dernier, avait été présenté à Genève, affirmant que des ordres de « destruction systématique des fosses dans lesquelles avaient été jetés de nombreux cadavres de Tamouls » avaient été donnés à l’armée et aux forces de sécurité sri-lankaises afin de « dissimuler le massacre de très nombreux civils ».
(eda/msb)