Eglises d'Asie

Accord avec les Nations Unies sur les Rohingyas

Publié le 16/02/2018




Le Bangladesh a signé un accord permettant à l’agence des Nations Unies pour les réfugiés de contrôler le retour des milliers de déplacés Rohingyas vers la Birmanie.

Les réfugiés Rohingyas et les travailleurs humanitaires ont salué un projet associant les Nations Unies dans le rapatriement de dizaines de milliers de Rohingyas, la minorité persécutée ayant fui la violence meurtrière de la Birmanie dans l’état de Rakhine. Le vice-ministre des affaires étrangères du Bangladesh, Shahriar Alam, a déclaré le 12 février que le gouvernement a signé un accord permettant à l’agence des Nations Unies pour les réfugiés, l’UNHCR, de prendre part à l’opération.
« Nous avons répété à de maintes reprises que le processus de rapatriement est très complexe », a confié Alam à l’AFP, depuis le camp de réfugiés de Cox’s Bazar où il vit actuellement. « Nous voulons remplir les formulaires de rapatriement en présence des Nations Unies, pour que personne ne puisse dire avoir été forcé par quiconque ou renvoyé contre sa volonté. » Cet accord survient alors que le rapatriement des réfugiés, qui devait commencer le mois dernier, est déjà en retard.
Le 15 janvier, le Bangladesh et la Birmanie on signé un accord pour le rapatriement d’environ 770 000 musulmans Rohingyas vers l’état de Rakhine, déchiré par la guerre. Plus de 690 000 Rohingyas ont franchi la frontière vers le Bangladesh après une répression militaire, survenue contre des militants Rohingyas contre des postes de sécurité, le 25 août. Hashem Ali, 35 ans, Rohingya et père de cinq enfants, vit au camp de réfugiés de Kutupalong et salue l’implication des Nations Unies. « C’est une très bonne nouvelle pour nous. Tous les Rohingyas veulent retourner vers leur terre ancestrale, mais ils veulent avant tout pouvoir vivre en sécurité et paisiblement à leur retour. Les Rohingyas ont protesté contre un rapatriement sans le contrôle des Nations Unies. Aujourd’hui, ils seront soulagés et prêts à retourner chez eux. » Ali a fui la Birmanie en septembre avec sa famille, originaire de Maungdaw. « Nous ne faisons plus confiance au gouvernement birman ; nous avons été trompés trop souvent. Nous sommes confiants dans la capacité des Nations Unies à assurer notre retour en sécurité ; ils pourront déployer des forces pour assurer la paix à Rakhine. »

Un espoir de paix et de stabilité

Abul Kalam, 38 ans, également père de cinq enfants, a fui Rakhine fin août. Il vit au camp de Balukhali et partage les sentiments d’Ali : « Depuis le début, nous avons demandé l’implication des Nations Unies mais notre demande a été ignorée. Nous sommes heureux de constater que le Bangladesh a fini par entre nos appels. Maintenant, nous pensons que l’opération sera bénéfique aux réfugiés, car ils pourront retourner chez eux avec un espoir de paix et de stabilité. »
Ranjon Francis Rozario, directeur de Caritas Bangladesh, estime de son côté que la participation des Nations Unies rendra le rapatriement acceptable par la communauté internationale : « Si la Birmanie considérait les Rohingyas comme des êtres humains, ils n’auraient pas subi un pareil traitement. Jusqu’à maintenant, les réfugiés avaient peur de retourner chez eux dans ces conditions, sans l’intervention internationale. Ce nouvel accord aura non seulement le soutien des Rohingyas mais pourra aussi avoir l’appui de la communauté internationale. »
Muhammad Abul Kalam, directeur du Comité pour le secours et le rapatriement des réfugiés (Refugee Relief and Repatriation committee), géré par le gouvernement bangladais, confie que ce projet d’inclure les Nations Unies dans le rapatriement cherche à respecter les normes internationales : « Le rapatriement se poursuit et la participation des Nations Unies fait partie de l’opération. Nous ne savons pas comment la Birmanie accueillera cette situation, mais nous sommes persuadés que les Nations Unies doivent y participer. Leur expertise dans ce domaine est précieuse. »

La Birmanie accueille l’intervention internationale

La Birmanie s’est montrée prête à rapatrier les réfugiés en faisant venir des diplomates et représentants des Nations Unies à Rakhine. Parmi les délégués venus visiter, le 9 février, les centres d’accueil et le camp temporaire de Maungdaw se trouvaient des ambassadeurs, diplomates et représentants du Canada, de Brunei, de l’Union européenne, d’Indonésie, d’Australie, de France, du Japon, des Nations Unies et la Banque Mondiale. Le ministre birman des affaires sociales, Win Myat Aye, s’est confié à Radio Free Asia : « Nous prévoyons d’accueillir les réfugiés et de les reloger selon la loi. Le gouvernement est responsable des réfugiés qui peuvent prouver qu’ils étaient résidents à Rakhine. »
Aung Min, directeur du département Immigration et Population de l’état de Rakhine, assure être prêt à recevoir les réfugiés, les installations étant terminées. Selon l’accord pour le rapatriement signé le 15 janvier, la Birmanie aurait dû débuter l’opération dans deux centres d’accueil et dans un camp temporaire dès le 23 janvier, pour une durée de deux ans. Le Bangladesh assurera le transfert des résidents birmans dont l’identité aura été vérifiée, en présence des représentants des Nations Unies. La Birmanie s’appuiera sur les services des Nations Unies « selon le besoin et aux moments opportuns ».
Kyaw Min, du parti rohingya Démocratie et droits de l’homme basé à Yangon, partage cependant son inquiétude : « Les voix des réfugiés doivent être prises en compte, au-delà de l’accord entre la Birmanie et le Bangladesh. Je doute qu’il soit possible d’assurer le rapatriement de 700 000 personnes en seulement deux ans. » L’accord signé par le Bangladesh est intervenu peu après un entretien survenu le 10 février entre le ministre britannique des affaires étrangères Boris Johnson et la conseillère d’état Aung San Suu Kyi.
Ils ont évoqué l’importance des autorités birmanes dans la mise en place d’une investigation indépendante et approfondie sur les violences à Rakhine, soulignant le besoin urgent d’assurer de bonnes conditions aux Rohingyas avant leur retour chez eux.
Le ministre Johnson a également visité, le 11 février, le village de Pantawpyin, situé dans le nord de Rakhine : « J’étais choqué par ce que je voyais. Des centaines de villages ont été incendiés » a tweeté le ministre le 11 février.

(Ucanews)