Eglises d'Asie

Vers un assouplissement des conditions d’ouverture des lieux de culte ?

Publié le 19/11/2015




Le 11 novembre dernier, le ministre indonésien de l’Intérieur, Tjahjo Kumulo, a annoncé qu’il allait proposer une révision du texte législatif encadrant la construction des lieux de culte. Ce décret de 2006 stipule que …

… tout nouveau lieu culte nécessite l’accord écrit de 90 fidèles et celui de 60 personnes du voisinage. « Nous réfléchissons à la suppression de ces deux points », a précisé Tjahjo Kumulo au Jakarta Post.

Ce sont précisément ces deux points qui, depuis des années, rendent extrêmement difficile la rénovation, l’agrandissement ou la construction de nombreux lieux de cultes, notamment ceux des minorités chrétiennes, surtout lorsqu’elles subissent l’ostracisme de leur voisinage. La recrudescence, ces derniers mois, de violences suite à la destruction de lieux de culte chrétiens, faute d’avoir reçu d’autorisation officielle, a attisé les tensions interreligieuses, notamment dans la province d’Aceh, où une personne a perdu la vie en octobre dernier.

Si le décret d’annulation entre en vigueur, une simple autorisation de permis de construire de la mairie suffira à ouvrir de nouveaux lieux de culte. « Il serait bon de revenir aux fondements constitutionnels de liberté et de pratique religieuses, sans ces lourdes procédures administratives », a déclaré à l’agence Ucanews, le P. Guido Suprapto, secrétaire de la Commission épiscopale pour les laïques. « Si un lieu de culte déjà construit n’a pas encore reçu de permis de construire, les autorités devraient faciliter l’obtention du permis, mais ils n’arrivent pas à comprendre cela », a-t-il précisé.

Pour Hendrikus Masan Hena, de la paroisse Saint-Jean-Baptiste de Parung, dans la province de Java-Ouest, « même si ce décret simplifie les procédures, des groupes extrémistes continueront à trouver des excuses pour empêcher la construction de nouveaux lieux de culte ». La paroisse, érigée en l’an 2000, compte près de 3 000 fidèles. En 2009, une demande de permis auprès de la municipalité a été déposée ; la démarche a été renouvelée en 2011. A ce jour, les deux demandes sont restées dans réponse. « Pourquoi les autorités ne nous répondent-elles pas ? », s’interroge le catholique.

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L’annonce du ministre de l’Intérieur d’assouplir les conditions d’obtention du permis de construire pour les lieux de culte a suscité de vives réactions, notamment de la part de certains groupes musulmans. Ma’ruf Amin, président du MUI (Conseil des oulémas d’Indonésie), organisation semi-officielle du culte musulman en Indonésie, a déclaré qu’il était non seulement opposé à l’annulation du décret de 2006, mais « qu’il appelait le législateur à le renforcer », afin de punir les personnes qui ne respecteraient pas ses conditions d’application.

Au Setara Institute for Democracy and Peace, une ONG indonésienne de défense des droits de l’homme, le ton est tout autre. Selon le Jakarta Post, le président de l’ONG a vivement réagi, déclarant : « L’ouverture de lieux de culte fait partie intégrante du droit de tout homme à pratiquer librement sa religion. Et ces droits sont protégés par la Constitution indonésienne. (…) La demande du MUI vise seulement à créer davantage de discriminations envers les minorités religieuses. »

(eda/nfb)