Eglises d'Asie

Stagnation du nombre de catholiques depuis 50 ans

Publié le 17/09/2015




Pour la troisième fois depuis 2013, l’Eglise catholique a réuni évêques, prêtres et laïcs concernés dans un congrès national pour réfléchir ensemble sur l’évangélisation au Vietnam. Le rassemblement s’est tenu au Centre pastoral de l’archidiocèse de Huê, du 1er au 4 septembre dernier. Le thème proposé au débat …

… était ainsi formulé : « Renouveler les activités évangélisatrices dans le Vietnam d’aujourd’hui ».

L’organisation avait été confiée à la Commission pour l’évangélisation, dirigée par l’évêque auxiliaire de Hung Hoa, Mgr Alphonse Nguyên Huu Long. Trois autres évêques ont participé à l’animation du congrès : l’évêque de Phat Diêm, Mgr Joseph Nguyên Nang, qui a commenté le décret conciliaire « Ad gentes », Mgr Cosme Hoang Van Dat, évêque de Bac Ninh, qui n’avait pu se déplacer mais avait envoyé une vidéo sur le thème : « Du décret Ad gentes à la Joie de l’Evangile » et enfin l’évêque de My Tho, Mgr Pierre Nguyên Van Kham. La conférence inaugurale prononcée par le président de la Commission pour l’évangélisation a particulièrement retenu l’attention. Elle a en effet posé concrètement le problème de la non-progression (en termes relatifs) des effectifs du catholicisme depuis plus d’un demi-siècle.

L’évêque s’est interrogé sur les résultats obtenus par l’Eglise du Vietnam au cours des cinquante-cinq années écoulées depuis l’institution de la hiérarchie vietnamienne. On peut les relever à partir des rapports annuels envoyés par la Conférence épiscopale aux instances romaines. Certes, il ne s’agit là que de chiffres qui ne sont qu’un élément visible de la situation ecclésiale. Ces statistiques avaient été portées à la connaissance du public par le P. Antoine Nguyên Ngoc Son en 2010, à l’occasion du cinquantenaire de la création de la hiérarchie (1960-2010).

Les rapports annuels donnent une idée plutôt médiocre du développement de l’Eglise au cours de ces cinquante années. Le nombre des catholiques du Vietnam ne s’est pas élevé. Au contraire, on peut noter une tendance continue à la diminution.

En 1960, le nombre des catholiques au Vietnam est de 2,43 millions pour 35,17 millions d’habitants, c’est-à-dire 6,93 % de la population. Quarante ans plus tard, en 2000, le nombre de catholiques était de 5 200 000 pour une population de 77 millions d’habitants. Le pourcentage n’était plus que de 6,75 %. En 2008, les catholiques étaient au nombre de 6 100 000 pour un nombre d’habitants de 86 100 000. Le pourcentage atteignait alors 7,08 %. Enfin en 2014, alors que la population était estimée à 95 247 775 habitants, le rapport annuel envoyé par les évêques à Rome mentionnait 6 606 495 catholiques. Le pourcentage avait diminué et n’était plus que de 6,93 %. Ainsi, cinquante-cinq ans après la création de la hiérarchie au Vietnam, le pourcentage des catholiques par rapport à la population est strictement le même, à savoir 6,93 %.

L’évêque relève d’autres chiffres qui rendent cette absence de progression du catholicisme à la fois paradoxale et inquiétante. Il note, par exemple, que le nombre peu élevé de conversions est en contradiction avec l’abondance du personnel d’Eglise engagé dans l’évangélisation. Ainsi en 2014, le nombre total des prêtres (séculiers et religieux) est de 4 635, auxquels il faut ajouter 2 357 séminaristes, 19 717 religieux et religieuses, et surtout 50 448 catéchistes laïques. C’est donc un total de 88 546 personnes qui, d’une façon ou d’une autre, participent à l’annonce de l’Evangile. Or, pour l’année 2014, le nombre de catéchumènes entrant dans l’Eglise par le baptême n’a été que de 41 396. Il faut donc deux évangélisateurs pour un baptême.

Pour expliquer cet état de fait, on peut trouver un certain nombre de raisons d’ordre social. Le fait majeur est qu’après l’avènement du nouveau régime (avril 1975), la diffusion de l’Evangile a été freinée par la fermeture d’un certain nombre d’accès à la société civile. L’Eglise s’est vue retirer ses écoles, ses hôpitaux, la presse libre, l’organisation de mouvements de jeunesse, etc.

Cependant, on peut penser que la raison principale est à chercher à l’intérieur même du comportement des catholiques. Ceux-ci, pour la plupart, mènent une vie religieuse individuelle exemplaire. Mais ils ont toujours pensé que la tâche d’évangélisation ne leur appartenait pas. En cela, ils diffèrent des protestants pour lesquels l’annonce de l’Evangile est primordiale. Au Vietnam, malgré les difficultés rencontrées, leur progression a été spectaculaire depuis 1975. Ils atteindraient aujourd’hui le chiffre 2 200 000.

Toute la seconde partie de la conférence de l’évêque de Hung Hoa porte sur la réforme à laquelle les catholiques doivent soumettre leur vie religieuse pour qu’elle témoigne véritablement de l’Evangile auprès de la population vietnamienne. L’évêque pense aussi que les catholiques ont encore fort à faire pour comprendre véritablement les valeurs religieuses des non-chrétiens.

(eda/jm)