Eglises d'Asie

Caritas vient en aide aux travailleurs migrants maltraités

Publié le 04/04/2016




« Mon seul rêve était de pouvoir construire une maison pour ma famille. A chaque fois qu’il pleuvait, nous ne pouvions rester dans notre cabane, avec notre toit en feuilles de palmiers qui prenait l’eau », raconte Verriah Lechchami, mère de deux enfants, qui, en 2010, a immigré au Koweït comme domestique, …

… pour tenter de réaliser son rêve.

Après trois mois de dur labeur, Verriah demande à sa patronne le paiement de son salaire. Elle se heurte à un refus catégorique. Après de multiples demandes, sa patronne la frappe jusqu’à ce qu’elle s’écroule, inconsciente. Lorsqu’elle reprend connaissance, elle découvre que sa patronne lui a enfoncé 14 clous dans un bras et une jambe. Malgré ces mutilations, elle continue de travailler six mois de plus, en attente des documents officiels de son agence d’emploi, lui permettant de pouvoir rentrer au Sri-Lanka.

Soutien psychologique, assistance juridique et matérielle

Quand l’équipe Kurunegala de la Caritas a rencontré Verriah Lechchami, elle était encore hospitalisée pour soigner ses blessures physiques, souvenirs douloureux du traumatisme subi au Koweït. La Caritas a alors pu lui proposer une assistance psychologique, puis, grâce à l’aide de bienfaiteurs étrangers, une aide matérielle, afin de construire une maison en dur pour sa famille. La Caritas a également proposé à son mari du travail, afin qu’il puisse apporter un revenu au foyer.

« Quand je suis arrivée au Koweït, j’ai appris que j’allais travailler dans une usine textile, ce qui n’était pas prévu au départ, que le nombre d’heures travaillées serait plus élevée et ce, pour un salaire plus bas que ce qu’on m’avait promis », témoigne L. H Jesika, actuellement en congés au Sri Lanka, venue chercher une assistance juridique auprès de l’équipe Kurunegala. La Caritas joue alors un rôle d’informateur sur les droits des travailleurs à l’étranger et si besoin, elle intervient comme médiateur entre les diverses ambassades et le Bureau sri-lankais de l’emploi à l’étranger, afin de faciliter le retour au pays des travailleurs exploités

Une longue liste de victimes

Selon des statistiques gouvernementales, ce sont près d’1,7 millions de travailleurs migrants sri-lankais, qui sont partis travailler loin de leur pays pour faire vivre leur famille, la plupart d’entre eux, étant des femmes employées comme domestiques ou soignantes, au Moyen-Orient. Malheureusement, comme d’autres migrants dans les Pays du Golfe, ces travailleuses souffrent de maltraitance ou de harcèlement. « Elles sont victimes du non-paiement de leur salaire, de conditions de travail inhumaines et souffrent fréquemment de maltraitance physique et psychologique », confirme Harshani Sanjeewani, responsable du pôle « familles migrantes » de la Caritas.

En février 2016, le gouvernement sri-lankais a ainsi procédé au rapatriement d’une centaine de travailleurs migrants, victimes de maltraitance, de harcèlement ou de promesses d’emplois non tenus, en Arabie Saoudite, aux Emirats Arabes Unis et au Koweït.

Selon des statistiques officielles, en 2013, 298 travailleurs sri-lankais sont décédés à l’étranger et 1 741 plaintes de harcèlement physique et sexuel ont été déposées auprès du Bureau sri-lankais de l’emploi à l’étranger. Cette même année, le Sri Lanka avait fait rappeler son ambassadeur à Riyad pour protester contre la décapitation d’une employée de maison sri-lankaise, reconnue coupable du meurtre d’un enfant, alors qu’elle n’avait que 17 ans.

L’année dernière, en août 2015, une mère de famille sri lankaise de 45 ans – travailleuse migrante en Arabie Saoudite, où la loi islamique est en vigueur – a été condamnée à mort par lapidation, pour adultère. Un Sri-Lankais non marié a été condamné à 100 coups de fouet. Les parlementaires sri-lankais avaient alors pressé leur gouvernement de demander la clémence pour la femme et une grâce pour l’homme. Plusieurs d’entre eux avaient également demandé que les femmes sri-lankaises ne puissent désormais plus aller travailler en Arabie saoudite. En décembre 2015, L’Arabie saoudite a alors accepté d’organiser un nouveau procès pour l’employée de maison sri-lankaise. En novembre 2015, au Koweït, une domestique sri-lankaise a été tuée par le fils de son employeur.

De nouvelles mesures de sensibilisation

Face à cette dramatique situation, la Caritas a développé de nouveaux programmes de sensibilisation aux risques d’immigration pour les candidats tentés par un départ à l’étranger, ainsi que des programmes de préparation qui fournissent une assistance juridique et financière aux candidats au départ.

Il y a quelques semaines, le gouvernement sri-lankais a pris des mesures pour limiter les abus des agences d’emploi, notamment l’envoi de mineurs à l’étranger, en allongeant l’âge légal de départ à l’immigration. Dorénavant, les femmes devront être âgées d’au moins 25 ans pour partir travailler en Arabie Saoudite, et d’au moins 23 ans, pour les autres pays du Moyen-Orient. Pour les autres régions du monde, l’âge minimum est fixé à 21 ans. D’après le porte-parole du Bureau de l’Emploi à l’étranger, des mesures complémentaires vont également être mises en place avant le départ des candidats, notamment des stages de formation sur les droits des travailleurs à l’étranger.

Selon des statistiques sri-lankaises, les travailleurs migrants sri-lankais rapportent, chaque année, plus de 7 millions de dollars US à l’économie du pays, soit plus de 5% de la production nationale.

(eda/nfb)