Eglises d'Asie – Chine
Les libérations de prisonniers en 1993 semblent de bon augure pour l’Eglise clandestine
Publié le 18/03/2010
Mgr Casimir Wang Milu, ordonné en secret évêque de Tianshui, et le Père trappiste Placide Pei Ronggui, emprisonné à la suite d’un affrontement sanglant entre des catholiques du village de Youtong et la police en 1989, avaient été libérés sur parole au début de 1993 (3). En mars, des fonctionnaires chinois ont dit à John Kamm, défenseur des droits de l’homme résidant à Hongkong, que six laïcs, dix prêtres et un diacre n’appartenant pas à l’Eglise officielle venaient de sortir de prison. D’autres témoignages ont compté parmi les libérés Mgr Han Dingxiang, évêque de Handan. Les prisonniers relâchés avaient pour la plupart été arrêtés lors d’actions répressives contre des communautés clandestines dans les provinces de Fujian, Gansu, Hebei, Henan et Shaanxi et les villes de Shanghai et de Tianjin.
Ces libérations ont été interprétées par certains comme des gestes de bonne volonté de la Chine vis-à-vis de l’étranger, destinés à soutenir son offre d’accueillir les jeux olympiques de l’an 2000, ou en vue de normaliser ses relations avec le Vatican. D’autres pensent que les personnes récemment libérées avaient simplement achevé leurs peines: ré-éducation, réforme par le travail, détention administrative (extra-judiciaire).
Cependant, selon une source catholique de la Chine du nord, les autorités ont choisi la manière douce à l’égard des communautés clandestines. Ainsi au mois de mai, au sanctuaire marial de Donglu, province du Hebei, ces communautés ont organisé une célébration publique au cours de laquelle plus de cinq mille pèlerins de l’Eglise clandestine de Baoding ont assisté à la messe et deux prêtres ont été ordonnés évêques auxiliaires, sans que les autorités interviennent.
D’après une autre source, au mois de février 1993, les catholiques clandestins du Hebei ont cherché à obtenir la reconnaissance du gouvernement pour le nouveau diocèse de Langfang, dirigé par un évêque ordonné en secret, Mgr Song Weili, qui travaille maintenant dans l’Eglise « officielle ».
Selon un observateur de Hongkong, les dirigeants chinois ne se soucient guère de savoir si un catholique appartient à une communauté « officielle » ou « clandestine » dès lors qu’ils savent qui est à la tête de ces communautés. Ils pensent en effet pouvoir contrôler les groupes catholiques clandestins du seul fait qu’ils en contrôlent les évêques. Ce serait la raison pour laquelle les chefs de l’Eglise clandestine sont encouragés à paraître au grand jour.
Zhang Shengzuo, chef du Bureau des affaires religieuses de Chine, que des délégués catholiques de Hongkong ont rencontré à Pékin en septembre 1993, leur a dit que les problèmes de l’Eglise clandestine sont une affaire interne de l’Eglise de Chine et ne concernent pas le gouvernement. Les activités religieuses, aurait-il dit, sont compatibles avec la loi commune chinoise, pourvu qu’elles n’aillent pas à l’encontre du système socialiste. Zhang utilise la méthode déjà utilisée par lui lorsqu’il était directeur adjoint du Front uni, qui consiste à introduire la division parmi les membres de l’Eglise pour les amener à marcher sous la direction du Parti.
D’aucuns estiment que la politique de Zhang est celle « de la carotte et du bâton », puisqu’on continue à faire état de rafles de la police contre des réunions religieuses clandestines comme celles des Eglises domestiques protestantes. Selon un rapport du 22 juin 1993 d’Amnesty International de Londres, la police a fait irruption au mois de mars dans une église domestique clandestine du district de Xunyang, Shaanxi : un chrétien est mort au cours de l’opération et il y eut plusieurs blessés graves. On a également appris qu’une retraite de carême de trois jours suivie par une centaine de catholiques clandestins du district de Linchuan, Jiangxi, a été brusquement interrompue et que deux de ses participants ont été amenés en détention pour y subir une formation sur la politique religieuse du gouvernement.
Le quotidien de langue anglaise de Hongkong South China Morning Post a rapporté le 8 novembre 1993 que les persécutions de chrétiens avaient augmenté dans la province du nord de Anhui et qu’au moins six prédicateurs avaient été arrêtés. Citant des sources chrétiennes d’Anhui, l’article indique qu’au moins quatre prédicateurs ont été condamnés à une peine allant de un à trois ans de « rééducation par le travail ».