Eglises d'Asie

Le n° 2 des Affaires religieuses arrêté pour corruption

Publié le 24/09/2015




Un haut responsable en charges des affaires religieuses chinoises est – c’est une première – visé par une enquête dans le cadre de la vaste campagne de lutte contre la corruption lancée par le président Xi Jinping.

Zhang Lebin, directeur adjoint de l’Administration d’Etat des Affaires religieuses (anciennement Bureau des Affaires religieuses), est accusé de « graves violations de la discipline [du Parti communiste chinois] », a annoncé ce 22 septembre la Commission centrale pour l’inspection de la discipline. C’est le premier responsable des Affaires religieuses à être touché par la série d’enquêtes entamées en 2013, qui a déjà fait tomber des dizaines de milliers de responsables.

Zhang Lebin avait disparu des médias et des événements publics depuis plusieurs mois. D’après le site dwnews.com, une pré-enquête le concernant avait commencé au premier trimestre 2015. Officiellement, Zhang était en charge des musulmans et des croyances des minorités, mais, depuis l’année dernière, il était ponctuellement apparu lors d’événements en lien avec le bouddhisme, d’où des spéculations le concernant quant à un éventuel changement d’affectation, rapporte l’agence Ucanews.

Les soupçons pesant sur Zhang Lebin pourraient être liés à une affaire remontant au début de cette année : 32 responsables des Affaires religieuses avaient été exclus pour avoir accepté des pots-de-vin de la part de musulmans pour une place au pèlerinage à La Mecque. Le départ pour le hadj, le grand pèlerinage annuel des musulmans, est en effet très contrôlé et étroitement contingenté pour les musulmans de Chine.

Mais si l’affaire du pèlerinage à La Mecque a eu lieu sous le mandat de Zhang, ce sont peut-être ses liens avec Ling Jihua qui ont causé sa perte. Ce dernier, ancien bras droit de Hu Jintao, le prédécesseur de Xi Jinping, a été arrêté cet été pour corruption lui aussi. Sa chute avait commencé en 2012 quand son fils avait eu un accident de voiture au volant d’une Ferrari, en galante compagnie au cœur de Pékin.

Ling Jihua était à la tête du Front uni, l’instance supervisant les relations du Parti communiste chinois avec tous les groupes de la société civile qui ne sont pas le Parti, comme les syndicats officiels ou les organismes qui gèrent les religions officiellement reconnues.

Ling Jihua était donc le supérieur de Zhang, et, d’après dwnews.com, son mentor: « C’est Ling qui avait recommandé Zhang pour les Affaires religieuses », écrit le site spécialisé sur les questions politiques, cité par Ucanews.

Ling Jihua était auparavant le patron de Zhang pendant huit ans, à la tête des Jeunesses communistes, l’un des vecteurs d’ascension politique au sein du Parti communiste chinois, dont étaient issus nombre de proches de l’ancien président Hu Jintao. Ling Jihua était ensuite devenu un membre éminent du Comité central du Parti communiste, et Zhang était entré à l’Administration d’Etat des Affaires religieuses en 2003.

Depuis la chute de Ling Jihua, son entourage est dans le collimateur de la commission anti-corruption. Actuellement en visite aux Etats-Unis, Xi Jinping a assuré que la lutte anti-corruption en Chine n’avait rien à voir avec une lutte pour le pouvoir, comme, a-t-il expliqué, dans la série télévisée House of Cards. Cependant, pour la plupart des observateurs de la Chine, si les dirigeants chinois ont une claire conscience des dangers que la corruption généralisée fait peser sur leur légitimité, la campagne en cours est autant un moyen de redonner de la crédibilité au Parti que d’éliminer des rivaux. Quant aux Affaires religieuses, il est de notoriété publique que nombre de ses cadres abusent de leurs fonctions pour bénéficier financièrement des organismes religieux dont ils assurent la tutelle.

(eda/sp)